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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/539

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exemple de l’un et de l’autre changement dans une seule personne, c’est-à-dire dans David, son père, qui d’abord excella dans la vertu, et qui ensuite tomba dans le crime. Qui fut d’abord plus heureux que Judas ? Cependant il est devenu le traître de son Maître. Qui fut d’abord plus criminel que saint Paul, et néanmoins il est devenu ensuite un vaisseau choisi de Dieu ? Qui fut plus odieux que saint Matthieu, tant qu’il a été publicain, et néanmoins il a eu depuis sa place parmi les apôtres ? Qui commença mieux que Simon le Magicien ? Cependant il est devenu depuis l’exécration de tout le monde. Combien a-t-on vu d’autres changements semblables ? Combien en voit-on encore aujourd’hui ? C’est pourquoi je ne puis m’empêcher de vous redire souvent que les plus grands pécheurs, et ceux mêmes qui se seraient voués au théâtre, ne doivent point se désespérer lorsqu’ils pensent à se convertir ; et que le juste au contraire, qui vit sans reproche dans l’Église, ne doit point trop s’assurer de son salut. Dieu dit à l’un par son Apôtre : « Que celui qui croit être debout, prenne garde de ne point tomber ». (1Cor. 10,12) Et il dit à l’autre par son Prophète : « Celui qui est tombé, ne « pourra-t-il se relever ? Et par un autre : « Redressez les mains lâches et languissantes, et raffermisse les genoux qui sont tremblants ». (Jer. 3,4) Il dit aux bons « Veillez » ; et aux méchants : « Levez-vous, vous qui dormez ; et levez-vous d’entre les morts ». (Eph. 5,14) Les uns doivent travailler pour se conserver ce qu’ils sont ; les autres pour devenir ce qu’ils ne sont pas : les uns pour demeurer sains, les autres pour cesser d’être malades. On à vu souvent des malades devenir sains. On a vu souvent des personnes saines tomber malades par leur négligence. Jésus-Christ dit aux uns : « Vous voilà guéris maintenant, ne péchez plus, de peur qu’il ne vous arrive quelque chose de pis ». (Jn. 5,10) Il dit aux autres : « Voulez-vous être guéris ? Levez-vous, portez votre lit, et allez en votre maison ». Le péché, mes frères, est une grande paralysie, et un mal plus dangereux que toutes les paralysies du corps. Le pécheur non seulement ne fait pas le bien, mais il fait encore le mal. Cependant, en quelque déplorable état qu’il puisse être, s’il veut s’en relever sincèrement, tous ses péchés se dissiperont.
Quand nous aurions langui durant trente-huit ans dans le vice, comme le malade de l’Évangile, si nous voulons être guéris, rien ne nous en empêchera. Jésus-Christ vous crie encore aujourd’hui : « Levez-vous, portez votre lit » : pourvu que vous vouliez vous lever, ne désespérez point du reste : « Vous n’avez point d’homme », mais vous avez Dieu. Vous n’avez personne qui vous jette « dans la piscine », mais vous avez celui qui peut faire que vous n’aurez point besoin de piscine. Vous n’avez personne qui prévienne les autres pour vous y jeter le premier, mais vous avez celui qui vous commande de porter votre lit. Vous ne pouvez pas dire ici : Lorsque je veux me jeter dans la piscine, un autre nie prévient. Si vous voulez vous plonger dans cette fontaine de grâces, personne ne vous en peut empêcher. Cette source ne s’épuise point, cette fontaine coule toujours. Nous recevons tous de sa plénitude, et ses eaux guérissent nos corps et nos âmes. Approchions-nous avec ferveur de cette source du salut. Raab était une courtisane et néanmoins elle s’est sauvée. Le bon larron était un voleur et un homicide, et il est devenu citoyen du ciel. Et ce qui est étonnant et redoutable, Judas, disciple de Jésus-Christ, s’est perdu, lorsqu’un voleur sur la croix est devenu le disciple de Jésus-Christ. Ce sont là, mes frères, les miracles de la puissance de Dieu. C’est ainsi que les mages ont trouvé grâce auprès de Dieu, qu’un publicain est devenu Évangéliste, et qu’un blasphémateur a été changé en apôtre.
5. Considérez donc toutes ces choses, et ne désespérez jamais. Entrez dans une sainte confiance, et excitez-vous vous-mêmes. Commencez seulement à marcher dans la voie étroite, et vous vous y avancerez en peu de temps. Prenez bien garde de ne vous pas fermer la porte de la miséricorde, et que votre défiance ne soit comme des épines qui vous en bouchent l’entrée. La vie présente est courte, et le travail est léger. Quand il serait grand, on devrait le souffrir. Si vous ne voulez pas endurer les travaux si louables et si heureux de la pénitence, vous tomberez dans les maux et dans les afflictions malheureuses que l’on souffre dans le monde. Que si d’une façon ou d’autre il faut toujours souffrir, pourquoi ne préférons-nous pas à des travaux qui nous damnent, ces peines qui sont si heureusement et si glorieusement récompensées ?