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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/274

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était vif le désir qu’ils en avaient ! Car, à défaut, il n’eût pas cherché à l’entendre, et s’il n’eût pas eu de Paul une haute idée, il n’eût pas admis sa femme à l’entendre avec lui. Et il me semble que, de son côté, celle-ci ne le désirait pas moins vivement. Remarquez aussi de quelle manière Paul s’empresse d’exposer sa doctrine, non seulement touchant, la foi en la rémission des péchés, mais encore sur les règles de la conduite humaine.
Mais reprenons ce qui a été dit plus haut : « C’est assez maintenant, allez ; je vous appellerai, quand il en sera temps ». Quel aveuglement ! Pendant que Paul lui faisait entendre sa parole, il s’attendait à recevoir de lui de l’argent ! Et, chose plus étrange encore ; après s’être entretenu avec lui, il, ne le mit pas en liberté ; mais comme il était arrivé au terme de son administration, voulant plaire aux Juifs, il laissa Paul en prison, prouvant par là qu’il n’était pas seulement l’esclave de l’argent, mais encore de l’opinion. – Misérable, comment peux-tu chercher à obtenir de l’argent d’un homme qui prêche le mépris de l’argent ? Et ce qui montre qu’il n’en reçut pas, c’est qu’il laissa Paul en prison ; il l’eût mis en liberté, s’il en eût reçu. Ainsi, Paul prêchait sur la tempérance, pendant que le gouverneur s’abandonnait à ces vaines espérances de profit, sans toutefois oser lui rien demander ; car c’est le propre de la méchanceté d’être lâche et de se métrer de tout. Il se contentait donc d’espérer ; et il était tout naturel qu’il cherchât à plaire aux Juifs, ayant été si longtemps gouverneur de leur pays. « Festus », dit notre texte, « étant donc arrivé dans sa province, les princes des prêtres et les premiers d’entre les Juifs vinrent, vers lui pour accuser Paul ». Ce fut donc sans retard, et dès – son arrivée, que les prêtres vinrent ; et ils n’eussent fait aucune difficulté de se rendre à Césarée, s’il ne les avait prévenus, puisqu’ils se présentent aussitôt qu’il est arrivé. « Et étant descendu à Césarée, il y passe dix jours ». Probablement, à ce que je vois, pour être à la disposition de ceux qui veulent le corrompre. Or Paul était en prison. « Et ils lui demandaient qu’il le fît amener à Jérusalem. ». Et pourquoi le lui demandaient-ils comme une faveur, s’il était juste qu’il fût puni de mort ? Mais Festus lui-même découvrit si nettement les menées des Juifs, qu’il s’écria dans l’assemblée : « Vous tous qui êtes ici présents, vous voyez cet homme contre qui toute la nation juive m’a sollicité ». En effet, par ce mot : « M’a sollicité », il fait clairement allusion à cette faveur qu’ils lui ont demandée. Et on voit que, dès ce moment, ils voulaient le pousser à rendre sa sentence, redoutant l’effet des paroles de Paul. Que craignez-vous ? Pourquoi vous hâter ainsi ? En effet, c’est une chose notoire « que Paul est gardé à vue ». Est-ce qu’il pourrait fuir ? « Que les principaux d’ente vous », dit-il, « l’accusent ». Voilà de nouveau ses accusateurs présents à Césarée, voilà de nouveau Paul tiré de sa prison. « Et le lendemain s’étant assis sur son tribunal ».
3. Voyez comme, aussitôt arrivé, il s’est assis sur son tribunal, tant ils ont mis d’ardeur à le pousser, à le presser. Et n’ayant pas encore été en rapport avec les Juifs, n’ayant pas encore reçu des preuves de leur déférence, il ne pouvait pas répondre autrement qu’il l’a fait : mais lorsqu’il fut venu à Jérusalem ; lui aussi cherche à leur plaire ; seulement, il y met de la ruse, et écoutez comment ; car le texte sacré ajoute : « Voulez-vous aller à Jérusalem, et y être jugé devant moi touchant ces choses ? » Comme s’il disait : « Je ne vous livre pas à eux, mais je serai moi-même votre juge ». Il dit cela, et le laisse ainsi maître du parti à prendre, afin de le séduire, pour ainsi dire, par ces ménagements et par ces égards. Car, s’il eût parlé sur le ton du commandement ; il eût paru tout à fait inconvenant de vouloir, mander à Jérusalem celui qui avait été trouvé innocent à Césarée.
Et Paul se garde bien de dire : « Je ne veux pas », de peur d’irriter le juge encore davantage ; mais il s’exprime de nouveau, comme il l’a fait, en toute liberté, et dit : « Je suis devant le tribunal de César ; c’est là qu’il faut que je sois jugé ». Admirable fierté ! Voyez le raisonnement qu’il leur oppose ; c’est comme s’il disait pour sa justification : Ces hommes m’ont déjà fait sortir une fois de leur ville, et ils croient me condamner en montrant que j’ai manqué à César. Eh bien ! C’est par celui même à qui j’ai manqué ; que je : veux être jugé. Et il ajoute : « Je n’ai nui en rien aux Juifs, comme vous le savez vous-même mieux que personne ». Il touche légèrement par ces mots au désir que ressentait le juge de plaire aux Juifs ; puis, arrivant finalement à sa conclusion : « Si j’ai fait quelque chose qui mérite