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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/407

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va dire tout à l’heure sur les idolâtres. « Ou avare ». Il va combattre ce vice ; aussi dit-il : « Pourquoi ne supportez-vous pas plutôt d’être lésés ? Pourquoi ne soutirez-vous pas d’être dépouillés ? Mais vous-mêmes vous lésez, vous dépouillez ». – « Ou ivrogne ». Plus bas il accuse aussi ce vice quand il dit : « L’un a faim, et l’autre est ivre » (Ch. 11,21) ; et encore « Les aliments sont pour l’estomac et l’estomac a pour les aliments (Ch. 6,13). Ou médisant ou rapace ». Il en a déjà parlé plus haut avec blâme. Ensuite il donne la raison pour laquelle il n’empêche point d’avoir des rapports avec les étrangers entachés de ces vices : C’est que non seulement cela n’est pas possible, mais que ce serait inutile. « En effet, m’appartient-il de juger ceux qui sont dehors ? »
Il appelle chrétiens ceux qui sont dedans, et grecs ceux qui sont dehors. C’est ainsi qu’il dit ailleurs : « Il faut aussi qu’il ait un bon témoignage de ceux qui sont, dehors ». Et dans l’épître aux Thessaloniciens, il répète dans les mêmes termes : « N’ayez point de commerce avec lui, afin qu’il soit couvert de confusion. Cependant ne le regardez pas a comme un ennemi, mais reprenez-le comme un frère ». Cette fois il ne donne pas de motif. Pourquoi ? Parce que là il voulait consoler, et ici, non. Là, la faute n’était pas la même, elle était moindre ; il n’accusait que d’oisiveté ; ici il s’agit de fornication et d’autres fautes plus graves. Si on veut passer chez les grecs, il ne défend pas d’y manger, et pour la même raison. Nous agissons encore de même, faisant tout pour nos fils et nos frères, et tenant peu de compte des étrangers. Quoi donc ? Paul avait-il aucun souci de ceux du dehors ? Il en avait, mais il ne leur donnait des lois qu’après qu’ils avaient reçu la prédication et s’étaient soumis à la doctrine du Christ ; mais tant qu’ils la méprisaient, il était inutile de donner des ordres à des hommes qui ne connaissaient pas même le Christ. « Et ceux qui sont dedans, n’est-ce pas vous qui les jugez ? Mais ceux qui sont dehors, c’est Dieu qui les jugera ». Après avoir dit : « M’appartient-il de juger ceux qui sont dehors, ? » De peur qu’on ne s’imaginât qu’ils resteraient impunis, il les livre à un autre tribunal terrible. Son but, en disant cela, est d’effrayer les uns et de consoler les autres, et de montrer que cette punition temporelle délivre du châtiment éternel ; ce qu’il affirme encore ailleurs, quand il dit : « Nous sommes jugés et châtiés maintenant, afin de ne pas être condamnés avec ce monde » (Id. 11,32) ; et encore : « Faites disparaître le coupable du milieu de vous ». (Deut. 17,7)
2. Il rappelle ce qui était dit dans l’Ancien Testament, et en même temps il leur fait voir qu’ils gagneront beaucoup à se délivrer, pour ainsi dire, d’un terrible fléau ; et encore que ceci n’est point une innovation, puisque déjà autrefois le législateur avait prescrit de retrancher ces coupables ; mais alors on procédait avec plus de sévérité, aujourd’hui on agit avec plus de douceur. On pourrait demander en effet pourquoi il était permis de punir et de lapider celui qui avait commis la faute, tandis qu’ici on l’invite seulement à faire pénitence. Pourquoi des procédés si différents ? Il y a à cela deux raisons : la première, c’est que les chrétiens étaient conduits à des combats plus grands, et qu’ils avaient besoin de plus de patience et de courage ; la seconde et la plus vraie, c’est que l’impunité les corrigeait plus facilement en les amenant à la pénitence ; tandis qu’elle rendait les Juifs plus méchants. Si en effet après avoir vu le châtiment des premiers coupables, ceux-ci n’en persévéraient pas moins dans les mêmes péchés ; à combien plus forte raisonne l’eussent-ils pas fait, si personne n’eût été puni ? Aussi, sous la loi ancienne, l’adultère et l’homicide étaient-ils immédiatement frappés de mort ; mais sous la nouvelle, s’ils se lavent par la pénitence, ils échappent au châtiment. Toutefois on peut voir des peines plus sévères dans la nouvelle loi et de plus douces dans l’ancienne ; ce, qui prouve qu’un lien de parenté unit les deux Testaments, et qu’ils sont tous les deux l’œuvre d’un seul et même législateur ; que dans l’un et l’autre le supplice suit, qu’il tarde souvent beaucoup, souvent aussi très peu, mais que toujours Dieu se contente du repentir. En effet, dans l’Ancien Testament, David, adultère et homicide, est épargné ; et, dans le Nouveau, Ananie, pour avoir soustrait une partie du prix de son champ, est frappé de mort avec sa femme. Que si ces derniers exemples abondent dans l’Ancien Testament et sont rares dans le Nouveau, la différence des personnes explique la différence de conduite.
« Quelqu’un de vous, ayant avec un autre un différend, ose l’appeler en jugement devant les injustes ; et non devant les saints ? »