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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/34

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ni lui ne sont l’auteur de ce miracle ; aussi leur dit-il : « Pourquoi vous étonnez-vous ? » Cependant il ne veut ras qu’ils doutent de sa réalité ; et c’est pour le leur rendre plus certain encore, qu’il prévient leurs pensées, et s’écrie : « Pourquoi nous regardez-vous comme si nous avions opéré ce prodige par notre vertu et notre piété ? » Si cette guérison vous trouble et vous agite, apprenez quel en est l’auteur, et vous cesserez de vous en étonner. Ici encore, comme toujours, Pierre s’appuie sur le témoignage de Dieu, et dès qu’il a affirmé que tout arrive selon ses conseils, il n’hésite plus à reprendre vivement ses auditeurs. Aussi a-t-il dans son premier discours nommé Jésus « un homme approuvé a de Dieu au milieu d’eux » ; et il leur rappelle sans cesse qu’ils l’ont mis à mort pour mieux faire resplendir le miracle de sa résurrection. Mais ici ce n’est plus seulement Jésus de Nazareth ; et il lui donne un titre bien plus auguste. « Le Dieu de nos pères », dit-il, « a glorifié son Fils Jésus ».
Admirez cependant l’humilité du saint apôtre ; il ne s’emporte point contre ses auditeurs, et ne leur dit point subitement : Croyez en Jésus-Christ, car voilà que cet homme, âgé de quarante ans et boiteux de naissance, a été guéri en son nom. Un tel langage les eût rebutés : il s’en abstient donc, et s’empresse de louer l’étonnement qu’ils font paraître. Il nomme ensuite Dieu, le Père de Jésus, et ne dit point que celui-ci avait guéri le boiteux, quoiqu’il fût véritablement l’auteur de cette guérison, afin de prévenir cette objection Jésus était un malfaiteur, et comment peut-on lui attribuer cette gloire ? C’est pourquoi il leur rappelle quel jugement Pilate en a porté, et leur montre ainsi, pour peu qu’ils veuillent réfléchir, que Jésus n’était point un malfaiteur, car Pilate n’eût point alors voulu le relâcher. Observez aussi le choix de cette expression : « Pilate jugeant qu’il devait être absous ». Ce n’était pas en lui une simple volonté, mais un vrai jugement qui' attestait que vous demandiez la grâce de l’homme qui avait commis un meurtre, et que vous rejetiez celui qui rappelait les morts à la vie.
Ils pouvaient encore faire cette objection Comment ceux qui abandonnèrent alors leur Maître, viennent-ils aujourd’hui le glorifier ? Pierre y répond en citant le témoignage des prophètes qui avaient prédit que les choses devaient ainsi arriver. D’autre part il les reprend vivement, de peur qu’ils ne – cherchassent à s’excuser sur l’ordre et les conseils du Seigneur. Car c’était un crime énorme que d’avoir renié Jésus-Christ en présence de Pilate ; et la présence parmi eux du meurtrier qu’ils lui avaient préféré, leur ôtait à cet égard toute excuse. Pierre agit donc avec une grande sagesse, et leur prouve combien, dans ces circonstances, leur conduite a été honteuse et légère. Pilate, qui était païen, qui voyait Jésus pour la première fois, et qui n’avait été témoin d’aucun prodige, voulait le délivrer, et vous, qui aviez été comme nourris au milieu de ses miracles, vous vous y êtes opposés. Au reste Pilate, en renvoyant Jésus absous, prétendait accomplir un devoir de justice, et non point faire un acte de compassion et d’indulgence. Car écoutez ses propres paroles : La coutume est de vous accorder la délivrance d’un prisonnier : « Et voulez-vous que je vous délivre celui-ci ? » Et vous, dit l’apôtre, « vous avez rejeté le saint et le juste ». Il ne dit point : Vous avez livré, mais : « vous avez rejeté ». Cette expression est parfaitement juste, parce qu’ils s’étaient écriés : « Nous n’avons pas d’autre roi que César ». (Jn. 19,15)
Observons enfin que l’apôtre, après avoir reproché aux Juifs de n’avoir point réclamé la délivrance du juste, et même de l’avoir rejetée, ajoute : Et vous l’avez mis à mort. Lorsque les esprits étaient encore tout plongés dans les, ténèbres, il n’avait eu garde de parler ainsi ; mais les voyant troublés et agités, il frappe ces coups violents parce qu’ils peuvent mieux les sentir. Ce n’est point dans le transport de l’ivresse, mais quand elle est dissipée, qu’on peut faire d’utiles représentations ; et de même l’apôtre profite d’un moment lucide pour parler sévèrement et énumérer leurs nombreux forfaits. Ils ont livré à la mort celui que Dieu a glorifié, ils l’ont renié en présence de Pilate qui le trouvait innocent, et ils lui ont préféré un voleur.
3. Admirez aussi comme il insinue que la résurrection de Jésus-Christ est un effet de sa puissance. Dans son premier discours, il avait dit : « Il était impossible qu’il fût retenu dans le tombeau ». Et ici : « Vous avez mis à mort l’auteur même de la vie ». Il n’a donc point reçu la vie d’un autre. L’esprit de malice enfante le mal, et le père de l’homicide est celui qui a commis le premier meurtre. Ainsi