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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/196

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de Thessalonique », c’est-à-dire, ils ne faisaient aucun mal : les uns se convertissent, les autres, au contraire, ne songent qu’à troubler les apôtres. Beaucoup furent convertis parmi les gentils et leurs femmes : voilà encore les progrès de la foi chez les gentils.
Considérez en même temps que si les apôtres ont fui, c’était l’effet de la Providence et non celui de la crainte ; autrement, ils eussent cessé leur prédication, de peur d’irriter encore les esprits. Mais qu’arrivait-il ? la fureur de leurs ennemis s’apaisait, et cependant leur prédication s’étendait. Aussi, dit-on avec raison, à propos de cette émeute, que les Juifs sont venus exciter la foule ; ce qui montre bien l’excès de leur fureur. « Aussitôt, les frères se hâtèrent de faire sortir Paul pour aller vers la mer ». Ils n’emmènent que Paul, craignant qu’il n’arrivât quelque malheur à l’homme qui dirigeait tout. Ainsi, la grâce n’opérait pas seule ; elle laissait aux hommes leur action, les excitait, les réveillait et n’écartait pas d’eux les inquiétudes. Vous voyez qu’elle a protégé les apôtres jusqu’à la ville de Philippes ; ici il n’en est plus de même. « Ils quittèrent Paul après en avoir reçu l’ordre de dire à Silas et à Timothée qu’ils vinssent le rejoindre au plus tôt ». Paul avait raison, car si puissant qu’il fût, il avait besoin d’eux. Ainsi, c’était bien l’ordre de Dieu qui les envoyait en Macédoine, car les lumières de la foi avaient commencé à se répandre dans le reste de la Grèce. Du reste, Paul dépassait quelquefois les préceptes divins. Ainsi, le Christ voulait qu’il vécût de l’Évangile, mais il se privait de le faire (1Cor. 9,14 et 15) ; le Christ ne l’avait pas envoyé pour baptiser (1Cor. 1,17) ; cependant il baptisait. Il s’employait donc à tout, quoique, en général, il fût envoyé près des gentils, de même que Pierre près des circoncis. « Jason et les autres ayant donné caution, les magistrats les laissèrent aller ». Vous voyez que Jason donne caution pour Paul et risque ainsi sa vie pour lui. « Ils étaient plus nobles que les gens de Thessalonique », c’est-à-dire, plus avancés en vertu et en foi divine. « Ils reçurent la parole avec beaucoup d’affection et d’ardeur, examinant tous les jours les Écritures, pour voir si ce qu’on leur disait était véritable ». Ainsi, ils n’y mettaient point d’entraînement ni d’irréflexion.
La plus grande de ces villes était Thessalonique où il y avait beaucoup de populace, et il n’est pas étonnant que les hommes soient plus méchants dans une grande ville : en effet, plus elle est grande, plus nombreuses sont les occasions de désordres. De même que le mal sévit plus grièvement dans un corps qui lui fournit plus d’aliments, ainsi se renouvelèrent à Thessalonique, dans de plus vastes proportions, les scènes déplorables d’Irone. Aussi Paul les quitte pour les punir d’avoir cherché le malheur des autres ; c’est ce qu’il entend par ces paroles : « Les Juifs nous empêchaient de parler aux gentils. » (1Thes. 2,16) Pourquoi, dira-t-on, les apôtres ne restèrent-ils pas ? Pourquoi ne firent-ils pas de miracles ? Si Paul était resté longtemps dans la ville où on l’avait lapidé, n’aurait-il pas dû encore bien mieux rester ici ? C’est que Dieu ne leur permettait pas de prodiguer les miracles ; car vaincre sans miracles est plus merveilleux que tous les miracles possibles. Maintenant Dieu gouverne sans faire de miracles ; c’était déjà ainsi qu’il voulait gouverner d’ordinaire. Aussi les apôtres ne s’empressaient point d’en faire, et Paul lui-même dit : « Nous prêchons le Christ crucifié ». (1Cor. 1,23) A ceux qui cherchent en nous des artisans de miracles, nous leur expliquons ce que les miracles même ne sauraient expliquer, et nous les convertissons. Voilà ce qu’il y avait de plus merveilleux. Aussi, quand la prédication s’étend, voyez comme se multiplient les miracles de cette nature. Il en fallait faire plus pour les fidèles que pour les autres, mais comment les apôtres font-ils ces miracles ? En s’éloignant et en cédant. « Ils le firent sortir pour aller vers la mer ». Pourquoi cela ? Pour qu’il fût moins facile de le saisir. Ainsi ils avaient agi d’une manière bien méritoire pour eux-mêmes, et accompli, à l’égard de Paul, une grande œuvre et une belle action : ils ne songeaient qu’à l’arracher au danger.
3. Remarquez tout l’intérêt que les disciples portaient à ces illustres apôtres. Maintenant, grands et petits, nous sommes divisés : parmi nous les uns s’élèvent et les autres en sont jaloux. Pourquoi sont-ils jaloux ? Parce que nous sommes gonflés d’orgueil et que nous ne voulons point les traiter sur le pied d’égalité. La bonne harmonie d’un corps n’admet point de gonflement : il n’y en a pas parce que les membres sont tellement disposés que chacun a sa fonction particulière : la