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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/146

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il ainsi pour nous ? C’est pour cela que, Dieu nous a donné un petit estomac ; c’est, pour cela qu’il nous a fixé une petite mesure de nourriture, afin de nous enseigner à soigner notre âme.
3. Étudions la constitution même, de notre corps, et nous verrons qu’une petite partie de noire être est consacrée à cette opération, La bouche et la langue sont destinées aux hymnes, notre gorge à la, parole. La nécessité de la nature nous a ainsi liés, afin que nous ne puissions, même malgré nous, tomber dans un grand, embarras d’affaires. Si les délices de la table n’étaient la source de tant de peines, de maladies et d’indispositions, elles seraient supportables. Mais les bornes imposées à, la nature sont faites de telle sorte que, même en le voulant, nous, ne puissions les dépasser. Recherchez-vous le plaisir, mon cher auditeur ? Vous le trouverez dans la frugalité. La santé ? C’est encore là qu’il vous faut la chercher. La quiétude ? Vous ne, la rencontrerez que là. La liberté, la vigueur du, corps, sa bonne constitution, la sagesse de l’âme, la vigilance ? Tous les biens naissent de la frugalité. Dans la bonne chère se trouvent les choses contraires : l’aigreur, la langueur, la, maladie, la bassesse et la prodigalité. D’où vient donc, direz-vous, que tous nous courons à la bonne chère ? Cela vient de ce que nous sommes malades. En effet, dites-moi pourquoi la malade recherche-t-il, ce qui est nuisible ? N’est-ce pas là encore un signe de maladie ? Pourquoi, le boiteux ne marche-t-il pas droit ? N’est-ce pas à cause de sa nonchalance, et parce qu’il ne veut pas aller au médecin ? Parmi les choses de ce inonde, les unes procurent une joie passagère, et sont la cause d’un châtiment éternel ; les autres, au contraire, causent des souffrances passagères, et, procurent une joie, sans fin. Celui donc qui est assez lâche et, nonchalant pour ne pas mépriser les joies présentes, afin de gagner les biens futurs, est promptement séduit. Dites-moi, comment fut séduit, Esaü ? D’où vient qu’il préféra une joie passagère à l’honneur à venir ? cela vint de la mollesse et de la faiblesse de son esprit. Mais cela même d’où vient-il ? direz-vous. Cela provient de nous-mêmes, et évidemment de là. Lorsque nous le voulons, nous nous excitons, nous-mêmes, et nous devenons tempérants. Toutes les fois, qu’une nécessité survient, ce n’est, qu’en faisant des efforts que nous parvenons à voir et à embrasser ce qui est bien. Lors donc que vous devrez vous livrer à la bonne chère, songez combien est court le plaisir qu’on y trouve, songez au dommage qui en résulte (car c’est un véritable dommage de dépenser tant de richesses pour son, propre malheur), songez, aux maladies, aux, infirmités, et méprisez la bonne chère. Combien voulez-vous que j’énumère d’hommes devenus victimes de la gourmandise ? Noé s’enivra et resta nu ; et que de maux à cause de cela ! Esaü, par gloutonnerie, livra son droit d’aînesse, et il fut sur le point de commettre un fratricide. « Le peuple d’Israël s’assit pour boire et pour manger, et ils se levèrent pour jouer ». (Ex. 32,6) : C’est pour cela qu’il est dit : « En buvant et en mangeant, souvenez-vous du Seigneur votre Dieu ». (Deut. 6,2) Ceux qui se plongèrent dans la bonne chère, tombèrent dans l’abîme. « La veuve, qui vit dans le luxe », dit l’Écriture, « est morte, quoique vivante » (1Tim. 5,6) et ailleurs : « Le bien-aimé s’engraissa, il s’appesantit, et se révolta ». (Deut. 32,16) Et l’apôtre dit encore : « Ne cherchez pas à contenter les désirs de la chair ». Je ne fais pas une loi du jeûne (personne : ne me comprendrait), mais je repousse les délices ; excessives, je blâme la bonne chère pour, votre utilité. De même qu’un torrent, les délices renversent, tout ; rien ne saurait leur résister : elles renversent les trônes. Que dirai-je de plus ? Voulez-vous faire bonne chère ? Donnez aux pauvres ; appelez le Christ, afin d’être encore dans les délices lorsque la table sera enlevée. Vous n’avez pas maintenant, cet avantage ; je le crois, bien ; les choses d’ici-bas s’ont, si peu stables. Mais plus tard vous l’aurez. Vous voulez faire bonne chère ? Nourrissez votre âme, donnez-lui la nourriture dont elle a besoin. Ne la tuez pas par la faim. C’est le temps de la, guerre, c’est le temps du combat ; et vous vous asseyez pour faire bonne chère ! Ne voyez-vous pas ceux qui tiennent le sceptre, vivre frugalement à l’armée ? « Nous n’avons pas à lutter contre la chair et le sang » (Eph. 6,1), et vous vous engraissez lorsqu’il faut combattre ? L’ennemi, grinçant des dents est là, et vous êtes plongé dans la mollesse et attaché à la table. Je sais que je parle en vain, mais pas pour tous. « Que celui qui a des oreilles pour entendre, entende ». Le Christ est desséché par la faim, et vous, crevez des suites de votre