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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/380

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élever les uns contre les autres. « Quiconque s’humiliera sera exalté » (Mt. 23,12), dit Jésus-Christ. Et encore : « Que celui qui veut devenir le plus grand de tous, soit le serviteur de tous ». (Mc. 10,43) Voilà ce qui est écrit : « Afin que nul par attachement pour quelqu’un ne s’élève contre un autre ». Laissant de nouveau les maîtres de côté, il se tourne contre les disciples ; car c’étaient eux qui exaltaient les maîtres. D’ailleurs les chefs n’eussent pas facilement accueilli ce langage, parce qu’ils ambitionnaient la gloire du dehors, aveuglés qu’ils étaient par cette maladie ; mais les disciples étrangers à cette gloire, et se contentant de la procurer aux autres, étaient mieux disposés que leurs chefs à recevoir la réprimande et à se guérir. C’est donc encore de l’enflure de se glorifier pour un autre, même en dehors de ses propres intérêts. Car comme celui qui est fier des richesses des autres, cède à un sentiment d’orgueil ; ainsi en est-il de celui qui se pavane de la gloire d’autrui. Et c’est ce que Paul appelle avec raison enflure.
Quand donc un membre s’élève, c’est qu’il y a inflammation et maladie ; car il resterait au niveau des autres, s’il n’était enflé. Ainsi dans le corps de l’Église, celui qui s’enflamme et s’enfle, est malade ; il dépasse la mesure commune. C’est en cela que consiste l’enflure. Il en arrive ainsi dans le corps, quand quelque humeur étrangère et maligne s’y introduit, et non la nourriture ordinaire. De même, l’orgueil naît quand des pensées étrangères nous envahissent. Et voyez avec quelle justesse il dit : « Ne vous enflez pas ! » En effet, l’homme enflé a comme une tumeur d’esprit, remplie d’une humeur corrompue. Il dit cela non pour empêcher la guérison, mais une guérison qui pourrait tourner à mal. Vous voulez guérir un tel ? Je le veux bien ; mais que ce ne soit pas au détriment d’un autre. Car ce n’est pas pour nous exciter les uns contre les autres qu’on nous a donné des maîtres, mais pour nous unir mutuellement. On donne un général à une armée, pour qu’il réunisse en un seul corps des membrés divisés ; s’il y apportait la division, il serait moins un général qu’un ennemi. « Car qui vous distingue ? et qu’avez-vous que vous n’ayez reçu ? » Laissant de côté les disciples, il s’adresse aux docteurs. Voici ce qu’il veut dire : Comment savez-vous que vous êtes dignes d’éloges ? Le jugement a-t-il eu lieu ? A-t-on fait l’examen ? Y a-t-il eu épreuve, enquête sévère ? Vous ne sauriez le dire. Et quand même les hommes donneraient leur suffrage, leur jugement n’est pas droit, Mais supposons que vous êtes dignes de louange, que vous avez réellement la grâce, que le jugement des hommes est sain ; eh bien ! ce n’est pas encore le cas de vous enorgueillir. Car vous n’avez rien de vous-mêmes, mais vous avez tout reçu de Dieu. Pourquoi faites-vous semblant d’avoir ce que vous n’avez pas ? Que si vous l’avez, les autres l’ont avec vous. Vous n’avez donc qu’après avoir reçu, non pas seulement ceci ou cela, mais tout ce que vous avez.
2. En effet ; vos bonnes actions ne sont pas à vous, mais viennent de la grâce de Dieu. Si vous parlez de la foi, elle est le fruit de la vocation ; si vous parlez de la rémission des péchés, des dons de la grâce, de l’enseignement de la parole, des vertus ; tout vous est venu de la même source. Qu’avez-vous donc, dites-moi, que vous n’ayez pas reçu et que vous ayez acquis par vous-mêmes ? Vous ne pouvez répondre. Quoi l vous l’avez reçu, et vous vous en enorgueillissez ? Il fallait au contraire vous en humilier ; puisque le don n’est pas à vous, mais à celui qui vous l’a fait. Si vous avez reçu, c’est donc de lui ; si vous avez reçu de lui, ce que vous avez reçu n’est donc pas à vous ; si ce que vous avez reçu n’est pas à vous, pourquoi vous en glorifiez-vous ; comme si c’était à vous ? Aussi l’apôtre ajoute-t-il : « Que si vous l’avez reçu, pourquoi vous en glorifiez-vous, comme si vous ne l’aviez pas reçu ? » Après avoir prouvé son sujet en passant, il fait voir qu’il leur manque bien des choses ; et il ajoute : Certainement quand même vous auriez tout reçu, vous ne devriez point vous en glorifier, car rien ne serait à vous ; mais il vous manque encore bien des choses. Il l’avait déjà insinué dès le commencement en disant : « Je n’ai vous parler comme à des hommes spirituels » ; et encore : « Je n’ai pas jugé que je fusse parmi vous autre chose que Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié ».
Mais ici il le fait en les couvrant de honte : « Déjà vous êtes rassasiés, déjà vous êtes riches », c’est-à-dire, vous n’avez plus besoin de rien, vous êtes parfaits, vous êtes parvenus au faîte, vous croyez n’avoir plus besoin de personne, ni d’apôtres, ni de maîtres. « Déjà vous êtes rassasiés ». C’est à propos qu’il