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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/81

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de la Vierge ayant été accomplie, ils s’en retournèrent à Nazareth. Que dirons-nous pour concilier ces deux Évangélistes, sinon que le retour à Nazareth dont parle saint Luc précéda la fuite en Égypte : Car Dieu ne leur commanda pas d’aller en Égypte avant la purification, de peur que la loi ne fût violée en quelque chose ; mais cette cérémonie une fois accomplie, ils retournèrent d’eux-mêmes à Nazareth, où ils reçurent l’ordre de fuir en Égypte. Et ce fut au retour de ce bannissement que l’ange leur ordonna de demeurer en Nazareth, où ils étaient retournés d’eux-mêmes la première fois, par le plaisir qu’ils avaient de demeurer en leur pays. Comme ils n’étaient venus à Bethléem que pour obéir au commandement de l’empereur, sans y trouver presque de lieu pour s’y loger : aussitôt ils s’en retournèrent à Nazareth ; c’est pourquoi l’ange au retour de l’Égypte pour les mettre plus en repos, les renvoie encore en leur pays. Ce qui ne se fait pas sans une grande raison, puisque les – prophètes l’avaient prédit : « Afin d’accomplir », dit l’Évangile, « ce qui avait été prédit par les prophètes : Il sera appelé Nazaréen. »
Quel est le prophète qui a dit cela ? Ne soyez point en ceci trop curieux ni trop pointilleux. Car il y a beaucoup de prophéties qui se sont perdues, comme on en peut juger par le livre des Paralipomènes. La négligence et la paresse des Juifs a laissé perdre beaucoup de livres saints, comme leur impiété en a brûlé et détruit un grand nombre. Le prophète Jérémie se plaint de leur impiété ; et leur négligence est attestée dans le quatrième livre des R. où il est marqué qu’après un long temps on eut peine à trouver le livre du Deutéronome, qui avait été caché en terre, et dont les caractères étaient presque effacés. Si lorsque leur pays était en paix, ils ont laissé périr ces livres si saints : combien l’auront-ils fait davantage au milieu de tant d’irruptions des peuples étrangers ? Rien n’est plus certain, les prophètes avaient prédit que Jésus-Christ serait appelé Nazaréen », et c’est pourquoi les apôtres lui donnent souvent ce nom.
Les Juifs étaient donc excusables, me direz-vous, de ne pouvoir comprendre la prophétie de Bethléem ? Nullement. C’était au contraire cela même qui devait exciter leur curiosité, ils auraient dû chercher à concilier entre eux des oracles qui paraissaient se combattre. C’est le nom de Nazareth qui détermina Nathanaël à s’enquérir de Jésus, et il vint disant : « Peut-il venir quelque chose de bon de Nazareth ? » (Jn. 1,46) Car ce lieu était petit et méprisable ; et non seulement ce lieu, mais tout le pays de la Gaulée. C’est pourquoi les Pharisiens dirent à Nicodème : « Lisez bien l’Écriture, et vous trouverez qu’il ne doit point sortir de prophète de la Galilée. » (Jn. 7,12) Cependant Jésus-Christ ne rougit point d’être appelé de ce nom, pour nous faire voir qu’il n’a nul besoin de tout ce qui paraît grand selon les hommes. Il choisit ses apôtres eu Galilée, pays méprisé des Juifs, pour ôter toute excuse aux personnes lâches, et pour leur apprendre que rien de tout ce qui est extérieur ne leur peut nuire, s’ils s’appliquent sérieusement à la vertu. C’est pourquoi le Fils de Dieu n’a point voulu avoir de maison qui fût à lui : « Le Fils de l’homme », dit-il, « n’a pas où reposer sa tête. » (Mt. 8,20) C’est pour ce même sujet qu’il s’enfuit lorsqu’Hérode le veut tuer ; qu’étant né il est mis dans une crèche ; qu’il demeure dans une hôtellerie, et qu’il choisit une mère pauvre pour nous accoutumer à ne point rougir de toutes ces choses ; pour nous apprendre, dès son entrée en ce monde, à fouler aux pieds tout l’orgueil du siècle, et à ne rechercher que les biens de l’âme qui sont les vertus ?
5. Pourquoi, semble-t-il nous dire, être si fier de votre patrie, puisqu’en quelque lieu de la terre que vous soyez, je vous commande d’y demeurer comme un étranger ; puisque si vous m’obéissez, vous pouvez devenir si grand, que tout le monde ensemble ne sera pas digne de vous ? Pouvez-vous estimer ces choses, après que les philosophes païens les ont si méprisées, et qu’il les ont considérées comme étant hors de nous, et comme ne devant tenir que le dernier rang dans les biens du monde ?
Cependant saint Paul, dites-vous, ne rejette pas ces avantages, lorsqu’il dit : « Quant à l’élection divine Dieu les aime, à cause des « patriarches qui sont leurs pères. » (Rom. 11,28) Mais considérez je vous prie, à qui saint Paul parle ; et de qui il parle, et en quel temps. Il écrit à des païens, qui, devenus fidèles, s’enorgueillissaient de leur foi, traitaient les Juifs avec mépris, et les voulaient comme retrancher du rang des fidèles. C’est pourquoi saint Paul tâche de réprimer leur orgueil, et d’exciter en même temps les Juifs à la foi, et de les encourager à embrasser le culte de