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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/96

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arbre par le pied, de les priver de l’héritage de leurs ancêtres, en le donnant à d’autres enfants, et enfin par cette double peine d’être retranchés et jetés au feu ; après avoir en tant de manières amollit leur cœur endurci et les avoir enfin portés à désirer de se voir délivrés de tant de maux, il leur parle ensuite de Jésus-Christ d’une manière qui témoigne le profond respect qu’il a pour lui. Car, ayant fait voir la grande différence qui était entre eux deux, pour empêcher qu’on ne la regardât comme un respect et une déférence volontaires qu’il lui rendait, il l’appuie et l’autorise par la comparaison de leur ministère. Il ne commence pas par dire qu’il n’est pas digne de délier les cordons de ses souliers, il ne le fait qu’après avoir montré combien son baptême était imparfait, en témoignant que tout ce qu’il pouvait faire, c’était de les porter à la pénitence. « Je vous baptise dans l’eau », dit-il, non de la rémission des péchés, mais « de la pénitence. » Et il parle ensuite du baptême de Jésus-Christ comme étant rempli, d’un don et d’une grâce ineffable. Il semble qu’il leur dise : quoique Celui que je vous annonce ne soit venu qu’après moi, ne croyez pas pour cela qu’il n’ait point d’avantage sur moi. Apprenez quelle est la grandeur de la grâce qu’il vous doit faire, et vous comprendrez aisément que je n’ai rien dit de trop, ni même d’assez grand, quand j’ai protesté que je n’étais pas digne de délier le cordon de ses souliers. Et quand vous m’entendez dire « qu’il est plus fort que moi », ne croyez pas que je veuille par là me comparer avec lui, puisque je ne mérite pas même d’être au nombre des moindres de ses serviteurs, ni de lui rendre les derniers services. C’est pourquoi il ne se contente pas de nommer les souliers, il parle même d’en « délier les cordons », voulant marquer par là le service le plus bas qu’on lui pouvait rendre. Enfin, pour que l’on ne crût pas qu’il parlait ainsi seulement par humilité, mais par un sentiment sincère de la vérité, il cite des faits pour le prouver. « Il vous baptisera », dit-il, « dans le Saint-Esprit et dans le feu. » Qui n’admirera ici la sagesse de ce saint précurseur du Sauveur ? Lorsqu’il prêche de lui-même, il ne fait entendre que des paroles de menace et de terreur ; et lorsqu’il envoie vers le Christ, il ne promet que des biens et des consolations. Il ne parle plus d’une hache tranchante, d’un arbre coupé et jeté au feu, ni de la colère à venir ; mais de la rémission des péchés, de la destruction de l’enfer et de la mort, de justification, de sanctification, de délivrance, d’adoption au nombre des enfants de Dieu, d’union avec Jésus-Christ, dont les hommes doivent devenir les frères et les cohéritiers, et enfin des dons ineffables du Saint-Esprit. Il comprend toutes ces grâces en disant : « Il vous baptisera dans le Saint-Esprit. » Cette expression figurée marque encore davantage l’abondance de la grâce qu’ils devaient attendre. Car il ne dit pas : « Il vous donnera le Saint-Esprit », mais « il vous baptisera dans le Saint-Esprit. » Et ce mot même « de feu », qu’il met ensuite, marque encore davantage la force et l’efficace de la grâce.
5. Dans quels sentiments et dans quelle disposition devaient entrer ceux qui écoutaient ce saint homme, lorsqu’ils voyaient qu’ils pouvaient tout d’un coup devenir semblables aux plus grands des prophètes ! Car s’il leur parle « de feu », c’est sans doute pour les faire souvenir des prophètes, dans les visions de qui il paraît toujours du feu ; car ce fut ainsi que Dieu parla à Moïse dans le buisson ardent, à tout le peuple sur la montagne de Sina, et à Ézéchiel, du milieu de ces chérubins ardents.
Il veut bien même pour les encourager davantage leur parler d’abord du mystère qui ne devait s’accomplir qu’après tous les autres, c’est-à-dire le don du Saint-Esprit. Car il fallait auparavant que l’agneau fût égorgé, que le péché fût détruit, que l’inimitié qui existait entre Dieu et les hommes fût abolie. Il fallait que Jésus-Christ fût enseveli et qu’il ressuscitât, et ce n’était qu’après toutes ces choses que le Saint-Esprit devait venir. Il ne garde point cet ordre ; il commence à leur parler du don qui devait être la suite nécessaire, l’accomplissement et la fin de tous les autres, et faire éclater avec le plus de force par la prédication, la gloire de Jésus-Christ. Par l’annonce du Saint-Esprit, Jean veut d’abord frapper l’esprit de l’auditeur, l’amener à réfléchir en lui-même comment un tel présent sera accordé à la terre inondée d’un déluge de péchés ; puis, lorsque cette préoccupation dans laquelle il le jette, l’aura préparé à recevoir une révélation plus complète, il lui découvrira le mystère de la passion dont il pourra alors lui parler sans le scandaliser, à cause de l’attente d’un si admirable don, qui devait en être la suite. Les