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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/172

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empereurs qui vivent dans le luxe et les plus grands honneurs, n’ont d’autre occupation, soit à table, soit partout ailleurs, que de chercher à vaincre leurs ennemis, et pour cela ils tiennent conseil chaque jour, rassemblent des officiers et des soldats, lèvent dés tributs, pensant qu’il n’y a que deux nécessités politiques : vaincre leurs ennemis, et maintenir leurs sujets en paix ; nous, au contraire, nous ne songeons pas à tout cela, même en rêve, mais nous pensons à acheter un champ ou des esclaves, à nous enrichir, à nous divertir chaque jour. Quant à ce qui nous touche véritablement nous-mêmes, nous ne voulons, seulement pas en entendre rien dire aux autres. De quoi donc pourra-t-on parler ? Du dîner ? Cela regarde les cuisiniers. De l’argent ? C’est l’affaire des banquiers et des marchands. Des maisons ? Laissons cela aux architectes et aux maçons. De la terre ? C’est l’occupation des laboureurs. Ce qui devrait être notre unique occupation, c’est d’enrichir notre âme. Ne vous rebutez donc pas de nos discours. Personne ne blâme le médecin qui parle toujours de médecine, ni tes autres savants qui nous entretiennent de leurs sciences. Si nos défauts étaient assez bien corrigés pour ne plus réclamer nos observations, on nous accuserait peut-être de nous faire valoir quand nous continuerions à prêcher : on aurait tort. En effet, les, médecins ne s’adressent pas seulement aux malades, mais aussi aux gens bien portants, et leurs livres ont une double intention : guérir la maladie et conserver la santé. Ainsi, quand même nous nous porterions bien, ce ne serait pas une raison de nous négliger, mais de tout faire pour maintenir notre santé.
3. Pour les, maladies de l’âme, nos discours ont donc deux obligations à remplir : d’abord, de guérir la maladie, puis, après la guérison, d’empêcher les rechutes. Actuellement, nous, cherchons une méthode pour une cure difficile ; il n’est pas question de bonne santé ! Comment couper court à ce défaut déplorable ? Comment apaiser cette fièvre cruelle de la colère ? Voyons d’où elle procède et détruisons la cause : D’où vient-elle d’ordinaire ? D’un excès d’arrogance et d’orgueil, Supprimons cette cause et la maladie disparaîtra. Qu’est-ce que l’orgueil ? D’où procède-t-il ? Nous sommes conduits à remonter vers un nouveau principe. Suivons donc la route que cette instruction nous marquera, afin d’arracher le mal jusque dans les profondeurs de ses racines. Qu’est-ce qui fait naître l’orgueil ? C’est que nous ne nous étudions pas, nous-mêmes. Nous examinons avec soin la nature d’un terrain, quoique nous ne soyons pas laboureurs, ainsi que la valeur des plantes, de l’or, des habits, de tout enfin, quoique nous ne soyons pas marchands ; mais quant à nous, quant à notre nature, nous n’y songeons pas le moins du monde. Mais, direz-vous, qui donc ne connaît pas sa propre nature ? Bien des gens, pour ne pas dire tous ; et, si vous le voulez, je vais vous en donner la preuve. Qu’est-ce que l’homme, dites-moi ? Si l’on vous demande : En quoi diffère-t-il des brutes ? Quel lien a-t-il avec les puissances célestes ? Que doit-il devenir ? Pourrez-vous répondre juste à toutes ces questions ? Je ne le crois pis.
Tout être provient d’une substance ; ainsi l’homme est, pour ainsi dire, la substance humaine qui doit devenir un ange ou une brute. Ce discours vous parait-il déplacé ici ? C’est pourtant ce que les Écritures vous répètent souvent. Il y a des hommes dont elle dit : « C’est un ange du Seigneur, et l’on cherchera le jugement sur ses lèvres » (Mal. 2,7) ; et aussi : « J’enverrai mon ange devant ta face ». (Id. 3,1) Il y en a d’autres dont elle dit : « Serpents, race de vipères ». (Mt. 12,34) Du reste, chacun peut se conduire de manière à devenir à la fois un homme et un ange : Que dis-je, un ange ? Même un fils de Dieu ; car il est écrit : « J’ai dit : vous êtes dieux et tous enfants du Très-Haut ». (Ps. 81,6) Ainsi le plus admirable ; c’est qu’il, dépend de lui de devenir Dieu, ange et fils de Dieu.: les hommes peuvent aussi créer des anges. Cela vous étonne peut-être ? Mais écoutez ces mots du Christ : « Dans la résurrection, il n’y a plus de noces ni de mariage ; on est semblable aux anges ». (Lc. 20,35, 36) Et aussi : « Que celui qui peut comprendre, le comprenne ». (Mt. 19,12) En résumé, c’est la vertu qui fait les anges ; or, nous sommes les maîtres d’être vertueux ; donc nous pouvons créer des anges, sinon par nôtre nature, au moins par notre volonté. En effet, sans la vertu il ne sert à rien d’avoir la nature d’un ange ; cela se voit par le diable qui d’abord était un ange ; au contraire, quand la vertu existe, la nature humaine n’empêche rien. C’est ce que l’on voit par Jean qui était un