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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/104

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bien ainsi tout ce qu’il y avait d’insensé dans leur fureur ; ils ne prononçaient pas le nom de Jésus ; leur jalousie ne voulait pas entendre ce nom, tant ils étaient semblables à des bêtes fauves ! « Et même il est venu en cette ville pour ». Nous ne pouvons pas dire, dit le texte, qu’il fut d’abord avec les apôtres.
3. Voyez combien de témoignages pour montrer que Paul faisait partie des ennemis de la foi. Quant à lui, loin d’en rougir, au contraire, il s’en glorifiait. « Mais Saul se fortifiait de plus en plus et confondait les Juifs (22) » ; c’est-à-dire, leur fermait la bouche, ne leur permettait pas de souffler le mot ; « leur prouvant que Jésus est le Christ ». Il instruisait, dit le texte, car il fut tout de suite docteur. « Longtemps après, les Juifs résolurent « ensemble de le faire mourir (23) ». Les Juifs reprennent l’argument toujours en vigueur chez eux, désormais ils ne cherchent plus sycophantes, accusateurs, faux témoins : ils n’en veulent plus. Que veulent-ils donc ? Désormais ils font eux-mêmes la besogne. Ils voyaient la doctrine se propager, ils ne veulent plus avoir recours à des jugements. « Mais Saul fut « averti du dessein qu’ils avaient formé contre « sa – vie ; et comme ils faisaient bonne garde, « jour et nuit, aux portes, pour le tuer (24) ». Pourquoi ? c’est que Paul leur était plus insupportable que tous les miracles que l’on avait vus, que la conversion des cinq mille, que la conversion des trois mille. Et maintenant voyez-le sauvé, non par la grâce de Dieu, mais par l’habileté humaine ; c’est pour vous faire connaître la vertu de l’homme qui brille même en l’absence de tout miracle, de son éclat propre. « Les disciples le prirent et le descendirent, durant la nuit, par la muraille, a dans une corbeille (25) ». Naturellement pour déjouer tous les soupçons. Eh bien, après, échappé à ce danger, renonce-t-il à sa mission ? Nullement ; il se retire, afin de mieux les attaquer ; la sincérité de sa foi tenait encore en défiance un grand nombre de personnes. Voilà pourquoi cette fuite eut lieu longtemps après. Qu’est-ce à dire ? il est vraisemblable que Paul refusa longtemps de partir, malgré peut-être un grand nombre d’avertissements ; mais, quand il sut le dessein formé contre lui, il permit à ses disciples d’agir ; car il eut des disciples tout de suite.
C’est ce qu’il indiquait, en disant : « Celui qui était à Damas gouverneur de la province pour le roi Arétas, faisait faire la garde dans la ville des Damascéniens, afin de me prendre ». (2Cor. 11,32) Et, voyez : l’évangéliste ne dit rien avec exagération ; il ne cherche pas la gloire de Paul ; il dit seulement que l’on excita le roi. Les disciples le firent donc partir seul, et personne avec lui. Ce qui s’explique, parce qu’il fallait qu’il allât se montrer aux apôtres à Jérusalem ; ou plutôt les disciples le firent partir de telle sorte que, dans la suite, c’était lui seul qui devait pourvoir à sa sûreté. Mais lui, bien loin d’y penser, fit tout le contraire, et aussitôt il s’élança au milieu des furieux. Voilà le zèle brûlant ; voilà le comble de la ferveur. Et, voyez, sans discontinuer, dès le premier jour, comme il observe le précepte qu’entendirent les apôtres : « Celui qui ne prend pas sa croix, et ne me suit pas ». (Mt. 10,38). Ce fait, qu’il venait après les autres, ne le rendait que plus ardent. Et sa conduite était l’application de cette parole : « Celui à qui on remet beaucoup, aimera davantage ».(Lc. 7,47) Aussi, plus il se fit attendre, plus il prouva son amour ; condamnant ouvertement sa vie première, se reprenant à chaque instant à la flétrir, il ne croyait jamais avoir assez fait pour effacer ses premières actions. « Assurant », dit le texte, c’est-à-dire, qu’il était plein de douceur dans son enseignement. Et, voyez, on ne lui dit pas : Toi qui désolais les fidèles, d’où vient que tu es changé ? Ses ennemis rougissaient, et ne faisaient ces réflexions qu’en eux-mêmes ; il, aurait pu leur dire avec beaucoup plus de raison : C’est vous surtout qu’il convient d’instruire, car c’est ainsi qu’il se défend auprès d’Agrippa.
Imitons-le, nous aussi, je vous en conjure, et soyons prêts à braver tous les dangers plais pourquoi, dira-t-on, a-t-il pris la fuite ? ce n’est pas par lâcheté ; mais il voulait se conserver pour la prédication. S’il eût été lâche, il ne serait pas allé à Jérusalem ; il ne se serait pas aussitôt chargé de répandre la doctrine ; il aurait modéré sa fougue. Non, il n’y avait en lui aucune lâcheté, mais il y avait de la prudence. Le meurtre d’Étienne l’avait instruit ; aussi ne craignait-il pas de mourir pour la prédication, si toutefois sa mort était d’une grande utilité. C’était un homme qui ne voulait pas même voir le Christ, malgré l’ardent désir qu’il éprouvait de le voir, parce qu’il n’avait pas encore rempli sa tâche auprès des