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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/75

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Jacob ne descendirent en Égypte et n’en revinrent que pour être la figure de ce qui arrive ici à Jésus-Christ. Ce peuple alla dans l’Égypte pour éviter la mort dont il était menacé par la famine ; et Jésus-Christ y va pour éviter celle dont Hérode le menaçait. Ce peuple se délivra seulement de la famine, et Jésus-Christ entrant en Égypte sanctifia tout le pays par sa présence. Mais admirez, je vous prie, comment Jésus-Christ allie la bassesse de l’homme avec la grandeur d’un Dieu. Car l’ange dit à Joseph et à Marie : « Fuyez en Égypte ; » mais il ne leur promet point de les accompagner once voyagé, ni dans leur retour ; c’était leur donner à entendre qu’ils avaient un grand conducteur avec eux, savoir cet enfant qui change dès sa naissance tout l’ordre des choses et qui force ses plus grands ennemis de contribuer eux-mêmes à l’exécution de ses desseins. Car les mages, qui étaient barbares et idolâtres, quittent toutes leurs superstitions pour le venir adorer ; et l’empereur Auguste sert par son édit à faire que Jésus-Christ naisse à Bethléem. L’Égypte le reçoit dans sa fuite, et le sauve de son ennemi, et elle tire de sa présence comme une disposition à se convertir, afin qu’aussitôt qu’elle entendra les apôtres annoncer sa foi, elle se puisse vanter d’avoir été la première à le recevoir. Ce devait être là le privilège de la Judée, mais l’Égypte le lui a ravi par son zèle. Allez aujourd’hui dans les solitudes d’Égypte, vous y verrez un désert changé en un paradis, bien plus beau que tous les jardins du monde ; des troupes innombrables d’anges revêtus d’un corps ; des peuples entiers de martyrs ; des assemblées de vierges ; enfin toute la tyrannie du démon détruite, et le royaume de Jésus-Christ florissant de toutes parts.
Vous verrez cette Égypte, cette mère des poètes, des philosophes et des magiciens, qui se vantait d’avoir trouvé toutes sortes de superstitions, et de les avoir enseignées aux autres, se glorifier maintenant d’être la fidèle disciple des pêcheurs, renoncer à toute la science de ces faux sages ; avoir toujours dans les mains les écrits d’un publicain et d’un faiseur de tentes, et mettre toute sa gloire dans la croix de Jésus-Christ, Ce sont les miracles que l’Égypte fait voir, non seulement dans ses villes, mais plus encore dans ses déserts. On y voit de tous côtés les soldats de Jésus-Christ, une assemblée royale et auguste de solitaires et une image de la vie des anges.
Cette gloire n’est point particulière aux hommes, les femmes la partagent avec eux. Elles n’ont pas moins de force que les hommes, non pour monter à cheval, et pour savoir se bien servir des armes, comme l’ordonnent les plus graves d’entre les législateurs et les philosophes grecs, mais pour entreprendre une guerre bien plus rude et bien plus pénible, qui leur est commune avec les hommes. Car elles ont comme eux à combattre le démon même, et les puissances des ténèbres ; sans que la faiblesse de leur sexe leur puisse interdire ces combats, parce qu’ils ne demandent point la force du corps, mais la bonne disposition de l’âme et du cœur. C’est pourquoi on a vu souvent dans cette sorte de guerre, les femmes témoigner plus de courage et de générosité que les hommes, et remporter de plus glorieuses victoires.
5. Le ciel n’éclate pas d’une aussi grande variété d’étoiles, que les déserts de l’Égypte ne brillent aujourd’hui par une infinité de monastères, et de maisons saintes. Celui qui se souviendra quelle était autrefois cette Égypte si rebelle à Dieu, si plongée dans la superstition ; qui adorait jusqu’à des chats ; et qui avait une frayeur respectueuse pour des poireaux et pour des oignons : comprendra en la comparant avec ce que nous y voyons maintenant, quelle est la force et la toute-puissance de Jésus-Christ. Nous n’avons pas même besoin de rappeler en notre mémoire les siècles passés, pour concevoir quel a été l’excès des superstitions de l’Égypte il n’en reste encore aujourd’hui que trop de traces parmi ses habitants.
Cependant ceux mêmes qui se plongeaient autrefois dans des dérèglements si étranges, ne s’occupent maintenant que des choses du ciel, et de ce qui est au-dessus du ciel. Ils ont en horreur les coutumes impies de leurs pères. Ils ont compassion de leurs aïeux, et ils n’ont que du mépris pour tous leurs sages, et leurs philosophes. Car ils ont enfin reconnu par expérience, que les maximes de ces sages n’étaient que des imaginations de personnes ivres, ou des contes semblables à ceux que les vieilles femmes font aux enfants ; mais que la sagesse véritable et digne du ciel était celle que des pêcheurs leur ont enseignée. C’est