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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/219

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nul n’y a fait attention, on eut bientôt repris la pente du passé, et l’on est retombé aussi bas qu’auparavant. Toujours debout, le ciel crie, pour ainsi dire, sans cesse qu’il a un maître, que cet univers est l’œuvre d’un ouvrier, et quelques-uns persistent à dire le contraire. Ce qui est arrivé à Théodore l’année dernière, qui n’en a pas été frappé d’étonnement ? Et cependant la religion n’y a rien gagné ; mais ceux qui étaient devenus pieux pour un instant, sont retournés à ce qu’ils étaient auparavant. La même chose arriva aussi aux Hébreux : c’est pour cela que le prophète a dit : « Lorsqu’il les mettait à mort, ils le recherchaient, se convertissaient, et venaient au matin près du Seigneur ». (Ps. 77,34) Qu’est-il besoin de rapporter tout ce qui leur est arrivé en général ? Combien de maladies n’éprouvèrent-ils pas ? Combien de fois s’étant relevés ont-ils promis de changer de vie, et sont-ils cependant restés les mêmes ? Le changement subit nous démontre notre volonté et la liberté de notre nature. En effet, si le mal était naturel, nous ne pourrions changer ; car nous ne pouvons changer ce qui se fait par nature et par nécessité. Cependant nous changeons, direz-vous. Ne voyons-nous pas parfois des gens qui voient naturellement, devenir aveugles par frayeur ? parce que la nature cède lorsqu’une autre nature vient à l’encontre. Ainsi, c’est suivant l’ordre de nature que l’effroi nous cause l’aveuglement ; et c’est aussi naturellement que, s’il survient un sujet de frayeur plus terrible que le premier, la première crainte disparaît. Mais quoi donc, direz-vous, si la tempérance est dans la nature, et que la crainte la chasse lorsqu’elle l’a dominée ? Que direz-vous si je vous démontre que, même sous l’empire de la crainte, certaines personnes ne sont pas tempérantes, mais conservent jusque-là leur impudence, ne serez-vous pas obligés d’avouer que la nature n’y est pour rien ? Citerai-je des faits d’autrefois ou des faits d’aujourd’hui ? Pharaon, dites-moi, ne fut-il pas changé tout d’un coup, et n’en revint-il pas à sa première malice ? Dans le cas qui nous occupe, les exorcistes prononcèrent purement et simplement le nom de Jésus ; et ils dirent aux démoniaques, qui n’ignoraient pas ce qu’était Jésus : « Nous vous adjurons par le Jésus que prêche Paul ». La réponse que font les démoniaques prouve leur connaissance. Ces Juifs se bornent à dire Jésus, sans ajouter, comme ils devaient Le Sauveur du monde ##Rem, celui qui est ressuscité. Mais ils ne voulaient pas confesser sa gloire. C’est pour cela que le démon, sautant sur eux, leur dit : « Je connais Jésus, et je sais qui est Paul » ; comme s’il leur disait Vous ne croyez pas et vous abusez de ce nom en parlant comme vous faites. Le temple est désert, sa défense est facile à emporter ; vous n’êtes pas des prédicateurs, vous êtes à moi, dit-il. La fureur du démon est grande. Les apôtres auraient pu aussi maltraiter les Juifs comme faisait le démon ; étant plus forts que les démons, comment n’auraient-ils pu faire ce que faisaient ceux-ci ? ils n’usaient pas néanmoins de ce pouvoir. Cela montre bien leur douceur : on les chasse, et ils font le bien ; les démons que l’on sert font tout le contraire. « Je connais Jésus », dit-il, rougissez de honte, vous qui ne le connaissez pas. « Et je connais aussi Paul » : Et, en effet, il savait qu’il était le prédicateur de Dieu. Ensuite il saute sur eux, déchire leurs vêtements, et par là il semble leur dire : Ne croyez pas que j’agisse ainsi par mépris pour Jésus et pour Paul. La crainte du démon était grande aussi. Pourquoi ne déchira-t-il pas leurs vêtements sans ajouter ces paroles ? il eût ainsi assouvi sa colère et établi l’erreur. Il redoutait, comme je l’ai dit, la puissance inabordable ; et il n’eût pas eu tant de force s’il n’eût prononcé ces paroles. Voyez, partout les démons sont plus sages que les Juifs ; ils n’osent pas contredire la parole ni accuser les apôtres ni le Christ. Une fois ils disent : « Nous savons qui tu es » ; et Pourquoi es-tu venu nous tourmenter avant le temps ? » (Mt. 8,29) Une autre fois : « Ces hommes sont les serviteurs du Dieu Très-Haut » (Act. 16,17) ; ici ils disent : « Je connais Jésus et je connais aussi Paul » ; car ils craignaient ces saints et tremblaient devant eux. Peut-être y a-t-il parmi vous quelqu’un qui, en entendant ces paroles, désire posséder une telle puissance de manière à empêcher les démons de le regarder en face, et qui envie l’avantage qu’ont eu ces saints de posséder aine telle force ? qu’il écoute le Christ : « Ne vous réjouissez pas de ce que les démons vous sont soumis », (Lc. 10,20), dit-il, parce qu’il savait que les hommes seraient fiers de ce privilège par vaine gloire. Si vous ambitionnez ce qui plaît à Dieu, et ce qui est d’utilité commune, vous suivrez une voie plus