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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/130

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milliers d’hommes, il n’y a pas cent chrétiens qui obtiendront leur salut. Et ceux-là même l’obtiendront-ils ? Je n’en sais rien. Quelle corruption, répondez-moi, parmi les jeunes gens ! Quel relâchement parmi les vieillards ! Nul ne s’inquiète d’élever son fils comme il devrait le faire ; nul, à la vue d’un vieillard, ne songe à l’imiter. Les modèles ont disparu, et voilà pourquoi il n’y a plus de jeunes gens que l’on puisse admirer. Ne me dites pas : nous formons une multitude ; réflexion d’hommes insensés. Et supposez que pour les hommes cette réflexion eût quelque valeur ; pour Dieu, qui n’a pas besoin de nous, elle n’en a plus. Mais, tenez, écoutez donc ce (: lui prouve que cette réflexion, même pour les hommes, est sans valeur : un homme a un grand nombre de serviteurs ; si ces serviteurs sont corrompus, que de maux ne souffrira-t-il pas ! Celui qui n’a pas même un serviteur, se trouve à plaindre de n’être pas servi ; mais celui qui a des serviteurs pervers, se précipite avec eux dans la perdition, et sa perte est plus déplorable. S’il est triste de n’avoir personne à son service, ce qui est bien plus triste, c’est d’avoir des ennemis, pour lutter contre eux, pour leur faire la guerre. Ce que je dis, c’est afin de prévenir l’admiration qui considère dans l’Église la multitude ; je voudrais nous voir tous jaloux de rendre cette multitude vertueuse, chacun de nous s’emparant d’un autre membre, dont il ferait son affaire personnelle ; chacun de nous, attirant au bien, non seulement ses amis, non seulement ses parents ; ce que je redis et redis sans cesse ; non seulement les voisins, mais encore les étrangers. Par exemple : on fait la prière et tous sont là pêle-mêle, jeunes gens, vieillards, qui n’ont rien dans la tête ; des balayures, et non des jeunes gens, riant, plaisantant, conversant, (je dis ce que j’ai entendu), ils sont à genoux, se renvoyant les uns aux autres des quolibets. Eh bien ! vous qui êtes là, jeune homme ou vieillard, à ce spectacle, réprimandez, et sévèrement, et, si l’on ne vous écoute pas, appelez le diacre ; menacez, faites ce qui dépend de vous. Et si l’on osait vous répondre par des violences, certes vous trouveriez des soutiens en foule. Qui donc aurait assez peu de raison pour ne pas partager votre colère contre de pareils désordres, pour refuser de se mettre de votre côté ? Sachez vous ménager, au sortir l’église le salaire de votre prière. Dans une maison de maître, les meilleurs serviteurs sont ceux qui tiennent le mieux tout en ordre.
Vous verriez, dans une maison, un vase d’argent égaré, vous auriez beau n’être pas chargé d’en prendre soin, ne reporteriez-vous pas ce vase dans cette maison ? Je suppose un vêtement qui va se perdre, et peu vous importe à vous, et vous êtes l’ennemi de l’intendant de la maison ; cependant, comme vous aimez le maître, ne vous ferez-vous pas un devoir de lui reporter ce vêtement ? Eh bien, c’est à présent ce que je vous demande. Je vous parle de nos vases à nous. Si vous les voyez en désordre, rangez-les ; venez me trouver, je ne m’y oppose pas ; parlez-moi, avertissez-moi, je ne peux pas tout voir ; il faut me pardonner. Voyez la corruption dont la terre est infectée. Avais-je tort de dire que nous ne sommes qu’un amas d’herbes inutiles, une mer pleine de confusion ? Je ne dis pas que tous commettent de pareils désordres, mais tel est l’assoupissement répandu sur ceux qui entrent dans l’église, qu’ils ne préviennent rien, qu’ils ne redressent rien. Maintenant j’en vois d’autres qui continuent leurs conversations et restent debout pendant la prière ; d’autres comprennent mieux la décence, ce n’est pas seulement pendant la prière, mais quand le prêtre bénit. Est-ce pousser assez loin l’audace ? Espérez donc le saint l Com ment parviendrons-nous à apaiser Dieu ! Entrez dans une salle d’exercices et de jeux, vous verrez tout le monde formant un chœur bien ordonné, on n’aura rien négligé. De même que, dans, une lyre bien accordée, la variété des parties forme un tout harmonieux d’où résulte une symphonie ravissante, de même ici nous devrions, tous tant que nous sommes, nous unir, ne formant qu’un seul chœur d’une parfaite harmonie. Car nous ne sommes qu’une Église, nous ne sommes que les membres harmonieusement agencés d’une seule tête ; nous ne sommes tous qu’un seul corps ; négliger un membre quel qu’il soit, c’est négliger le corps entier, qui se meurt. Voilà comment le bon ordre du grand nombre est en péril par le désordre d’un seul. Et ce qu’il y a d’effrayant, c’est qu’ici vous ne venez pas à un divertissement, à une danse pour danser, et vous apportez le désordre ! Ignorez-vous donc que vous êtes avec les anges ? que c’est avec les anges que vous faites entendre vos