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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/385

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désirera voir tous les jours ressembler à celui-ci. Voilà ce qui engendre chez les femmes le goût du luxe et de la dépense, l’indécence, et mille autres vices. Ne m’objectez pas la coutume. Si c’est un mal, il ne faut pas le faire une seule fois ; si c’est un bien, il ne faut jamais le discontinuer. Dites-moi : la fornication est-elle un crime ? Si elle est un crime ; la permettrons-nous une seule fois ? Certainement non. Quand on ne la commettrait qu’une fois, elle serait toujours un crime. Donc, si c’est un mal de procurer à une jeune femme de tels plaisirs, on ne doit pas même le faire une fois ; si ce n’est pas un mal, qu’on le fasse toujours.
6. Mais quoi ! direz-vous, blâmez-vous le mariage ? À Dieu ne plaise que je le blâme je ne suis pas assez fou pour cela. Ce que je blâme, c’est ce qui vient à sa suite, les parfums, le fard, et les autres superfluités de ce genre. Dès ce jour, la jeune mariée s’attirera de nombreux amants, avant même de cohabiter avec son époux. Mais beaucoup admireront sa beauté. Qu’arrivera-t-il alors ? Quand même elle serait chaste, elle aura peiné à échapper aux mauvais soupçons ; si au contraire elle se néglige, elle tombera vite dans le piège, initiée dès ce moment aux pensées de libertinage. Nonobstant ces suites fatales, quand le fait n’a pas lieu, des hommes qui ne sont guère au-dessus des animaux, prennent cela pour un affront, et proclament que c’est une indignité, qu’une femme ne soit pas produite en ce jour et exposée aux regards de nombreux spectateurs.
Et c’est ce fait lui-même qu’il fallait envisager comme injurieux ; ridicule et comique. Et je sais que c’est nous que beaucoup traiteront d’insensé et de ridicule ; mais je consentirai à être tourné en dérision, s’il en résulte quelque profit. Je serais seulement ridicule si, en vous exhortant à mépriser l’opinion populaire, j’étais moi-même atteint de cette maladie. Voyez maintenant ce qui suit : non seulement pendant le jour, mais pendant la nuit, ce sont des hommes ivres, a moitié endormis, enflammés par la volupté, qui se disposent à contempler la beauté du visage de la jeune femme. Et ce n’est pas à la maison, mais à travers les rues qu’ils la présentent en spectacle, l’accompagnant jusqu’à une heure très avancée ; avec des flambeaux, afin que chacun puisse la voir ce qui ne tend qu’à lui faire dépouiller pour l’avenir un reste de pudeur. Et on ne s’en tient pas là : on la conduit au milieu de paroles obscènes, usage qui est passé en loi dans la foule. Et des milliers d’esclaves fugitifs, de vauriens, d’hommes perdus, profèrent librement tout ce que le caprice Mur inspire, et contre elle et contre l’époux qui doit habiter avec elle ; en tout cela il n’y a rien d’honnête, mais tout y sent l’obscénité. La mariée qui voit et entend tout cela, ne reçoit-elle pas une belle leçon de chasteté ? Et il y a une émulation diabolique entre les acteurs ; c’est à qui l’emportera sur les autres en paroles injurieuses et impudiques, propres à faire rougir les spectateurs ; et en fin de compte, la victoire appartient à celui qui a vomi le plus de turpitudes et d’impudicités.
Je sais que je suis ennuyeux, odieux et importun pour vouloir retrancher ce plaisir de la vie. Aussi je m’attriste en voyant que des choses aussi désagréables puissent passer pour un plaisir. Comment, en effet, ne serait-il pas désagréable d’êtres accablé d’injures et d’affronts, d’être insulté par la foule en compagnie d’une jeune femme ? Quoi ! si quelqu’un injurie votre épouse sur la place publique, vous mettez tout en mouvement, vous croyez ne pouvoir plus jouir de la vie ; et quand vous vous conduisez honteusement avec elle sous les yeux de toute une ville, vous vous en réjouissez, ions en êtes fier ? Quelle folie ! Affaire d’habitude, direz-vous. Eh ! voilà justement ce qui doit faire verser des larmes, que le démon ait fait passer cela en habitude. Comme le mariage est une chose honorable, destinée à là propagation de notre espèce, et une source de, grands biens, ce méchant esprit en ressent un vif chagrin, et sachant qu’il est un remède contre la fornication, il prend d’autres moyens pour introduire toute espèce d’impudicités. Beaucoup de jeunes filles ont été déshonorées dans ces assemblées. Si cela n’arrive pas toujours, le démon se contente, en attendant, que des paroles et des chants obscènes aient déshonoré l’épouse à travers les rues et les places publiques. Et comme tout se passe le soir, de peur que la nuit ne voile ces turpitudes, on allume de nombreux flambeaux qui les mettent, dans tout leur jour. Car pourquoi cette foule ? pourquoi l’ivresse ? pourquoi des instruments de musique ? N’est-ce pas évidemment pour que ceux qui sont chez eux ensevelis dans le sommeil soient avertis, s’éveillent