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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/382

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bassesse du sujet même de leur orgueil. Car comme il, semblait plus déshonorant d’être fou que de paraître sage, d’être faible que d’être fort, d’être obscur que glorieux et illustre, il leur laisse cependant ce dernier rôle pour prendre le premier ; mais en leur montrant que celui-ci est le meilleur, puisqu’il attire non seulement l’attention des hommes, mais celle de l’assemblée des anges. Car nous n’avons point à lutter contre les hommes, mais contre les puissances spirituelles. (Eph. 6,12) Aussi le spectacle est-il imposant.
« Nous sommes, nous, insensés pour le Christ ; mais vous, vous êtes sages dans le Christ ». II veut encore les faire rougir, en leur montrant qu’il est impossible de réunir les contraires et de rapprocher des choses si éloignées. Comment, en effet, serait-il possible que vous fussiez sages ; et nous insensés, en ce qui regarde le Christ ? Puisque, en effet, les uns étaient battus de verges, méprisés, injuriés, regardés comme rien, tandis que les autres étaient honorés, passaient pour sages et prudents aux yeux de la foule, l’apôtre demande : Comment ceux qui prêchent comme ils font, peuvent-ils être soupçonnés en sens contraire de leur prédication ? « Nous sommes faibles et vous êtes forts », c’est-à-dire, nous sommes chassés, persécutés ; et vous, vous vivez dans l’abondance et êtes servis à souhait. Mais ceci ne s’accommode point au genre de notre prédication.
« Nous sommes méprisés, mais vous êtes glorieux ». Ici il s’adresse aux nobles, qui se pavanaient de la pompe extérieure. « Jusqu’à cette heure nous souffrons et la faim et la soif, la nudité, les mauvais traitements. Nous n’avons pas de demeure stable, et nous nous fatiguons, en travaillant de nos mains ». C’est-à-dire, je ne vous raconte pas des faits anciens, mais des choses dont le temps présent est témoin. Car nous n’avons aucun souci des choses humaines ni de l’éclat du dehors ; nos yeux ne sont fixés que sur Dieu ; ce que nous devons faire en tout temps. Nous n’avons pas seulement les anges pour spectateurs, mais le juge même du combat. Nous n’avons pas besoin d’autres éloges. Ce serait injurier Dieu que de ne pas se contenter de son approbation et de rechercher celle de nos semblables. Ceux qui combattent sur un petit théâtre, peuvent en chercher un plus grand, parce que le premier ne suffit pas au déploiement de leurs forces ; mais ceux qui combattent sous les veux de Dieu et recherchent ensuite le suffrage des hommes, abandonnant ainsi le plus pour avoir le moins, s’attirent de grands châtiments. Car c’est là ce qui a tout bouleversé, ce qui a troublé le monde entier : dans toutes nos actions nous avons les yeux fixés sur les hommes ; dans le bien nous dédaignons l’approbation de Dieu pour capter la renommée et la gloire humaine et dans le mal nous n’avons aucun souci de Dieu et ne redoutons que les hommes.
Mais les hommes, eux aussi, comparaîtront avec nous devant le tribunal, de Dieu, et ne nous serviront de rien ; et c’est le Dieu que nous méprisons qui portera la sentence contre nous. Nous savons cela, et néanmoins nous ne nous occupons que des hommes : voilà notre première faute. Personne ne voudrait commettre la fornication sons le regard de l’homme ; quelle que soif l’ardeur de la passion, elle cède au respect qu’inspire la présence d’un de nos semblables mais sous l’œil de Dieu, non seulement on commet l’adultère et la fornication, mais beaucoup ont osé et osent des crimes bien plus graves. Cela seul ne Suffit-il pas à attirer mille fois la foudre ? Et que parlé-je d’adultère et de fornication ? Nous rougirions de commettre des fautes bien moindres en présence des hommes : nous n’en rougissons pas en présence de Dieu. Voilà l’origine, de tous les maux : c’est que dans ce qui est réellement mal, nous ne craignons pas Dieu ; mais seulement les hommes. Voilà pourquoi nous fuyons les vrais biens, ceux que le vulgaire n’estime point tels, parce que nous n’examinons pas la nature des choses et que nous n’avons en vue que l’opinion humaine.
4. Il en est de même pour le mal. Par l’effet de cette même habitude, nous poursuivons des biens qui n’en sont pas réellement, mais qui paraissent tels à la multitude ; en sorte que nous nous perdons de deux manières. Comme ceci peut paraître obscur à beaucoup d’entre vous, il est nécessaire de l’expliquer plus clairement. Quand il s’agit de commettre la fornication (nous reprenons ici notre sujet), nous craignons plus les hommes que Dieu. Et comme nous nous plaçons sous leur dépendance, que nous les constituons nos maîtres, nous évitons bien des choses qui leur semblent mauvaises et qui ne le sont pas. Ainsi beaucoup regardent la pauvreté comme honteuse ;