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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/289

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Et parce qu’il y avait longtemps que personne n’avait mangé, Paul se levant au milieu d’eux, leur dit : Sans doute, mes amis, a vous eussiez mieux fait de me croire, et de ne point partir de Crète, pour nous épargner a tant de peine et une si grande perte. Je vous exhorte néanmoins à avoir bon courage, a parce que personne ne périra, et il n’y aura que le vaisseau de perdu. Car cette nuit même un ange de Dieu à qui je suis, et que je sers, m’a apparu et m’a dit : Paul, ne craignez point, il faut que vous comparaissiez devant César, et je vous annonce que Dieu vous a donné tous ceux qui naviguent avec vous. C’est pourquoi, mes amis, ayez bon courage : car j’ai cette confiance en Dieu que ce qui m’a été dit arrivera. Mais nous devons être jetés contre une certaine île. La quatorzième nuit, comme : les vents nous poussaient de tous côtés sur la mer Adriatique, les matelots crurent vers minuit qu’ils approchaient de quelque terre ; et ayant jeté la sonde, ils trouvèrent vingt brasses, et un peu plus loin ils en trouvèrent quinze. « Mais craignant que nous n’allassions donner a contre quelque écueil, ils jetèrent quatre ancres du côté de la poupe, et ils attendaient avec impatience que le jour parût. Or, comme les matelots cherchaient à s’enfuir du vaisseau, et qu’ils descendaient l’esquif en mer, a sous prétexte d’aller jeter les ancres du côté de la proue, Paul dit au centenier et aux soldats : Si ces gens-ci ne demeurent pas dans le vaisseau, vous ne pouvez vous sauver. Alors les soldats coupèrent les câbles de l’esquif et le laissèrent tomber (12-32) ».
Il nous a montré par là que les matelots, ne croyant pas à la vérité de ses paroles, étaient sur le point de s’éloigner du navire : mais le centenier et tous les soldats qui étaient avec lui, ne partageaient pas leur incrédulité. Voilà pourquoi il dit : « Si ces gens-ci prennent la fuite, vous ne pouvez vous sauver ». Au fond, il ne parle pas ainsi pour épargner ce malheur à ceux auxquels il s’adresse, mais pour retenir les matelots, et pour que la prophétie tout entière s’accomplisse.
Paul leur enseigne à tous sa sublime philosophie comme s’ils étaient réunis dans une église, et il les retire du milieu des dangers. Et la Providence permet que d’abord l’on n’ajoute pas foi aux discours de Paul, afin que l’expérience même des événements ramène la confiance en ses paroles. Et c’est ce qui arriva. Puis, il les exhorte à prendre de la nourriture, et c’est ce qu’ils font ; et lui-même en prend le premier, pour leur persuader, non par des paroles, mais par des actes, que la tempête ne doit faire aucun mal à leurs corps ; bien plus, qu’elle doit profiter à leurs âmes. « Au point du jour, Paul les exhorta tous à prendre de la nourriture, disant : Il y a aujourd’hui quatorze jours que vous êtes à jeun, et que vous n’avez rien pris en attendant la fin de la tempête. C’est pourquoi je vous exhorte à prendre de la nourriture, pour vous pouvoir sauver ; car il ne tombera pas un seul cheveu de la tête d’aucun de vous. Après avoir dit cela, il prit du pain, et ayant rendu grâces à Dieu devant tous, il le rompit, et commença à manger. Tous les autres prirent courage à son exemple, et se mirent aussi à manger. Or, nous étions dans le vaisseau deux cent soixante-seize personnes en tout. Quand ils furent rassasiés, ils soulagèrent le vaisseau en jetant le blé dans la mer. Le jour étant venu ; ils ne reconnurent point quelle terre c’était ; mais ils aperçurent un golfe ayant un rivage, et ils résolurent d’y faire échouer le vaisseau, s’ils pouvaient. Ils retirèrent les ancres, et lâchèrent en même temps les attaches des gouvernails, et s’abandonnant à la mer, après avoir déployé la voile de l’artimon, ils tiraient vers le rivage à la faveur du vent. Mais ayant rencontré une langue de terre qui avait la mer des deux côtés, ils y firent échouer le vaisseau, et la proue s’y étant enfoncée demeurait immobile, mais la poupe se rompit par la violence des vagues (33-41) ».
3. Le démon tente de nouveau d’empêcher l’accomplissement de la prophétie ; déjà ils avaient décidé qu’un certain nombre de passagers seraient mis, à mort : mais le centenier, voulant sauver Paul, ne le permit pas, tant il avait déjà d’attachement pour lui. « Les soldats étaient d’avis de tuer les prisonniers, de peur que quelqu’un d’eux, s’étant sauvé à la nage, ne s’enfuît. Mais le centenier les en empêcha parce qu’il voulait sauver Paul, et il commanda que ceux qui pouvaient nager se jetassent les premiers hors du vaisseau, et se sauvassent à terre, et que les autres se missent sur des planches et sur des pièces du vaisseau. Et ainsi ils gagnèrent tous la terre et se sauvèrent (42-44). Et s’étant ainsi