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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/187

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à qui Dieu ouvrit le cœur pour qu’elle « fût attentive aux paroles de Paul ». Ouvrir le cœur regardait Dieu, l’attention dépendait de cette femme ; ainsi, c’était une œuvre à la fois divine et humaine. « Après avoir été baptisée, elle pria en disant : Si vous m’avez jugée ». Vous le voyez, elle est baptisée et elle reçoit les apôtres en leur faisant cette supplication, plus instante que celle d’Abraham. Elle ne donne pas d’autre gage que celui de son salut. Elle ne dit pas : si vous m’avez jugée une femme d’une condition supérieure et pieuse, mais quoi ? « Fidèle au Seigneur ». Je le serai de même pour vous, si vous n’hésitez pas à me suivre. Elle ne dit point : chez moi ; mais : « Restez dans ma maison », pour montrer qu’elle agissait ainsi de tout son cœur, tant sa foi était grande !
Mais, dites-moi, quel était ce démon ? C’était le dieu Pythien ; on l’appelle ainsi parce qu’on était en Grèce. Vous voyez donc qu’Apollon était un démon ; il cherchait à tenter les apôtres pour les exciter au mal : voilà pourquoi il faisait parler la servante.
2. O monstre de perversité ! puisque tu sais qu’ils annoncent la voie du salut, pourquoi ne sors-tu pas de toi-même ? Ce que voulait Simon, quand il disait : « Accordez-moi que celui à qui j’imposerai les mains reçoive le Saint-Esprit » (Act. 8,19) ; le démon le fait également ici : comme il voyait que l’on accueillait les apôtres, il dissimule, espérant qu’ils le laisseront dans ce corps s’il les célèbre lui-même. Mais si, quand il s’agit d’un homme, « la louange n’est pas agréable dans la bouche d’un pécheur » (Sir. 15,9), elle l’est encore bien moins de la part du démon. Si le Christ n’a pas besoin d’un témoignage humain, pas même de celui de Jean il réclame encore moins celui du démon. La prédication ne vient pas des hommes, mais du Saint-Esprit. Plusieurs habitants poussaient des clameurs insolentes, espérant troubler les apôtres par leurs cris, et disaient : « Ce sont des hommes qui troublent notre ville ». Que dites-vous ? N’êtes-vous pas esclaves du démon ? pourquoi ne l’écoutez-vous plus maintenant ? Il dit lui-même que « ce sont là les serviteurs du Dieu Très-Haut » ; et vous dites : « Ils troublent notre ville ». Le démon dit « Ils annoncent la route du salut », et vous dites : « Ils nous enseignent une manière de vivre que nous ne devons pas suivre ». Vous voyez qu’ils n’écoutent même plus le démon et qu’ils ne songent qu’à une chose : l’amour de l’argent. « Ils les menèrent dans la place, devant ceux qui commandaient la ville, et le « peuple se jeta sur eux ». Observez que les apôtres ne répondent rien et ne se défendent pas : ce qui les rend encore plus admirables. Car il est écrit : « Quand je suis faible, c’est alors que je suis puissant : ma grâce te suffit, car ma force se montre tout entière dans la faiblesse ». (2Cor. 12,10 et 9) Ainsi leur douceur leur méritait une nouvelle admiration. Plus leur prison était étroite, plus le miracle fut éclatant. Sans doute les magistrats voulaient éviter une sédition. Pour contenter là foule furieuse, ils firent immédiatement frapper les apôtres ; s’ils les firent mettre en prison et garder soigneusement, c’était pour les juger ensuite. « On leur serra les pieds « avec des ceps », qui remplaçaient les cordes. Que de larmes ne devons-nous pas verser sur ce qui se passe aujourd’hui ! Voilà ce qu’ils souffraient patiemment, tandis que nous vivons dans le luxe et au milieu des fêtes, et dans les théâtres. Aussi arrivons-nous à notre ruine et à notre perte, tout en cherchant partout le plaisir, lorsque nous craignons d’être insultés pour le Christ ou même de défendre sa cause. Rappelons-nous souvent, je vous en conjure, leurs souffrances et leur constance, leur calme et leur courage. Voilà ce qu’ils supportaient pour accomplir l’œuvre de Dieu. Ils ne disaient pas : Pourquoi Dieu ne nous secourt-il pas quand nous annonçons sa parole ? Mais ces épreuves même leur étaient utiles, et, même quand ils n’étaient pas secourus, ils en sortaient plus fermes, plus forts et plus audacieux. « La tribulation donne la patience ». (Rom. 5,4)
Ne recherchons donc pas une vie molle et, dissolue. Nous venons de voir que les apôtres recueillaient un double avantage, parce qu’ils se fortifiaient et que leur récompense en devenait plus grande ; de même, une manière de vivre opposée a un double inconvénient, parce qu’elle amollit sans cesse et parce qu’elle ne promet aucune récompense, mais plutôt une punition. Rien de plus inutile que l’homme qui passe tout son temps dans le luxe et la dissolution. Celui qui n’a pas été éprouvé est réprouvé, non seulement pour les luttes spirituelles, mais pour toutes les autres. La paresse n’est bonne à rien, et l’amour du plaisir ne réussit