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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/116

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Pierre ne dit pas tout. Vous ne voyez de toutes parts que des récits écourtés, pour piquer la curiosité. C’est ainsi qu’on appelle Philippe, seulement pour aller dans la solitude. « Pierre monta sur le haut de la maison, vers la sixième heure, pour prier, et il lui survint un ravissement d’esprit ». Il vit « comme une nappe » ; réfléchissez : la faim n’a pas été assez forte pour faire courir Pierre au linge déployé devant lui. Ce qui devait couper court à son hésitation, c’est la voix qu’il entendit : « Levez-vous, Pierre, tuez et mangez ». Peut-être était-il à genoux quand il vit la vision. Moi, je pense que c’est le prédication que signifie cette vision. Maintenant, qu’elle lui vint de Dieu, ce qui le prouve, c’est qu’elle descendait sur lui d’en haut, et de plus, qu’il était dans un ravissement d’esprit. Ajoutez à cela qu’une voix se fit entendre d’en haut ; que le fait eut lieu trois fois ; que le ciel s’ouvrit ; que cela venait du ciel et y fut retiré ; grande preuve que c’était là une opération tout à fait divine !
3. Et maintenant, pourquoi la chose se passe-t-elle ainsi ? Par égard pour ceux à qui Pierre devait la raconter ; parce que lui-même avait entendu ces paroles : « N’allez point vers les gentils ». (Mt. 10,5) Et ne soyez pas dans l’étonnement : si Paul fut forcé d’avoir recours à la circoncision et d’offrir des victimes, à bien plus forte raison ces ménagements furent utiles au début de la prédication pour ceux qui étaient encore peu affermis. « Et voici », dit le texte, « que les hommes envoyés par Corneille se présentèrent à la porte ; ils appelèrent et demandèrent si ce n’était pas là que Simon, surnommé Pierre, était logé ». La maison était misérable ; voilà pourquoi ils demandent en bas des renseignements ; ils ne vont pas interroger les voisins. « Cependant Pierre, pensant à la vision qu’il avait eue, l’Esprit lui dit : Levez-vous, descendez et ne faites point difficulté d’aller avec eux, car c’est moi qui les ai envoyés ». Remarquez, l’Esprit ne dit pas Car voilà pourquoi une vision vous est apparue ; mais : « C’est moi qui les ai envoyés », montrant ainsi qu’il faut obéir, qu’il n’y a pas de compte à demander. Il devait suffire à Pierre, pour être persuadé, d’entendre l’Esprit. Faites cela, dites cela, n’en cherchez pas plus long. « Pierre étant descendu, leur dit : « Je suis celui que vous cherchez ». Pourquoi ne les reçoit-il pas aussitôt ? Pourquoi la question qu’il leur adresse ? Il voit des soldats ; il ne se contente pas de les interroger ; il commence par se faire connaître, et il leur demande ensuite ce qui les amène, afin que sa question ne fasse pas croire qu’il veut se cacher. Et la question qu’il leur adresse est de telle sorte, que, si on le pressait, il partait tout de suite avec eux ; sinon, il les logeait chez lui. Maintenant, pourquoi ceux-ci lui disent-ils : « Il vous prie de venir dans sa maison ? » C’est parce que cet ordre leur avait été donné. Peut-être aussi est-ce une excuse au nom de Corneille, comme s’ils disaient : Ne le condamnez pas ; ce n’est pas parce qu’il vous méprise qu’il nous a envoyés vers vous ; il obéit à un ordre qu’il a reçu. « Et Corneille les attendait avec ses parents et ses plus intimes amis, qu’il avait assemblés chez lui ». Et c’est avec raison : il n’eût pas été convenable de ne pas réunir ses parents et ses amis ; d’ailleurs ceux-ci, en se réunissant, devaient mieux entendre la parole de Pierre.
Avez-vous bien compris la puissance de l’aumône, et dans notre entretien précédent, et dans celui-ci ? Vous avez vu l’aumône délivrer de la mort qui n’a qu’un temps, elle délivre aujourd’hui de la mort éternelle.. Aujourd’hui l’aumône ouvre, de plus, les portes du ciel. Voyez quel bien précieux fut la foi pour Corneille ! elle lui valut la visite d’un ange, l’opération de l’Esprit en lui, le voyage du prince des apôtres se rendant auprès de lui, et une vision, qui ne laisse rien à désirer. Combien n’y avait-il pas à cette époque de centurions, de tribuns, de souverains ? Et aucun d’eux n’a reçu pareille faveur. Écoutez, vous tous, qui remplissez les armées, qui formez les cortèges des rois. « Il était religieux », dit le texte, « et craignant Dieu », et, ce qui vaut mieux encore, « avec toute sa maison ». Il était donc si attentif à la piété que, non seulement il savait se conduire, mais il conduisait de même tous les gens de sa maison. Ce n’est pas là notre habitude à nous, qui ne négligeons rien pour nous faire craindre de nos serviteurs ; mais qui, de leur piété, nous soucions fort peu. Il n’en était pas de même de Corneille ; c’était avec sa maison tout entière qu’il craignait Dieu. Et il n’était pas seulement le père commun de tous ceux qui vivaient avec lui, mais le père de ses soldats. Écoutez ce que l’on dit encore ; ce n’est pas