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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/260

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que l’apôtre ne soit mis en pièces par la foule ; la situation n’était donc pas sans péril. Voyez-vous qu’il a eu raison de faire connaître sa qualité de citoyen romain ; sans cette révélation, le tribun n’eût pas conçu cette crainte. L’armée enlève donc l’apôtre. Les scélérats virent par là tous leurs efforts déjoués ; néanmoins, ils redoublèrent d’ardeur sans se laisser arrêter par l’échec qu’ils avaient subi. C’est ainsi que la méchanceté persiste toujours dans sa voie en dépit des obstacles. Combien cependant la Providence leur avait ménagé de motifs propres à faire tomber leur colère et à les faire venir à résipiscence. Ils n’en persistent pas moins dans leur voie. Paul avait donc usé pour sa défense d’un moyen efficace, puisque par là il a échappé au péril imminent d’être mis en pièces par ces furieux.
« La nuit suivante, le Seigneur se présenta à lui, et lui dit : Paul, ayez bon courage ; car comme vous avez rendu témoignage de moi dans Jérusalem, il faut aussi que vous me rendiez témoignage dans Rome. Le jour étant venu, les Juifs firent une ligue, et jurèrent, en appelant l’anathème sur eux-mêmes, de ne manger ni boire qu’ils n’eussent tué Paul. Ils étaient plus de quarante qui avaient fait cette conjuration (11-13). Ils jurèrent en appelant l’anathème sur eux-mêmes », dit le texte ; voyez quelle violence et quelle ardeur pour la vengeance et pour le mal. Que veut dire « appeler sur, soi l’anathème » ? Cela veut dire que ces Juifs jurèrent de renoncer à la foi en Dieu s’ils n’accomplissaient leur complot contre la vie de Paul. Ils ont donc été anathématisés à jamais, puisqu’ils ne tuèrent point Paul. Il y en eut quarante qui entrèrent dans cette conspiration. Voilà bien cette nation, s’il s’agit de s’entendre pour faire le bien, on ne trouvera pas deux hommes pour agir de concert ; s’il s’agit d’un crime à commettre, vous voyez aussitôt accourir un peuple entier. Et ils prennent pour complices même les chefs du peuple, comme l’affirme le texte en ajoutant : « Et ils vinrent se présenter aux princes : des prêtres et aux sénateurs, et ils leur dirent : Nous avons fait vœu, en appelant sur nous l’anathème, de ne point manger que nous n’ayons tué Paul. Vous n’avez donc qua faire savoir de la part du conseil au tribun, que vous le priez de faire amener demain Paul devant vous, comme pour connaître plus particulièrement de son affaire : et nous serons prêts pour le tuer avant qu’il arrive. « Mais le fils de la sœur de Paul ayant appris cette conspiration, vint et entra dans la forteresse, et en avertit Paul. Paul ayant appelé un des centeniers, lui dit : Je vous prie de mener ce jeune homme au tribun, car il a quelque chose à lui dire. Le centenier prit le jeune homme avec lui, et le mena au tribun ». Voici encore une fois Paul sauvé par une mesure de prudence humaine. Et voyez Paul ne dit ce secret à personne, pas même au centenier, il ne veut pas que le complot formé contre lui se divulgue. « Et le centenier vint trouver le tribun et lui dit : Paul le prisonnier m’a prié de vous amener ce jeune homme, qui a quelque chose à vous dire. « Le tribun le prenant par la main, et l’ayant tiré à part, lui demanda : Qu’avez-vous à me dire ? Ce jeune homme lui dit : Les Juifs ont résolu ensemble de vous prier que demain vous envoyiez Paul dans leur assemblée, comme s’ils„ voulaient connaître plus exactement de son affaire ; mais ne consentez pas à leur demande, car plus de quarante hommes d’entre eux doivent lui dresser des embûches, ayant fait vœu, avec de grands serments, de ne manger ni boire qu’ils n’aient tué Paul ; et ils sont déjà tout préparés, attendant seulement que vous leur ayez accordé ce qu’ils désirent. Le tribun ayant appris cela, renvoya le jeune homme, et lui défendit de découvrir à personne qu’il lui eût donné cet avis (14-22) ».
2. Le tribun fait sagement de lui recommander de ne rien dire à personne. Il donne ensuite ses ordres aux centurions. Paul est envoyé à Césarée pour s’y faire entendre sur un plus grand théâtre et devant un plus illustre auditoire. Les Juifs ne pourront pas dire qu’ils – auraient embrassé la foi s’ils avaient vu Paul, s’ils avaient entendu enseigner. Cette excuse leur est ainsi enlevée. La nuit suivante, le Seigneur se présenta à lui, et lui dit : « Paul, ayez bon courage ; car comme vous avez rendu témoignage de moi dans Jérusalem, il faut aussi que vous me rendiez témoignage dans Rome ». Remarquez : le Seigneur lui apparaît, puis il le laisse se sauver par des voies humaines. Admirez l’apôtre, il ne se trouble pas, il ne dit pas : Qu’est-ce que ceci veut dire ? Suis-je trompé par le Seigneur ?