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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/343

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de toutes les puissances célestes, et les torrents de flamme, et tous les hommes réunis et tremblants ; qui, dis-je, n’adorera pas et ne reconnaîtra pas qu’il y a un Dieu ? Mais, dites-moi, cette adoration et cette connaissance seront-elles comptées au gentil comme un acte de foi ? Pas le moins du monde. Pourquoi ? Parce que ce n’est point là de la foi : c’est l’effet de la nécessité, de l’évidence ; la volonté n’y est pour rien ; la grandeur du spectacle a forcé l’assentiment de l’esprit. Donc, plus les faits sont éclatants et s’imposent nécessairement à l’esprit, plus la foi est diminuée. Voilà pourquoi il n’y a plus de signes. Et, pour preuves, écoutez ce que Jésus dit à Thomas : « Heureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru ». Donc, plus le signe est évident, plus le prix de la foi diminue ; et c’est ce qui arriverait maintenant, s’il y avait encore des signes. Paul nous apprend qu’un jour nous ne connaîtrons plus Dieu par la foi, quand il nous dit : « Car maintenant nous marchons « par la foi, et non encore par une claire vue ». (2Cor. 5,7) Comme donc alors l’évidence éclatante empêchera que votre foi ne vous soit imputée, ainsi en serait-il maintenant s’il y avait des signes comme autrefois. C’est quand nous admettons ce qu’il est absolument impossible de trouver par le raisonnement, que la foi existe. Voilà pourquoi Dieu nous menace de l’enfer, mais l’enfer n’est pas visible ; s’il l’était, il arriverait ce que nous disions tout à l’heure.
Du reste, si vous voulez des signes, vous en verrez, bien que d’un autre genre : de nombreuses prédictions et sur une foule de sujets, la conversion du monde entier, les barbares devenus philosophes, les mœurs sauvages adoucies, la religion propagée. – Quelles prédictions, direz-vous ? Toutes ont été faites après coup. – Mais quand, dites-moi ? Où ? Par qui ? Combien y a-t-il d’années ? Cinquante, ou cent ? Donc, auparavant, il n’y avait absolument rien d’écrit. Comment donc le monde a-t-il retenu ces dogmes et tant d’autres choses auxquelles la mémoire ne suffit pas ? Comment a-t-on su que Pierre a été attaché à la croix ? D’où est venue l’idée de prédire par exemple que l’Évangile serait prêché par toute la terre, que la loi juive cesserait, et ne se rétablirait jamais ? Et comment ceux qui livraient leur vie pour la prédication, auraient-ils souffert qu’elle fût dénaturée ? Comment, les signes ayant cessé, aurait-on ajouté foi aux écrivains ? Comment, si ces écrivains n’eussent pas été dignes de foi, leurs écrits auraient-ils pénétré chez les barbares, dans les Indes, jusqu’aux extrémités de l’Océan ? D’autre part, quels étaient ces écrivains ? Quand et où écrivaient-ils ? Pourquoi écrivaient-ils ? Était-ce pour se procurer de la gloire ? Mais alors pourquoi publier leurs livres sous d’autres noms ? Pour recommander leur enseignement, dira-t-on. Un enseignement vrai, ou un enseignement faux ? Dans le premier cas, il était peu probable qu’on vînt à eux ; dans le second, ils n’avaient pas besoin de mentir, comme vous le dites. Du reste, ces prophéties sont telles, que jusqu’à présent il n’a pas été possible de les démentir.
Il y a bien des années que Jérusalem est détruite. Il y a d’autres prophéties qui s’étendent depuis ce temps-là jusqu’à l’avènement du Christ, discutez-les comme il vous plaira ; celle-ci, par exemple : « Je suis toujours avec vous jusqu’à la consommation des siècles ». (Mt. 27,20) Et cette autre : « Sur cette pierre je bâtirai mon Église, et les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre elle ». (Mt. 16,18) Et encore : « Cet Évangile sera prêché dans toutes les nations » (Mt. 24,14) ; et : « Partout où cet Évangile sera prêché on dira ce qu’a fait cette femme ». (Mt. 26,13) Et beaucoup d’autres encore. Comment cette prophétie s’est-elle réalisée, si c’était une invention ? Comment les portes de l’enfer n’ont-elles pas prévalu contre l’Église ? Comment le Christ est-il toujours avec nous ? Car s’il n’y était pas, l’Église n’aurait pas triomphé. Comment l’Évangile s’est-il propagé par toute la terre ? Nos propres adversaires, Celse, et après lui Porphyre, suffisent à prouver l’ancienneté de nos livres : assurément ils n’ont pas combattu des écrits qui leur fussent postérieurs. D’autre part, le monde entier qui les a reçus unanimement, en porte aussi témoignage. Sans la grâce de l’Esprit-Saint, jamais un tel accord n’aurait eu lieu d’une extrémité du monde à l’autre ; les auteurs eussent été vite convaincus d’imposture, et des inventions et des mensonges n’auraient pas obtenu de tels succès. Ne voyez-vous pas accourir la terre entière ? l’erreur éteinte ? la philosophie des moines surpassant l’éclat du soleil ? les chœurs des vierges ? la religion répandue chez les barbares ? tous les hommes assujettis au même