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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/320

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HOMÉLIE III.
OR, JE VOUS SUPPLIE, MES FRÈRES, PAR LE NOM DE JÉSUS-CHRIST NOTRE-SEIGNEUR, D’AVOIR TOUS UN MÊME LANGAGE, ET DE NE POINT SOUFFRIR DE SCHISMES PARMI VOUS, MAIS D’ÊTRE TOUS UNIS PARFAITEMENT DANS UN MÊME ESPRIT ET UN MÊME SENTIMENT. (VERS. 10, JUSQU’À 17)
ANALYSE.
  1. Que les réprimandes doivent être préparées et amenées doucement et peu à peu.
  2. Que saint Paul ne se préfère pas à saint Pierre.
  3. Baptiser n’est pas une œuvre dont on doive s’enorgueillir puisque tout le monde en est capable. – Prêcher est plus difficile.
  4. et 5. Ne pas rougir de l’ignorance des apôtres puisque c’est leur gloire. – De quelle manière nous devons travailler à convertir les infidèles. – Zèle pour le salut des âmes. – Quel bonheur c’est d’en convertir une seule.

1. Les reproches, comme je vous l’ai toujours dit, doivent venir doucement, peu à peu ; et c’est ce que Paul fait ici. Sur le point d’aborder un sujet plein de périls et capable de renverser l’Église de fond en comble, il adoucit son langage. Il dit qu’il les supplie, mais qu’il les supplie par le Christ : comme s’il ne se sentait pas capable de les prier et de les persuader par lui-même. Qu’est-ce que cela : « Je vous supplie par le Christ ? » Je prends le Christ pour auxiliaire, j’invoque le secours de son nom, de ce nom injurié et déshonoré. Paroles pleines d’à-propos, pour ne pas les pousser à l’insolence : car le péché rend insolent. Si, en effet, vous commencez par de violents reproches, vous ferez des rebelles et des impudents ; si vous grondez doucement, vous verrez le coupable incliner la tête. Garder le silence et baisser les yeux, c’est ce que Paul va faire, et, en attendant, il exhorte au nom du Christ. Et à quoi exhorte-t-il ? « À avoir tous le même langage et à ne pas souffrir de schismes parmi vous ». Le sens énergique du mot schisme et le blâme qu’implique ce terme, étaient bien propres à les blesser au vif. Car il n’y avait pas beaucoup de parties entières ; mais l’unité même avait péri. En effet, si c’étaient des Églises saines et entières, il y avait au moins beaucoup d’assemblées ; mais si c’étaient des schismes, l’unité même avait disparu. Car l’unité divisée en beaucoup de parties, non seulement ne se multiplie pas, mais est détruite elle-même. Telle est la nature des schismes. Ensuite, après les avoir blessés au vif par le mot de schisme, il se radoucit et mitige ainsi son langage : « Mais d’être tous unis dans le même esprit et dans le même « sentiment ». Après avoir dit : « D’avoir tous le même langage », il ajoute : Ne pensez pas que je parle seulement de l’accord du langage, je demande aussi l’accord de pensée. Et comme il peut arriver que cet accord existe, mais non sur tous les points, il ajoute : « Mais d’être unis d’une manière parfaite ». Car celui qui est d’accord sur un point et en désaccord sur d’autres, n’est point uni en perfection, n’est point parfait sous le rapport de l’union. On peut encore être uni par la pensée et ne l’être point par le sentiment : ce qui arrive par exemple quand nous avons la même foi et que nous ne sommes pas liés par la charité. En ce cas nous sommes unis par la pensée (puisque nous pensons les mêmes choses), mais nous ne le sommes point par le sentiment : ce qui avait lieu alors, où les uns s’attachaient à un maître, les autres à un autre. C’est pourquoi il exige qu’on soit uni d’esprit et de sentiment. Car les schismes ne provenaient pas de la différence de foi, mais de la diversité des sentiments, effet des rivalités humaines.