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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/342

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il y a des vertus trompeuses, celles des enchanteurs par exemple, l’apôtre veut en détruire jusqu’au soupçon. Il ne dit donc pas simplement « de la vertu », mais d’abord « de l’Esprit », et ensuite « de la vertu » ; indiquant par là que ce qui se passait était l’œuvre de l’Esprit. Ainsi, pour n’être point faite à l’aide de la sagesse profane, la prédication gagnait beaucoup de prix, au lieu d’en perdre ; cela prouve donc qu’elle est divine et qu’elle prend ses racines dans le ciel. C’est pourquoi l’apôtre ajoute : « Afin que votre foi ne soit point appuyée sur la sagesse des hommes, mais sur la puissance de Dieu ». Voyez-vous clairement comme il démontre par tout moyen que l’ignorance est très utile et la sagesse très nuisible ? L’une prêchait la croix de Jésus-Christ, l’autre la puissance de Dieu ; mais celle-ci faisait qu’on ne trouvait rien de ce qu’il fallait et qu’on se glorifiait en soi-même ; celle-là, au contraire, déterminait à accepter la vérité et à se glorifier en Dieu. En second lieu, la sagesse eût persuadé à un grand nombre que la vérité était humaine, tandis que l’autre démontrait clairement qu’elle est divine et descendue du ciel. En effet, lorsque la démonstration se fait par l’art des discours, souvent les pires l’emportent sur les meilleurs, parce qu’ils sont plus habiles dans l’art de parler, et le mensonge l’emporte sur la vérité. Ici il n’en est pas de même : car l’Esprit n’entre pas dans l’âme impure, et quand il entre quelque part, il ne saurait jamais avoir le dessous, quelle que soit l’habileté du langage. Car la démonstration par les œuvres et par les signes est beaucoup plus évidente que celle qui se fait par la parole.
Mais, dira peut-être quelqu’un de nos adversaires, si la prédication doit l’emporter sans le secours de l’éloquence, de peur que la croix ne soit rendue inutile, pourquoi les signes ont-ils cessé maintenant ? Pourquoi ? Parlez-vous ici comme un incrédule qui n’admet point ce qui s’est passé du temps des apôtres, ou cherchez-vous réellement à apprendre la vérité ? Dans le premier cas, je m’en tiendrai à cette seule réponse : S’il n’y a pas eu de signes alors, comment, chassés, persécutés, tremblants, enchaînés, devenus les ennemis communs du genre humain, exposés aux mauvais traitements de la part de tous, n’ayant d’ailleurs rien d’attrayant par eux-mêmes, ni éloquence, ni éclat, ni richesse, ni ville, ni peuple, ni origine, ni science, ni gloire, ni rien de semblable, mais le contraire de tout cela, l’ignorance, l’obscurité, la pauvreté, la haine, l’inimitié, et tenant tête à des peuples entiers, et annonçant de telles doctrines ; comment, dis-je, persuadaient-ils ? Car leurs préceptes étaient très pénibles, leurs enseignements pleins de périls ; et ceux qui les écoutaient, ceux qu’il fallait convaincre, avaient été élevés dans la mollesse, dans l’ivrognerie, dans toutes sortes de vices. Comment ont-ils convaincu, dites-moi ? Quels titres avaient-ils à la confiance ? Si, comme je vous l’ai déjà dit, ils ont convaincu sans les signes, c’est évidemment un bien plus grand prodige.

Donc, de ce qu’il n’y a plus de signes maintenant, ne concluez pas qu’il n’y en eut point alors. Alors ils étaient utiles, aujourd’hui ils ne le seraient plus. De ce qu’on persuade aujourd’hui seulement par la parole, il ne suit pas nécessairement que la prédication se fasse par la sagesse humaine. Car ceux qui semèrent la parole dans le commencement étaient des gens simples et sans instruction, mais ils ne disaient rien d’eux-mêmes et communiquaient au monde ce qu’ils avaient reçu de Dieu ; et nous aussi aujourd’hui nous ne donnons rien de nous-mêmes, mais nous prêchons à tous ce que nous avons reçu des apôtres. Et ce n’est point non plus par le raisonnement que nous persuadons ; mais, par les divines Écritures et par les signes d’alors, nous faisons accepter ce que nous disons. Et les apôtres ne convainquaient pas seulement par des signes, mais aussi par la parole ; et leur parole était fortifiée par les signes et par les témoignages de l’Ancien Testament, et non par l’habileté du langage. Mais pourquoi, direz-vous, les signes étaient-ils alors utiles et ne le sont-ils plus aujourd’hui ? Supposons (jusqu’ici je discute avec le gentil, et voilà pourquoi je parle comme d’une hypothèse de ce qui arrivera certainement : que l’infidèle veuille bien admettre cette hypothèse pour le cours de la discussion) ; supposons, dis-je, que le Christ viendra : quand il sera venu et tous ses anges avec lui, quand Dieu aura prouvé son existence et son empire universel, le gentil lui-même ne croira-t-il pas ? Évidemment il croira, et il adorera, et il confessera que Dieu existe, fût-il d’ailleurs le plus obstiné des hommes.

3. En effet, qui donc en voyant les cieux ouverts, le Christ descendant sur les nués, environné