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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/37

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est votre frère, vous bénit, la promesse du Seigneur se réalise. Aussi, loin que vous soyez exclus du nombre de ses enfants, il veut que vous deveniez les maîtres et les chefs de vos frères. C’est pourquoi vous ne devez point vous considérer comme rejetés et abandonnés de Dieu. « Afin que chacun de vous revienne de son iniquité ». Ainsi ce n’est pas une simple bénédiction, mais une bénédiction pleine et abondante. Eh ! que sera donc cette bénédiction ! Elle sera vraiment grande. Car revenir seulement de ses iniquités, ne suffit pas pour les expier, ni, à plus forte raison, pour obtenir la bénédiction divine. Et en effet, quand celui qui commettait l’injustice, devient vertueux, on ne peut dire qu’il est béni, et il reçoit seulement le pardon de ses fautes.
Mais ces mots. « Semblable à moi », ne peuvent s’appliquer à Jésus-Christ qu’en qualité de législateur, et autrement ils n’auraient aucun sens. Aussi Moïse ne dit-il pas simplement : « Vous l’écouterez » ; mais : « que toute âme qui n’écoutera pas ce prophète, sera exterminée du milieu du peuple ». Au reste ce n’est qu’après les avoir convaincus de péché, et après leur en avoir offert la rémission avec la promesse dés biens du ciel, que l’apôtre allègue le témoignage de Moïse. Eh ! quelle est la conclusion de ses paroles ? » Jusqu’ « au jour du rétablissement de toutes choses ». Ainsi il leur cite Moïse comme les engageant à écouter tout ce que Jésus-Christ leur dira, et les y invitant sous les plus graves menaces. Oui, ces menaces sont terribles, et c’est pourquoi il faut lui obéir. Et maintenant que signifient ces mots : « Fils des prophètes, et enfants de l’alliance ? » Ils signifient héritiers et successeurs. Si vous êtes les fils du père de famille, pourquoi donc ne considérez-vous votre patrimoine que comme un bien étranger ? Vous avez sans doute commis un grand crime, mais vous pouvez en obtenir le pardon.
Que ces paroles sont consolantes ! Et puis il ajoute ; « Dieu vous a envoyé son Fils pour « vous bénir ». Il ne dit pas ; pour vous sauver ; mais : pour, vous bénir, ce qui est bien plus excellent ; et il montre ainsi que Jésus crucifié bénira ceux mêmes qui l’ont attaché à la croix. Imitons-le donc, et rejetons toute pensée de sang et d’inimitié. Il ne suffit pas de ne point se venger ; car la vengeance était défendue par la loi ancienne ; mais il faut nous conduire envers ceux qui nous ont fait tort comme envers de véritables amis, et les aimer comme nous-mêmes. Nous serons ainsi les imitateurs et les disciples de ce Jésus qui est mort sur la croix, et qui n’a rien épargné pour le salut de ses bourreaux, jusqu’à leur envoyer ses apôtres. D’ailleurs ne méritons-nous pas souvent l’injustice qu’on nous fait éprouver ? Mais à l’égard de Jésus-Christ la conduite des Juifs fut aussi impie qu’injuste, car ils crucifièrent leur bienfaiteur, l’homme qui jamais ne leur avait fait de mal. Quel fut donc leur motif ? Dites-le-moi. L’orgueil et la vanité. Et cependant Jésus-Christ les honorait dans toute circonstance. Comment ? Rappelez-vous ces paroles : « Les scribes et les pharisiens sont assis sur la chaire de Moïse, faites donc tout ce qu’ils vous disent, mais ne faites pas ce qu’ils font ». Et encore : « Allez, et montrez-vous au prêtre ». (Mt. 23,2, III, 8, 4) C’est ainsi que Jésus, pouvant perdre ses ennemis, leur offrait le salut, et à son exemple soyons amis de tous, et réservons pour le démon seul tout sentiment de haine et d’inimitié.
5. Mais voulez-vous aimer facilement vos frères ? évitez le serment et la colère. Car nous ne saurions haïr celui contre lequel nous ne nous permettrons pas même un mouvement de colère. Or puisque le serment en est la cause la plus ordinaire, ne jurez plus, et vous aurez comme coupé les ailes à la colère. On peut dire aussi que le serment et la colère sont le vent qui enfle la voile ; mais s’il ne souffle pas, carguez la voile ; il ne sert de rien de la tenir déployée. Oui, supprimons les cris et les jurements, et nous aurons comme coupé le nerf de la colère. Si vous en doutez, essayez, et l’expérience vous convaincra qu’il en est ainsi. Je propose cet accord à l’homme lé plus irascible ; qu’il s’abstienne de jurer, et de mon côté je ne lui parlerai plus de pratiquer la douceur chrétienne. Tout sera parfait, car il n’y aura plus ni serment, ni parjure.
Au reste, vous ne savez pas dans quelles difficultés vous vous engagez. Et en effet, le serment est une chaîne qui vous enlace de toutes parts, en sorte qu’il vous faut faire les plus grands efforts pour arracher votre âme à un péril inévitable. Mais si vous n’y réussissez pas, vous vous abandonnez aussitôt à la douleur, aux disputes et aux imprécations. Encore