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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/107

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il le passe sous silence, et voici ce qui est arrivé : Il s’en est allé en Arabie, ensuite à Damas, ensuite à Jérusalem, de là en Syrie ; ou bien, s’il n’en est pas ainsi, voici ce qu’il faut croire : Il alla à Jérusalem, de là il fut envoyé à Damas ; il alla ensuite en Syrie, ensuite une seconde fois à Damas, ensuite à Césarée ; et alors, après quatorze ans sans doute, Barnabé l’amena aux frères. Si cette explication n’est pas vraie, il s’agit alors d’une autre époque, car l’historien abrège considérablement le récit, entassant les époques. Voyez quel détachement de la gloire ! Il ne raconte pas cette fameuse vision, il passe outre, et ensuite il commence de cette manière : « Étant venu à Jérusalem, il cherchait à se joindre aux disciples, mais tous le craignaient ». Et voici ce qui montre encore la chaleur de Paul : Ce n’est pas l’histoire d’Ananie, ce n’est pas l’admiration qu’il excitait à Damas, mais ce sont les faits qui se sont passés à Jérusalem. Il est certain qu’on attendait de lui quelque chose de supérieur à l’homme ; et remarquez : Paul ne va pas trouver les apôtres ; la modestie le retient ; il va voir les disciples, parce qu’il est lui-même disciple ; on ne le regardait pas encore comme un fidèle.
« Alors Barnabé l’ayant pris, l’amena aux apôtres, et leur raconta comment le Seigneur lui était apparu dans le chemin ». Ce Barnabé était un homme doux et bon, son nom signifie « fils de la consolation » ; d’où il suit qu’il fut l’ami de Paul. Quant à sa bonté, à son affabilité, la preuve c’est sa conduite présente, et sa conduite avec Jean ; c’est ce qui explique l’assurance de Paul, qui lui raconte comment le Seigneur lui est apparu dans le chemin, et que Dieu lui a parlé, et qu’à Damas il s’est montré librement un serviteur du Seigneur Jésus. Il est vraisemblable qu’à Damas, Barnabé avait entendu parler de Paul. Telle fut la préparation de son apostolat dans lequel les œuvres confirmèrent les paroles. « Et il était avec eux, entrant et sortant dans Jérusalem, et parlant avec force et liberté au nom du Seigneur Jésus. Il parlait aussi et il discutait « avec les Juifs grecs (28, 29) ». Les disciples le craignant, les apôtres n’ayant pas encore confiance en lui, Paul s’arrange de manière à dissiper leurs craintes. Il parlait, dit le texte, et il discutait avec les Juifs grecs. Les Juifs grecs étaient ceux qui parlaient grec, et l’Écriture a tout à fait raison ; car les autres ne voulaient même pas le voir : « Et ceux-ci cherchaient à le tuer » ; ce qui prouve à la fois, et la violence des vaincus et l’éclat de la victoire et le chagrin qu’elle causait : « Ce que les frères ayant reconnu, ils le menèrent à Césarée.(30) ». Cette conduite s’explique par la crainte ; ils craignaient pour lui ce qui était arrivé à Étienne ; ils le mènent à Césarée : « Et ils l’envoyèrent à Tarse ». Quelle que soit leur crainte, ils l’envoient toutefois, et pour qu’il prêche, et pour qu’il soit en sûreté, Tarse étant sa patrie. Eh bien ici, voyez comme il est vrai de dire que la grâce n’agit pas toujours seule, que Dieu permet aussi aux hommes de faire beaucoup de choses par la sagesse qui leur est propre, par la prudence humaine. Ce qui est vrai de Paul, l’est bien plus des autres hommes. Il lui permet donc d’enlever tout prétexte à ces malheureux : « Cependant l’Église était en paix par toute la Judée et la Samarie, et elle s’établissait marchant dans la crainte du Seigneur, et elle était remplie de la consolation du Saint-Esprit (31) ». L’historien va parler de Pierre visitant les fidèles ; il ne veut pas que cette démarche paraisse un effet de la crainte ; il expose donc d’abord l’état de l’Église, montrant qu’au temps de la persécution Pierre était resté à Jérusalem. Mais l’Église étant partout en paix, Pierre laisse Jérusalem, telle est la ferveur qui l’emporte ! En effet, la paix n’était pas une raison pour que l’on n’eût pas besoin ailleurs de sa présence. Et pourquoi, dira-t-on, ce voyage, en pleine paix, après le départ de Paul ? C’est que les peuples vénéraient surtout ceux qu’ils voyaient souvent, et qui excitaient l’admiration de la foule. Quant à Paul, on le méprisait, et les haines étaient allumées contre lui.
2. Avez-vous bien compris comment la paix succède à la guerre, ou plutôt avez-vous bien compris le résultat de cette guerre ? Elle a dispersé les auteurs de la paix. Dans la Samarie, Simon fut couvert de honte ; dans la Judée, arriva l’histoire de Sapphire ; donc, quoique la paix régnât, il n’y avait pas lieu à se relâcher, c’était une paix qui avait besoin de consolation. « Or, Pierre, visitant de ville en ville tous les disciples, vint aussi voir les saints qui habitaient à Lydde (32) ». C’était comme un général qui passe la revue pour voir ce qui est bien aligné, ce qui est dans l’ordre, en quel lieu sa présence est nécessaire. Voyez-le courant de tous les côtés, et se trouvant partout