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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/595

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villes, repoussés de tous les peuples et privés des avantages de toutes les lois.
D’ailleurs la vie nouvelle que les apôtres introduisaient dans le monde était dure et pénible, et celle au contraire qu’ils tâchaient de détruire était agréable et voluptueuse. On voyait tous les jours que leurs disciples étaient exposés à mille périls, et qu’on inventait des supplices tout nouveaux pour leur faire souffrir une mort cruelle. De plus, le temps durant lequel ils ont prêché l’Évangile était plein de guerres, de troubles et de tumultes, et ce seul obstacle pouvait suffire pour en empêcher l’établissement.
Ne faut-il donc pas s’écrier ici avec le Prophète : « Qui pourra raconter la puissance du Seigneur et faire entendre toutes ses merveilles » ? Si Moïse a eu tant de peine, avec tous ses miracles, à persuader ses frères les Israélites de quitter un pays où ils étaient opprimés et réduits à l’état d’esclaves travaillant à faire des briques, qui a pu persuader aux disciples des apôtres de se laisser tous les jours déchirer par les fouets, de souffrir des maux insupportables et de renoncer à une vie délicieuse, pour en embrasser une autre austère et pénible, et cela lorsqu’ils n’avaient pour maîtres que des étrangers, que des hommes inconnus et regardés de tout le monde comme des ennemis de l’État et comme des pestes publiques ? Que dirait-on aujourd’hui si un seul individu détesté de tous les hommes allait non dans des royaumes, ni dans des provinces et des villes entières, mais dans une seule maison pour y mettre la division, pour séparer les amis d’avec les amis, pour soulever le père et la mère contre les enfants, et le mari contre la femme ? Ne l’aurait-on pas mis en pièces avant même qu’il ouvrît la bouche ?
De plus, si on ne voyait rien en lui que de méprisable, et qu’en menant une vie austère il la voulût imposer aux autres et persuader aux riches d’abandonner leurs richesses, voulant lui seul s’opposer au torrent de la coutume et de la vie ordinaire des hommes, n’est-il pas certain qu’on le lapiderait et qu’il aurait autant d’ennemis qu’il voudrait se faire de disciples ? Cependant, mes frères, ce qui paraîtrait impossible dans une seule maison s’est fait dans toute la terre. Jésus-Christ a envoyé douze hommes comme autant de médecins du ciel, qui ont changé toute la face du monde en courant les terres et les mers, au milieu des montagnes et des précipices, des écueils et des rochers, et parmi les guerres, les séditions et les tumultes. Que si vous voulez savoir les famines, les tremblements de terre et les malheurs différents dont tout le monde était alors agité, lisez l’histoire de Josèphe.
Mais, sans en chercher d’autres témoignages, il suffit d’entendre ce que Jésus-Christ dit ici : « Ne vous laissez point troubler, il faut que tout cela arrive ». Et « Celui qui persévérera jusqu’à la fin sera sauvé ». Et « L’on prêchera cet Évangile dans le monde entier ». Il dit même que ces maux ne seraient que « comme des commencements ». Comme les apôtres paraissaient étonnés et abattus de ce qu’il disait, il les rassure en leur disant que quand il arriverait beaucoup d’autres malheurs encore plus grands, il fallait nécessairement que son Évangile fût prêché dans tout le monde, et qu’alors la fin arriverait.
4. Considérez donc, mes frères, dans quel état se trouvait alors l’Église, lorsqu’elle n’était encore que comme dans le berceau, où elle avait besoin d’une paix profonde, combien elle était tourmentée par les divisions, par les persécutions et par les armes. Je ne me lasse point, mes frères, de vous représenter l’image affreuse de ces temps. Les séducteurs y faisaient la première guerre. « Il viendra », dit Jésus-Christ, « de faux christs et de faux prophètes ». Les Romains faisaient la seconde. « Car vous entendrez », dit le Sauveur, « parler de guerre et de bruits de guerre ». La troisième fut excitée par la famine. La quatrième par la peste et par les tremblements de terre. La cinquième par la persécution des apôtres. « Ils vous feront », leur dit Jésus-Christ, « souffrir de grands maux ». La sixième, par la haine générale de tous les peuples. La septième, par les discordes intestines qui feraient qu’oit se trahirait l’un l’autre. La huitième, par les faux-frères, et enfin par la ruine de la charité, le plus grand et le plus déplorable de tous ces maux, et la source même dont tous les autres sortaient. Vous êtes surpris sans doute lorsque vous voyez tant dé guerres différentes, si nouvelles et si effroyables, que les apôtres ont eu à soutenir. Cependant la prédication de l’Évangile s’est élevée au-dessus de tous ces obstacles et s’est enfin répandue dans toute la terre, par la force de celui qui avait dit : « Cet Évangile sera prêché partout l’univers ».
Où sont donc maintenant ceux qui s’arrêtent