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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/62

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touché du repentir et de la componction de ses fautes. Ce sont là les présents que Dieu nous fait parce qu’ils nous sont les plus utiles. Nous avons à soutenir une rude guerre. Nous avons à combattre contre des ennemis invisibles, contre des esprits de malice, contre les principautés et les puissances, et nous sommes trop heureux si par tous nos soins, toute notre vigilance, et tous nos efforts, nous pouvons résister à une phalange si redoutable. Mais si nous devenons lâches et paresseux, si nous nous amusons à nous divertir et à rire, nous serons vaincus par notre mollesse, même avant que de combattre.
Ce n’est point à nous à passer le temps dans les ris, dans les divertissements, et dans les délices. Cela n’est bon que pour les prostituées de théâtre, et pour les hommes qui les fréquentent, et particulièrement pour ces flatteurs qui cherchent les bonnes tables. Ce n’est point là l’esprit de ceux qui sont appelés à une vie céleste ; dont les noms sont déjà écrits dans l’éternelle cité, et qui font profession d’une milice toute spirituelle : mais c’est l’esprit de ceux qui combattent sous les enseignes du démon.
Oui, mes frères, c’est le démon qui a fait un art de ces divertissements et de ces jeux, pour attirer à lui les soldats de Jésus-Christ, et pour relâcher toute la vigueur, et comme les nerfs de leur vertu. C’est pour ce sujet qu’il a fait dresser des théâtres dans les places publiques, et qu’exerçant et formant lui-même ces bouffons, il s’en sert comme d’une peste dont il infecte toute la ville. Saint Paul nous a détendu les paroles impertinentes, et celles qui ne tendent qu’à un vain divertissement : mais le démon nous persuade d’aimer les unes et les autres.
Ce qui est encore plus dangereux, est le sujet pour lequel éclatent ces ris immodérés. Dès que ces bouffons ridicules ont proféré quelque blasphème, ou quelque parole déshonnête, aussitôt une multitude de fous se mettent à rire et à montrer de la joie ils les applaudissent pour des choses qui devraient les faire lapider et ils s’attirent ainsi sur eux-mêmes, par ce plaisir malheureux, le supplice d’un feu éternel. Car en les louant de ces folies, on leur persuade de les faire, et on se rend encore plus digne qu’eux de la condamnation qu’ils ont méritée. Si tout le monde s’accordait à ne vouloir point regarder leurs sottises, ils cesseraient bientôt de les faire : mais lorsqu’ils vous voient tous les jours quitter vos occupations, vos travaux, et l’argent qui vous en revient ; en un mot, renoncer à tout pour assister à ces spectacles, ils redoublent d’ardeur, et ils s’appliquent bien davantage à ces folies.
Je ne dis pas ceci pour les excuser, mais pour vous faire voir que c’est vous principalement qui êtes la source de tous ces dérèglements, en assistant à leurs jeux, et y passant les journées entières. C’est vous qui dans ces représentations malheureuses profanez la sainteté du mariage, et qui déshonorez devant tout le monde ce grand sacrement. Car celui qui représente ces personnages infâmes, est moins coupable que vous qui les faites représenter, que vous qui l’animez de plus en plus par votre passion, par vos ravissements, par vos éclats et par vos louanges, et qui travaillez de toutes manières à embellir et à relever cet ouvrage du démon. Avec quels yeux pourrez-vous regarder chez vous votre femme, après l’avoir vue si outragée en la personne de ces comédiennes ? Comment ne rougissez-vous point en pensant à elle, en voyant son sexe si déshonoré par ces infamies ?
8. Ne me dites point que tout ce qui se fait alors n’est qu’une fiction. Cette fiction a fait beaucoup d’adultères véritables, et a renversé beaucoup de familles. C’est ce qui m’afflige davantage, que ce mal étant si grand, on ne le regarde pas même comme un mal, et que lorsqu’on représente un crime aussi grave que l’est l’adultère, on n’entende que des applaudissements et des cris de joie. Ce n’est qu’une feinte, dites-vous. C’est donc pour cela même que ces personnes sont dignes de mille morts, d’oser exposer aux yeux de tout le monde des désordres qui sont défendus par toutes les lois. Si l’adultère est un mal, c’est un mal aussi que de le représenter.
Qui pourrait dire combien ces représentations dramatiques de l’adultère font d’adultères, et combien elles inspirent l’impudence et l’impureté à tous ceux qui les regardent ? Car il n’y a rien de plus impudique que l’œil, qui peut souffrir de voir ces obscénités. Vous auriez horreur qu’une femme nue se présentât à vous dans une place publique, ou dans une maison, et vous vous croiriez offensé si elle le faisait : et cependant vous ne craignez pas d’aller au théâtre, pour déshonorer publiquement