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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 7, 1865.djvu/97

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esprits étant donc ainsi préparés, il s’écrie : « Voilà l’agneau de Dieu qui porte les péchés du monde. » (Jn. 1,29) Il ne dit pas, « qui remet », mais, ce qui marque plus d’amour, « qui porte les péchés du monde. » Il y a bien de la différence entre pardonner le péché ou s’en charger. Le premier se fait sans peine, mais le dernier coûte la vie.
Il leur marque aussi par ces paroles, quoique d’une manière obscure, que Jésus-Christ est le fils de Dieu. Ils n’avaient pas su encore qu’il fût le fils véritable et naturel de Dieu : mais en leur promettant que Jésus-Christ leur donnerait le Saint-Esprit, il leur révélait implicitement cette vérité. C’est pour cette raison que Dieu le Père donna à saint Jean une marque particulière pour reconnaître son fils en lui disant : « Celui sur qui vous verrez descendre et demeurer le Saint-Esprit, est Celui qui baptise dans le Saint-Esprit. » (Jn. 1,33) Aussi saint Jean dit-il : « Je l’ai vu, et je rends témoignage qu’il est Fils de Dieu (Id. 34), » faisant voir que cette descente du Saint-Esprit sur le Fils, était une preuve claire qu’il était Dieu.
Puis, quand entretenant ses auditeurs de l’espérance de ces grands biens, il les à ainsi traités avec quelque douceur et quelque indulgence, il revient tout à coup à ses premières sévérités, de peur qu’ils ne tombent dans la sécurité et la négligence. Car tel était l’esprit des Juifs ; la prospérité les portait au relâchement et au vice. Saint Jean a donc de nouveau recours aux menaces et à la terreur. « Il a le van en main, et il nettoiera parfaitement son aire. Il amassera son blé dans le grenier, mais il brûlera la paille dans un feu qui ne s’éteindra jamais (12). » Plus haut nous avons vu le Dieu vengeur du péché, ici c’est le juge que nous apercevons en même temps que l’éternité des peines : « Il brûlera la paille dans un feu qui ne s’éteindra jamais. » Ce verset nous montre encore en Dieu le Seigneur de toutes choses, le commun Père et le vigneron mystique. Jésus-Christ lui-même donne ce dernier nom à son père dans un autre endroit : « Mon Père est le Vigneron. » (Jn. 15,1) Comme ces mots : « La cognée est à la racine « de l’arbre » ne s’opposaient pas à l’idée d’une difficulté quelconque que Dieu pourrait rencontrer à distinguer ce qui mériterait d’être coupé de ce qui devrait être épargné, le Prophète se sert d’une autre comparaison qui fait évanouir cette idée, en montrant que le monde entier est dans la main de Dieu et qu’il peut châtier qui lui appartient. Tout est maintenant confus dans le monde. Quelque beau que puisse être le bon grain, il est mêlé avec la paille, parce qu’il est dans l’aire et non dans le grenier, mais alors il se fera un discernement et une séparation épouvantable.
Où sont maintenant ceux qui ne croient pas à l’enfer ? L’Évangile dit deux choses en même temps, que ceux qui croiront seront baptisés dans le Saint-Esprit, et que les incrédules seront brûlés éternellement. Si donc la première est véritable, la seconde le doit être aussi. C’est pour cela qu’il allie ensemble ces deux choses ; afin que la certitude de celle qui est déjà arrivée, nous assure de celle qui doit arriver. Au reste Jésus-Christ parlant de choses, ou semblables ou contraires, allie souvent deux prophéties, dont l’une doit s’accomplir en ce monde, et l’autre dans l’autre ; afin que les plus opiniâtres et les plus rebelles soient forcés de croire que la seconde s’accomplira en voyant la première déjà accomplie. Par exemple, il promet à ceux qui renonceront à tout pour l’amour de lui, le centuple en ce monde, et la vie éternelle en l’autre, afin que les grâces qu’il leur donne dès ici-bas, les assurent de la vérité des promesses qu’il leur a faites pour l’avenir. C’est ce que saint Jean fait en cet endroit où il unit ensemble le baptême du Saint. Esprit, et le feu qui brûlera éternellement.
6. Si Jésus-Christ n’avait baptisé les apôtres dans le Saint-Esprit, et s’il ne faisait encore tous les jours la même grâce à tous ceux qui croient, on aurait peut-être quelque raison de douter de l’autre chose que le Prophète joint, à cette première. Mais si nous voyons s’accomplir tous les jours ce qui paraissait le plus grand et le plus incroyable, ce qui dépasse infiniment la portée de la raison humaine, sur quel fondement refuserons-nous de croire une chose plus facile, plus naturelle et plus conforme à notre raison ? A peine saint Jean a-t-il, dit aux Juifs que Jésus-Christ les « baptisera dans le Saint-Esprit et dans le feu », à peine leur a-t-il fait entrevoir la merveille de ce baptême nouveau, qu’il leur parle aussitôt de ce « van » terrible, qui marque le jugement, pour les empêcher de tomber dans le relâchement et dans la paresse. Ne croyez pas, leur dit-il, qu’il vous suffise d’avoir été baptisés, si vous continuez de vivre mal après avoir reçu le