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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/202

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le trouver et le posséder. Mais nous n’avons pas voulu le chercher, quoiqu’il fût à notre portée : « Il n’est pas loin de chacun de nous ». O ciel ! l’apôtre dit que Dieu est à côté de chacun des habitants de la terre. Est-il rien de plus grand que cette parole ? Voyez comme elle confond la pluralité des dieux. Pourquoi dire seulement qu’il n’est pas loin ? » Il est si près qu’on ne peut vivre sans lui, car c’est en lui que nous avons la vie, le mouvement et l’être ». Paul semble dire, comme en prenant une comparaison matérielle : on ne peut ignorer que l’air est répandu partout, qu’il est près de nous et même en nous ; il en est de même pour le créateur de toutes choses. Ainsi tout, dit-il, vient de lui ; c’est de la Providence qu’il veut parler, et de la conservation du monde, lorsqu’il dit que nous avons en lui l’être, le mouvement, la vie. Il ne dit pas Par lui, mais : « En lui », ce qui annonce une union plus intime. Le poète qu’il cite n’avait pas la même idée quand il disait : « Nous sommes sa race ». Ces mots que le poète applique à Jupiter, Paul les applique à Dieu ; non pas qu’il confonde l’un et l’autre, loin de là ! Mais il les adresse à qui de droit. Il rend aussi au vrai Dieu l’autel qu’on n’avait pas dressé pour lui. En effet, chez les gentils, beaucoup de paroles et d’actions religieuses s’adressaient, à leur insu, au Dieu véritable, mais ils croyaient qu’elles s’appliquaient à un autre.
Dites-moi, en effet, à qui cette inscription « Au Dieu inconnu », pouvait-elle convenir le mieux, au Créateur, ou au démon ? Assurément c’était au Créateur, que l’on savait exister ; sans le connaître. De même cette faculté de tout produire ne s’applique véritablement qu’à Dieu et non à Jupiter qui n’était qu’un homme et un détestable imposteur. Ce n’est pas à propos d’un être pareil que Paul a pu dire : « Nous sommes sa race » ; loin de là ! Son idée est toute différente. Il dit que nous sommes fils de Dieu, c’est-à-dire sa famille, ses proches, ou bien encore ses alliés et ses voisins. Pour qu’on ne lui fasse plus ce reproche : « Vous nous dites des choses étrangères à nos oreilles », (en effet rien n’est plus désagréable aux hommes en général), il cite un de leurs poètes. Il ne leur dit point : Vous ne devez pas croire que Dieu ressemble à un objet d’or ou d’argent, c’est là une pensée perverse et détestable ; il leur parle plus doucement : « Nous ne devons pas croire » à cette ressemblance, mais nous devons voir plus haut. Qu’est-ce qui est plus haut ? Dieu, mais nous n’en parlons pas encore, car c’est le nom de la toute-puissance ; jusqu’ici nous ne disons que ceci : Le divin ne ressemble pas à ces objets ; en effet, qui pourrait le soutenir ? Voyez comme il arrive peu à peu à l’idée de l’immatériel : car une divinité, quand même on la concevrait matérielle, différerait encore de ces représentations : « Puisque nous sommes la race de Dieu, nous ne devons pas croire que le divin soit semblable à de l’or, à de l’argent ou à de la pierre dont l’art et l’industrie des hommes ont fait des figures ». Mais, dira-t-on : Puisque nous ne le pensons pas, à quoi bon ce langage ? C’est que le discours de Paul s’adressait à la multitude, aussi avait-il raison de parler ainsi ; car si nous-mêmes, au point de vue de notre âme, nous ne ressemblons pas à ces objets, Dieu y ressemble encore bien moins : il commence donc par les détourner de cette idée, non seulement Dieu ne ressemble point à un produit de l’art du sculpteur, mais aucune conception humaine ne peut le représenter, ni l’art ni la pensée ne peuvent se le figurer. Aussi dit-il : Si Dieu peut être le produit de l’art et de la pensée humaine, si la substance de Dieu est donc aussi dans une pierre, comment, nous qui vivons en lui, ne le trouvons-nous pas ? Il reproche ainsi deux choses à ses auditeurs : D’abord de ne pas trouver Dieu, ensuite de se le figurer comme ils le font. Par elle-même, la pensée humaine n’est pas digne de foi. Mais après avoir ainsi ému leurs esprits et leur avoir montré qu’ils étaient inexcusables, voyez ce qu’il ajoute : « Dieu ; méprisant ces temps d’ignorance, fait maintenant annoncer à tous les hommes et en tous lieux qu’ils se convertissent ». Quoi ! personne ne sera puni ? Personne de ceux qui voudront se repentir. Il ne parle pas de ceux qui sont morts, mais de ceux auxquels s’adresse sa parole. Dieu, dit-il, ne vous demande pas de comptes. Il ne dit pas : Dieu vous a dédaignés, vous a pardonnés ; il dit : vous ignoriez. Le dédain supposerait qu’il n’inflige pas de punition à ceux qui en méritent, mais ce n’était qu’une erreur. Il ne dit point : Vous vous êtes égarés volontairement, mais il l’a fait comprendre plus haut, en disant : « Il faut se repentir en tous lieux ». Par, là, il faut comprendre toute la terre.