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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/20

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HOMÉLIE VII.


A CES PAROLES ILS FURENT TOUCHÉS AU FOND DE LEUR CŒUR, ET ILS DIRENT A PIERRE ET AUX AUTRES APÔTRES : FRÈRES, QUE FERONS-NOUS ? (CHAP. 2,37, JUSQU’A LA FIN)

ANALYSE.

  • 1. L’Orateur montre, par les sentiments de componction que font paraître les Juifs, le succès de la méthode que saint Pierre a suivie, et développe la réponse de cet apôtre : Faites pénitence, et que chacun de vous soit baptisé. – Ici saint Chrysostome trace le tableau de cette vie si admirable des premiers fidèles, et nous les représente persévérant dans la prière, la fraction du pain et la communauté des biens.
  • 2. A l’égard de ce merveilleux désintéressement, il observe qu’ils faisaient de leurs biens un sage et utile usage, et ne les dédaignaient point, comme quelques philosophes, par vanité et arrogance. – Il appuie également sur le tact avec lequel saint Pierre leur propose le baptême sans s’étendre sur la passion et la mort de Jésus-Christ, parce qu’il voulait ménager ici, comme précédemment, leur trop grande susceptibilité.
  • 3. L’Orateur revient ensuite sur le spectacle qu’offraient les premiers fidèles, et exalte leur charité qui – enfantait pour tous la joie pure de l’âme, et l’abondance des biens célestes. – Il rehausse ensuite magnifiquement leur simplicité, et prouve que la prudence qui accompagne toujours cette vertu, ainsi que la confiance en Dieu, finissent par réussir.
  • 4. Ces premiers fidèles étaient ardents à se mortifier, et les chrétiens de nos jours ne recherchent que les délices ; ils se dépouillaient de leurs biens, et nous prétendons conserver les nôtres avec affection ; ils descendaient nus dans l’arène, et nous nous présentons au combat pompeusement parés : la lutte ne peut donc être égale. – C’est pourquoi nous devons, à leur exemple, retrancher toute cupidité, et, par un désintéressement vrai et sincère, nous assurer la victoire sur le démon, et la possession des biens éternels.


1. Considérez ici les avantages inestimables de la douceur. Elle pénètre dans les cœurs plus avant que la violence, et les perce plus profondément. Le fer qui ouvre un abcès dur et compact ne produit qu’une légère douleur ; mais si des émollients ont rendu cet abcès tendre et impressionnable, la douleur devient vive et forte. C’est ainsi que l’apôtre devait amollir d’abord les esprits, et puis les piquer. Or ce résultat s’obtient par la douceur, et non par la colère, les reproches violents et les injures. Car l’emportement augmente le mal, et la douceur le diminue. Aussi voulez – vous amener celui qui vous a insulté à reconnaître sa faute, reprenez-le avec une extrême douceur. Telle est la conduite de l’apôtre. Il rappelle à ses auditeurs le souvenir de leur crime ; et sans y ajouter aucun reproche, il s’étend sur les dons de Dieu à l’égard des Juifs, et sur les preuves des faits qui se sont accomplis parmi eux.
C’est pourquoi ils surent gré à l’apôtre de sa douceur, parce qu’il ne faisait entendre à ceux qui avaient crucifié son Dieu, et qui voulaient la mort de ses disciples, que le langage d’un père et d’un maître affectionné. Mais bientôt ils joignirent à ces sentiments de reconnaissance les remords d’une conscience coupable, et ils comprirent toute l’énormité de leur crime. Car Pierre ne permit point qu’ils s’abandonnassent aux fureurs du désespoir, ni que leurs âmes fussent enveloppées de ténèbres. Il se hâta donc de dissiper, par l’humilité de sa parole, les nuages de l’indignation, et puis il leur représenta la grièveté de leur faute. Chaque jour l’expérience justifie une semblable conduite. Quand nous disons à un injuste agresseur qu’il nous a blessé, il s’efforce de nous prouver le contraire. Mais si nous lui soutenons que, loin d’avoir été atteint par ses traits, c’est nous qui l’avons percé, il se récrie et se déclare invulnérable. Aussi, voulez-vous fortement embarrasser votre ennemi, ne l’accusez pas, mais prenez sa défense, et il s’accusera lui-même. Car l’homme aime naturellement la contradiction. Pierre ne l’ignorait pas ;