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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/29

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avait été opéré publiait sa guérison ; or, si elle n’eût été réelle, aurait-il seulement osé se montrer à la foule ? Ainsi ce miracle s’opère dans un lieu qui est tout ensemble public et secret. Et voyez ce qui arrive : Pierre et Jean montaient au temple pour prier, et ils firent tout autre chose. Ainsi le centurion Corneille priait et jeûnait pour obtenir une grâce tout autre que la révélation dont il fut favorisé.
Jusqu’ici Pierre désigne le Sauveur sous le nom de Jésus de Nazareth ; et il dit au boiteux « Au nom de Jésus de Nazareth, lève-toi et marche ». C’était un moyen de l’amener à croire à sa parole. Mais, je, vous le demande, ne vous lassez pas dès les premiers instants de cet entretien ; et quoique plusieurs peut-être se retireront après ce premier récit, je veux y revenir. D’ailleurs avec un peu de bonne volonté, nous arriverons bientôt à la fin, et nous atteindrons le but. Car, comme dit le proverbe, le zèle engendre le zèle, et la lâcheté, la lâcheté. Le peu de bien que l’on a fait, encourage à en faire plus encore, et on le continue avec confiance. Plus on met de bois sur un brasier, et plus il devient ardent. Ainsi plus l’âme se nourrit de pieuses pensées, et plus elle devient invincible à la tentation. Vous faut-il un exemple ? Dans notre cœur naissent, comme des ronces et des épines, le parjure-, le mensonge, la dissimulation, la fraude, la malignité, la raillerie, l’injure, la moquerie et les paroles impures et obscènes. D’un autre côté pullulent dans ce même cœur l’avarice, la rapine, l’injustice, l’hypocrisie et la malice. Ajoutez-y encore la concupiscence, l’immodestie, l’impureté, la fornication et l’adultère ; et enfin l’envie, la jalousie, la colère, l’emportement, la haine ; la vengeance, le blasphème et mille autres vices. Si vous triomphez des premiers, vous vaincrez facilement les seconds et même les troisièmes.
C’est qu’une première victoire fortifie l’âme et la prépare à de nouveaux succès. Que celui qui a l’habitude de jurer, se corrige donc de cette diabolique coutume, et non seulement il remplira un devoir, mais encore il se sentira porté aux divers exercices de la piété. Car celui qui s’interdit le péché du blasphème, ne voudra point en commettre d’autre, et il gardera honorablement la vertu qu’il s’est acquise. Il se respectera lui-même avec le même soin que nous évitons de salir un habit précieux. Il en arrivera donc bientôt à ne plus se permettre aucun acte de colère, d’emportement, ni de méchanceté, et ainsi, en avançant peu à peu, il atteindra la perfection. Mais souvent nous voyons arriver tout le contraire : car celui qui a bien commencé, ne se soutient pas ; il retombe par lâcheté dans ses premiers désordres et devient incorrigible. Par exemple, nous nous sommes imposé la loi de rie pas jurer, et pendant trois ou quatre jours nous v avons été fidèles : Mais dans une circonstance la tentation l’a emporté et nous avons perdu tout le fruit de notre première victoire. Alors, hélas ! nous tombons dans un lâche découragement, et nous ne voulons plus renouveler nos efforts. Cela se comprend jusqu’à un certain point ; car on est toujours peu empressé à relever un bâtiment qu’on a vu s’écrouler ; et cependant il faudrait s’armer de courage et recommencer avec une nouvelle énergie.
3. Proposons-nous donc chaque jour la pratique d’une vertu, et commençons par les plus faciles. Renonçons à la mauvaise habitude de jurer, mettons un frein à notre langue et ne prenons jamais en vain le nom du Seigneur. Ici point de dépenses, point de pratiques et nuls efforts pénibles : il suffit de le vouloir et tout est fait ; car c’est une affaire d’habitude. Aussi je vous le demande instamment : sachez vouloir. Si je vous avais annoncé une distribution d’argent, tous, vous vous seriez empressés d’accourir ; et si vous me voyiez dans un péril extrême, vous n’hésiteriez pas à exposer votre vie pour m’en arracher. Eh bien ! aujourd’hui, je suis en proie à une vive douleur, et je souffre tout autant que si j’étais prisonnier, battu de verges ou condamné aux mines. Tendez-moi une main secourable, et réfléchissez à quels dangers vous m’exposez si je ne puis obtenir de vous-mêmes le plus léger acte de vertu ; je dis léger sous le rapport du travail et des efforts. Et en effet, que répondrai-je à ces accusations : Pourquoi n’as-tu pas exhorté et repris ? Pourquoi n’as-tu pas commandé, insisté sur l’obligation et menacé fortement les désobéissants
Il ne me suffira pas de répondre que j’ai averti, car on répliquera qu’il fallait plus que de simples remontrances, et l’on me condamnera par l’exemple d’Héli. Ce n’est point, à Dieu ne plaise ! que je vous compare à ses fils. Mais enfin il les reprenait et leur disait : « Mes enfants, n’agissez pas ainsi, car j’apprends qu’on parle mal de vous ». ([[Bible_Crampon_1923/1_Samuel|1Sa. 2,