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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/318

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eux avec un empressement volontaire et une vive reconnaissance.
3. Mais pourquoi, direz-vous, tous ne les acceptent-ils pas ? À cause de leur infirmité propre. Mais pourquoi ne guérit-il pas cette infirmité ? Eh ! quel moyen fallait-il employer, dites-moi ? N’a-t-il pas fait la création pour manifester sa bonté et sa puissance ? « Les cieux », est-il dit, « racontent la gloire de Dieu ». (Ps. 18,2) N’a-t-il pas envoyé des prophètes ? N’a-t-il pas appelé, prodigué les hommes ? N’a-t-il pas fait des prodiges ? N’a-t-il pas donné la loi écrite et naturelle ? N’a-t-il pas envoyé son Fils ? N’a-t-il pas envoyé des apôtres ? N’a-t-il pas opéré des signes ? N’a-t-il pas menacé de l’enfer ? N’a-t-il pas promis son royaume ? Ne fait-il pas chaque jour lever son soleil ? N’a-t-il pas rendu ses commandements si doux, si faciles, qu’un grand nombre les dépassent par la force de leur sagesse ? « Qu’ai-je dû faire à ma vigne, que je n’aie pas fait ? » (Is. 5,4)
Mais pourquoi, ajoutera-t-on, ne pas nous rendre la science et la vertu naturelles ? Qui dit cela ? Est-ce le grec où le chrétien ? Tous les deux, mais sans porter sur le même point : car l’un réclame pour la science ; l’autre pour la conduite de la vie. Répondons d’abord à celui qui est des nôtres : car je m’intéresse moins à ceux du dehors qu’aux membres de notre famille. Que dit donc le chrétien ? Qu’il fallait nous donner la science de la vertu. Il nous l’a donnée : autrement, comment connaîtrions-nous ce qu’il faut faire et ce qu’il faut éviter ? D’où viennent les lois et les tribunaux ? – Mais c’est la pratique même, et pas seulement la science, qu’il devait nous donner. – Auriez-vous mérité une récompense, si Dieu avait tout fait ? Dites-moi : si le grec et vous commettez le même péché, serez-vous punis de la même manière ? Non certainement : Car vous avez la liberté qui procède de la science. Dites-moi encore : Si quelqu’un vous disait que le grec et vous recueillerez le même fruit de votre science, ne vous fâcherez-vous pas ? J’en suis convaincu : Car vous direz que le grec pouvant trouver la science de lui-même, ne l’a pas voulu. Et s’il s’avisait de dire que Dieu devait nous donner la science naturellement, ne ririez-vous pas et ne lui diriez-vous pas : Pourquoi n’as-tu pas cherché ? Pourquoi n’as-tu pas fait les mêmes efforts que moi ? Plein d’une grande confiance, vous ajouteriez : Qu’il est d’une extrême folie d’accuser Dieu de n’avoir pas rendu la science naturelle. Et vous diriez cela, parce que chez vous la science est saine et en bon état. Si votre vie eût été aussi bien réglée, vous n’auriez pas posé la question. Mais parce que vous êtes sans énergie pour la vertu, vous tenez ce langage insensé. Pourquoi fallait-il que le bien se fit nécessairement ? Les animaux privés de raison auraient donc été nos émules en vertu ? Car quelques-uns même l’emportent sur nous en tempérance.
J’aimerais mieux, dirait-on, être bon par nécessité et ne recevoir aucune récompense, que d’être méchant par volonté et être condamné à des châtiments et à des supplices. – Être, vertueux par nécessité, est chose impossible. Si vous ignorez ce qu’il faut faire, dites-le, et nous vous répondrons ce qu’il faudra ; mais si vous savez que le libertinage est mauvais, pourquoi n’évitez-vous pas le mal ? – Je ne puis pas, dites-vous. Mais d’autres qui ont fait de bien plus grandes choses vous accuseront, et vous réduiront au silence par la surabondance de leur vertu. Peut-être ayant une femme, vous n’êtes pas chaste ; et d’autres n’ayant pas de femmes, gardent une chasteté parfaite. Comment vous justifierez vous de ne remplir point la stricte mesure, quand d’autres s’élancent bien au-delà ? – Mon tempérament n’est pas le même, direz-vous, ni ma volonté non plus. C’est parce que vous ne le voulez pas, et non parce que vous ne le pouvez pas ; car je vous démontre que tous sont capables de vertu. En effet, ce que quelqu’un ne peut pas faire, il ne le fera pas même sous l’influence de la nécessité ; et si celui qui n’agit pas peut agir sous la pression de la nécessité, ce n’est plus par volonté qu’il agit. Par exemple : voler et s’élever vers le ciel est chose absolument impossible à quiconque a un corps. Eh bien ! si un roi ordonnait de voler sous peine de mort, en disant : L’homme qui ne volera pas sera massacré, ou jeté au feu, ou subira tout autre supplice de ce genre ; pourrait-on obéir ? Évidemment non ; car notre nature ne saurait s’y prêter. Mais si le prince faisait les mêmes ordonnances à propos de la chasteté, en décrétant, et avec justice, que tout libertin sera puni, brûlé, flagellé, torturé de mille manières ; n’y en aurait-il pas un grand nombre qui se soumettraient à l’édit ? – Non, direz-vous peut-être ; car il y a déjà