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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/395

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Timothée », il n’ajoute pas tout d’abord : « Je viendrai » ; mais il commence par les accuser de s’enfler en eux-mêmes, puis il dit : « Je viendrai ». Si cette parole avait précédé l’accusation, il eût eu l’air de s’excuser comme s’il n’eût pas été abandonné ; ce n’eût pas été une menace, et on n’y aurait pas ajouté foi ; mais comme elle suit l’accusation ; elle le rend digne de foi et terrible. Et voyez sa fermeté et son assurance ! Il ne dit pas seulement : « Je viendrai » ; mais : « Si le Seigneur le veut », et il ne détermine pas le temps. Car comme pouvait réprouver du retard, il veut que l’incertitude les tienne en suspens et en crainte. Mais de peur qu’ils ne tombent dans d’abattement, il ajoute : « Bientôt ».
« Et je connaîtrai non quel est le langage de ceux qui sont pleins d’eux-mêmes, mais quelle est leur vertu ». Il ne dit pas je connaîtrai la sagesse ni les signes ; que dit-il donc ? « Non quel est le langage », abaissant l’un, et relevant l’autre. Et en attendant, il s’adresse à ceux qui prenaient le parti de l’incestueux. Si, en effet, il se fût adressé à celui-ci, il n’aurait pas dit « vertu », mais œuvres lesquelles étaient perverses chez lui. Et pourquoi ne vous inquiétez-vous pas de l’éloquence ? Ce n’est pas que j’en sois dépourvu, mais, pour nous, tout consiste dans la vertu. Comme dans les combats, le succès n’est pas pour ceux qui parlent beaucoup, mais pour ceux qui agissent ; de même ici la victoire n’est point le résultat des paroles, mais des œuvres. C’est leur dire : vous êtes fier de votre éloquence ; s’il s’agissait maintenant d’un combat de rhéteurs ; vous auriez raison d’être content de vous ; mais si c’est une lutte d’apôtres prêchant la vérité et la confirmant par des miracles, pourquoi vous enfler d’une chose superflue qui n’est rien ; qui ne peut servir à rien dans l’état présent ? Qu’est-ce, en effet, qu’une vaine parade de mots pour ressusciter un dort, chasser les démons, ou opérer fout autre prodige ? Or, c’est là ce qu’il faut maintenant, c’est par là que notre œuvre s’accomplit. Aussi ajoute-t-il : « Car ce n’est pas dans les paroles que consiste le royaume de Dieu, mais dans la vertu ». C’est-à-dire : Ce n’est pas par les paroles que nous avons vaincu, mais par les signes ; et parce que notre enseignement est divin, parce que nous annonçons le royaume des cieux, et que nous donnons pour preuve principale les miracles que nous faisons par la vertu de l’Esprit. Si donc ceux qui s’enflent maintenant veulent être grands, qu’ils fassent voir cette vertu ; quand je serai arrivé, qu’ils ne m’offrent pas une vaine pompe de langage : cet art est pour nous sans valeur.
« Que voulez-vous ? que je vienne à vous avec une verge, ou avec charité et mansuétude ? » Ces paroles sont tout à la fois effrayantes et pleines, de douceur. Dire : « Je connaîtrai » ; c’était se contenir ; mais dire : « Que voulez-vous? que je vienne à vous avec une verge ? » c’est monter sur sa chaire de docteur, parler delà et prendre toute l’autorité. Qu’est-ce que cela veut dire : « Avec une verge ? » C’est-à-dire : avec la punition, avec le châtiment ; c’est-à-dire : je tuerai, je frapperai de cécité ; ce que Pierre a déjà fait à Saphire, et lui-même à Elymas le magicien. Maintenant il ne parle plus comme se mettant à leur niveau, mais d’un ton d’autorité. Dans sa seconde lettre, il parle de la même manière quand il dit : « Est-ce que vous voulez éprouver celui qui parle en moi, le Christ ? » (2Cor. 13,3) « Que je vienne avec une verge ou avec charité ». Quoi ! cette verge ne serait-elle pas celle de la charité ? Certainement si ; mais il parle de la sorte parce que la charité ne se résout qu’avec peine à punir. Quand il s’agit de châtiment il ne dit plus : En esprit de douceur, mais : « avec une verge ». Et pourtant tout se faisait dans l’Esprit, qui est tout à la fois un Esprit de douceur et un Esprit de sévérité ; mais il ne l’appelle pas ainsi et préfère lui donner un nom plus doux. C’est pour cela que Dieu, bien qu’il punisse, est appelé souvent miséricordieux, patient, riche en pitié et en miséricordes ; et c’est à peine si, une fois sur deux, rarement au moins, on dit qu’il punit, et encore ne le dit-on que dans l’occasion et par nécessité. Et voyez la sagesse de Paul. Il a l’autorité, et pourtant il leur laisse le choix, disant : « Que voulez-vous ? » La chose est en votre pouvoir. Et en réalité il dépend de nous de tomber en enfer ou d’obtenir le royaume du ciel ; ainsi Dieu l’a voulu. « Voilà l’eau et le feu ; étendez à votre choix la main vers l’un ou l’autre ». (Sir. 15,16) Et encore : « Si vous le voulez, et si vous m’écoutez, vous mangerez les biens de la terre ». (Is. 1,19)
3. Quelqu’un dira peut-être : Je le veux. Au fait, personne n’est assez insensé pour ne pas