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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/294

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Voyez-le toujours agissant, et ne cherchant jamais à faire des miracles sans raison et sans but, mais seulement par nécessité. Et au moment même où la tempête s’élevait, ce n’était pas sans avoir des raisons qu’il prophétisait. Ici donc il se contente d’alimenter le feu, sans chercher par cela à se donner la moindre importance, mais uniquement pour que ses compagnons de voyage puissent se réchauffer et se remettre par ce moyen. Et en ce moment même une vipère que la chaleur avait fait sortir, le prit à la main. « Et quand les barbares virent cette bête qui pendait à sa main, ils s’entre-disaient : Cet homme, c’est sans doute quelque meurtrier, puisque, après avoir été sauvé de la mer ; la vengeance divine le poursuit encore et ne veut pas le laisser vivre (4) ». Et ce n’est pas sans raison que la Providence permet qu’ils soient témoins de cet – accident, et qu’ils en parlent en ces termes, afin que, lorsque le miracle sera arrivé, ils ne refusent pas d’y croire.. Et voyez comme le sens commun et la raison naturelle se montrent, dans toute leur rectitude, même chez les barbares ; voyez tout ce qu’il y a d’honnêteté dans leurs sentiments, et de réserve dans leurs jugements. Et ceux-ci sont les premiers à voir, afin qu’ils en admirent davantage ce qui va arriver. « Mais Paul ayant secoué la vipère dans le feu, n’en reçut aucun mal. Les barbares s’attendaient à ce que sa main s’enflerait, ou qu’il tomberait mort tout d’un coup : mais après avoir attendu longtemps, lorsqu’ils virent qu’il ne lui en arrivait aucun mal, ils changèrent de sentiment, et dirent que c’était un Dieu (5-6) ». Ceux qui s’attendaient à le voir tomber mort, voyant qu’il n’éprouvait aucun mal, disent maintenant : c’est un Dieu. Et voilà que de nouveau il est comblé d’honneurs par ces hommes, comme il le fut par cette multitude de la Lycaonie. « Or, il y avait en cet endroit un nommé Publius, le premier de cette île, qui nous reçut, et exerça, avec une grande bonté, l’hospitalité envers nous pendant trois jours (7) » Voilà un nouveau Publius, hospitalier comme le premier, vivant dans l’opulence. Celui-ci, qui ne savait rien de la religion du Christ, mais que le seul spectacle de leurs malheurs disposait à la pitié, les reçut et leur prodigua ses soins. « Or, il se rencontra que le père de Publius était malade de fièvre et de dysenterie ; Paul l’alla voir, et ayant fait sa prière, il lui imposa les mains et le guérit (8) ». Il méritait bien d’obtenir de Paul ce service, et celui-ci, par un échange de bons procédés, guérit son père. « Après ce miracle, tous ceux de l’île qui étaient malades, vinrent à lui, et ils furent guéris. Ils nous rendirent ainsi de grands honneurs, et ils nous pourvurent de tout ce qui était nécessaire pour notre voyage (9-10) ». C’est-à-dire, tout ce qui était nécessaire ; soit à nous, soit aux autres qui étaient avec nous : considérez qu’à cause de Paul, après avoir échappé à la tempête, ils ne restent pas privés de soins, et sont même entourés de tous les égards d’une généreuse hospitalité ; car ils furent nourris en cet endroit pendant trois mois. Écoutez de quelle manière la suite du texte établit qu’ils sont demeurés là pendant tout ce temps.
« Au bout de trois mois, nous nous embarquâmes sur un vaisseau d’Alexandrie, qui avait passé l’hiver dans l’île, et qui portait pour enseigne : Castor et Pollux. Nous abordâmes à Syracuse où nous restâmes trois jours. De là, en côtoyant la Sicile, nous vînmes à Rhégium, et un jour après, le vent du midi s’étant levé, nous arrivâmes en deux jours à Pouzzoles, où nous trouvâmes des frères qui nous prièrent de demeurer sept jours auprès d’eux, et ensuite nous prîmes le chemin de Rome. Lorsque les frères de Rome eurent appris des nouvelles de notre arrivée, ils vinrent au-devant de nous jusqu’au lieu appelé le marché d’Appius et les Trois Hôtelleries. Et Paul les ayant vus, rendit grâces à Dieu, et fut rempli d’une nouvelle confiance (11-15) ». Voyez comme tout cela arrive à cause de Paul, et pour amener à la foi les prisonniers, les soldats, le centenier. Car alors même qu’ils eussent été dé pierre, ils ne pouvaient manquer de se faire une haute idée de lui, par les conseils qu’il leur avait donnés, par les prophéties qu’il avait fait entendre, par les miracles qu’il avait opérés, et enfin par ses bienfaits : car c’était à lui qu’ils devaient d’avoir été nourris si longtemps. Remarquez de quelle manière, quand le jugement est droit, et qu’aucune passion ne le trouble, il accueille les pensées droites et sages. La prédication chrétienne avait déjà pénétré en Sicile, elle était arrivée jusqu’à Pouzzoles, puisqu’ils y trouvent un certain nombre de frères auprès desquels ils demeurent. Là,