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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/351

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25]]) Qu’est-ce que cela veut dire : « Qui ne sont pas bons ? » C’est-à-dire ; qui ne contribuent guère à la vertu ; aussi ajoute-t-il « Des préceptes qui ne les feront pas vivre. Mais l’homme animal ne perçoit pas ce qui est de l’Esprit ». Et à bon droit : car comme personne ne peut, avec le seul secours de ses yeux, savoir ce qui se passe dans le ciel, ainsi l’âme ne peut, par elle-même, connaître ce qui est de l’Esprit. Et pourquoi parler du ciel ? On ne peut même connaître tout ce qui se passe sur la terre. En effet, en voyant de loin une tour carrée, nous la croyons ronde ; ce qui est une illusion d’optique. Ainsi c’est le comble du ridicule de vouloir étudier, par les seules forces de l’esprit, les choses qui sont bien au-dessus de sa portée non seulement il ne les verra point telles qu’elles sont, mais il les jugera dans un sens tout opposé ; aussi l’apôtre ajoute-t-il. « Car c’est folie, pour lui ».
Et ce n’est point la faute des objets, mais de sa faiblesse, qui ne saurait atteindre leur grandeur par les yeux de l’âme. L’apôtre en donne la raison en disant : « Et il ne le peut comprendre, parce que c’est par l’esprit qu’on doit en juger ». C’est-à-dire : les choses qu’on annonce demandent la foi et ne peuvent se comprendre par le raisonnement : car leur grandeur dépasse de beaucoup notre faible intelligence. C’est pourquoi il ajoute : « Mais l’homme spirituel juge de toutes choses, et n’est jugé par, personne ». En effet, celui qui voit, voit tout, même ce qui appartient à celui qui ne voit pas ; mais aucun de ceux qui ne voient pas, ne voient ce qui appartient à celui qui voit. De même nous savons maintenant ce qui nous regarde et ce qui regarde les infidèles ; mais eux lie savent pas ce qui nous concerne. Ainsi nous connaissons la nature des choses présentes, le prix des choses à venir, ce que deviendra le monde un jour, ce que les pécheurs souffriront, ce dont les justes jouiront ; nous savons que le présent n’est rien et nous le démontrons (car juger c’est prouver), et que l’avenir est immortel et immuable. Le spirituel sait tout cela : ce que l’homme charnel souffrira, ce que le fidèle possédera au sortir de cette vie ; et l’homme animal n’en sait rien. Et pour rendre plus évident ce qu’il vient de dire, l’apôtre ajoute : « Car qui a connu la pensée du Seigneur pour pouvoir l’instruire ? Mais nous, nous avons la pensée du Christ ». C’est-à-dire, nous savons ce qu’il y a dans la pensée du Christ, ce qu’il veut et ce qu’il a révélé. Après avoir dit que l’Esprit a révélé, pour qu’on n’écarte pas le Fils, il ajoute que le Fils nous a aussi fait voix les choses ; ce qui ne veut pas dire que nous savons tout ce que sait le Christ, mais que tout ce que nous savons ne vient pas de l’homme, ne peut être suspect, et est spirituel et dans la pensée du Christ.
6. Car la pensée que nous avons sur tout cela, nous la tenons pour la pensée du Christ ; c’est-à-dire, nous regardons comme spirituelle la connaissance que nous avons des choses de la foi ; en sorte que nous ne pussions en toute justice être jugés par personne. En effet, l’homme animal ne peut connaître les choses de Dieu ; ce qui fait dire à Paul : « Qui a connu la pensée du Seigneur ? » Entendant par là que notre pensée sui ces objets est celle même du Christ. Et ces paroles : « Pour l’instruire », ne sont pas mises là au hasard, mais se rapportent à ce qu’il a dit plus haut : « Le spirituel n’est jugé par personne ». Car si personne ne peut connaître la pensée du Seigneur, à plus forte raison l’enseigner et la corriger. Et c’est le sens de ces mots : « Pour l’instruire ». Voyez-vous comme il poursuit à outrance la sagesse profane, et montre que l’homme spirituel sait plus de choses et de plus grandes choses ? Car comme les raisons données plus haut (par exemple : « Afin que nulle chair ne se glorifie », ou : « Il a choisi ce qui est insensé pour confondre les sages » ; ou : « Afin de ne pas rendre vaine la croix du Christ ») ; comme ces raisons, dis-je, n’étaient pas très dignes de foi aux yeux des païens ni très propres à les attirer, et ne paraissaient ni nécessaires ni utiles : il produit enfin la raison principale, à savoir, que la meilleure manière de voir est pour nous celle par laquelle nous pouvons apprendre des secrets sublimes qui sont au-dessus de notre portée : En effet, la raison était réduite à rien, puisque nous ne pouvons, au moyen de la sagesse profane, comprendre ce qui est au-dessus de nous. Ne voyez-vous pas qu’il valait beaucoup mieux apprendre de l’Esprit ? C’est le mode d’enseignement le plus facile et le plus clair. « Mais nous avons la pensée du Christ » ; c’est-à-dire, la pensée spirituelle, divine, qui n’a rien d’humain. Car ce ne sont pas les pensées de Platon, ni de Pythagore,