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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/27

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celui-ci, que deviendra-t-il ? » (Jn. 21,21) Saint Luc, qui a omis le récit de plusieurs autres miracles, y rapporte là guérison du boiteux, parce qu’elle frappa plus fortement tous ceux qui en furent témoins. Mais observons tout d’abord que les deux apôtres ne montèrent point au temple dans le dessein d’opérer un miracle, car, à l’imitation de leur divin Maître, ils évitaient tout ce qui pouvait tourner à leur avantage. Pourquoi donc vinrent-ils au temple ? Est-ce qu’ils observaient encore le culte mosaïque ? Nullement : trais c’était pour l’édification générale. Nous les voyons en effet opérer un prodige nouveau qui les affermit eux-mêmes dans leur vocation, et qui détermine la conversion d’un grand nombre de disciples. Ce boiteux l’était de naissance, et par conséquent incurable par les moyens ordinaires. Il était âgé de quarante ans, comme on va nous le dire, et depuis quarante ans on n’avait pu le guérir. Au reste vous savez assez combien toute infirmité de ce genre est rebelle aux traitements de la médecine, et la sienne était si grande qu’il ne pouvait même pourvoir aux besoins de son existence. Du reste tout contribuait à le faire connaître, le lieu où il se tenait, et le genre même de son infirmité. « Or, il y avait », dit saint Luc, un homme boiteux dès le sein de sa mère, qui était porté, et qu’on plaçait chaque jour à la porte du temple, appelée la Belle-Porte, pour demander l’aumône à ceux qui y entraient ». Il demandait donc l’aumône, et ne connaissait pas les apôtres auxquels il s’adressait. « Voyant Pierre et Jean entrer au temple, il les pria de lui « donner l’aumône. Mais Pierre et Jean le fixèrent, et Pierre lui dit : Regardez-nous ». A ces mots, il ne se lève point, et persiste à leur demander l’aumône. Car telle est la coutume du pauvre, il ne se rebute point d’un premier refus, et renouvelle ses instances. Rougissons donc, nous qui cessons de prier, si le Seigneur ne nous exauce sur-le-champ. Au reste voyez comme Pierre se hâte de lui adresser une parole de bienveillance : « Regardez-nous », lui dit-il. Ainsi s’épanchaient au dehors les dispositions de son âme. « Mais celui-ci les regarda attentivement, « espérant en recevoir quelque aumône. Or, « Pierre dit : Je n’ai ni or, ni argent ; mais ce que j’ai, je te le donne ». Il ne dit point : Je te donne une chose bien plus précieuse que l’argent ; que dit-il donc ? « Au nom de Jésus-Christ de Nazareth, lève-toi et marche, et l’ayant pris par la main droite, il le souleva ». L’apôtre imita dans cette circonstance le Sauveur Jésus, qui, lui aussi, tendait la main à tous ceux dont la foi était faible et chancelante, pour prouver que ce n’était pas en eux un mouvement spontané.
« Et l’ayant pris par la main droite, il le souleva. ». Cette guérison attestait la résurrection de Jésus-Christ, car elle en était une image. « Et aussitôt ses jambes et ses pieds s’affermirent ; et, s’élançant, il se leva et marcha ». Il s’essayait, pour ainsi dire, à marcher, et il expérimentait si ses jambes pourraient le soutenir ; il avait des pieds, mais ils étaient perclus. Quelques-uns même disent que dans le premier moment il ne savait pas marcher. « Et marchant, il entra avec eux dans le temple ». En vérité, voilà un étonnant prodige. Ce boiteux n’est point conduit par les deux apôtres, mais il les suit, et fait ainsi connaître ses bienfaiteurs. Bien plus, sautant de joie, il louait le Seigneur, et non les hommes, car il ne les regardait que comme tes instruments de la bonté divine. C’est ainsi qu’il se montrait reconnaissant.
Mais revenons sur l’explication des versets précédents. « Pierre et Jean montaient au temple à la neuvième heure de la prière ». Peut-être était-ce l’heure où l’on y portait le boiteux, parce que, à ce moment, le temple était plus fréquenté. Au reste saint Luc réfute tout autre motif que celui de recevoir l’aumône, car il dit expressément : « On le plaçait à la porte du temple pour demander l’aumône à ceux qui y entraient ». Ce détail si précis est une preuve de la sincérité du récit. Mais pourquoi, direz-vous, ses parents ne l’avaient-ils pas conduit à Jésus-Christ ? Peut-être étaient-ils eux-mêmes incrédules ; et, en effet, quoiqu’ils se trouvassent en ce moment dans le temple, ils ne le présentèrent point aux deux apôtres. Cependant ils les virent entrer, et ils ne pouvaient ignorer les grands prodiges qu’ils avaient déjà opérés. « Il les priait de lui faire l’aumône ». Il les reconnut sans doute à leur extérieur pour des hommes charitables, aussi s’empressa-t-il de les arrêter.
Il n’est pas inutile d’observer qu’ici saint Jean garde le silence, et que saint Pierre parle en son nom. « Je n’