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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/410

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même chose de commettre un péché contre le premier venu ou contre un membre de sa famille. Car en ce dernier cas, l’audace est bien plus grande : Là, on n’outrage que la nature des choses ; ici, on manque à la dignité même de la personne. Après les avoir ainsi fait rougir par les motifs ordinaires et, plus haut déjà, enl eur mettant les récompenses sous les yeux, il conclut son exhortation par la menace, et prenant un ton plus violent : « Ne savez-vous pas », leur dit-il, « que les injustes ne posséderont pas le royaume de Dieu ? ne vous abusez point ni les fornicateurs, ni les idolâtres ; ni les adultères, ni les efféminés, ni les abominables, ni les avares, ni les voleurs, ni les ivrognes, ni les médisants, ni les ravisseurs ne posséderont le royaume de Dieu ».
Que dites-vous, Paul ? à propos des avares, vous faites passer devant nous cette longue chine de prévaricateurs ? Oui, répond-il, mais je ne confonds rien et je procède par ordre. Comme à propos des fornicateurs, il a fait mention de tous les autres ; ainsi fait-il encore à l’occasion des avares, pour accoutumer aux reproches ceux qui se sentent coupables de telles iniquités. À force d’avoir entendu parler du châtiment réservé aux autres, on est plus disposé à s’entendre adresser des reproches, quand il faudra travailler à combattre son défaut personnel. Et s’il menace, ce n’est point parce qu’il sait qu’ils le méritent, ni pour leur faire des reproches : mais rien n’est plus propre à retenir et à contenir l’auditeur qu’un discours qui ne s’adresse point à lui directement, n’a pas de but déterminé et remue secrètement sa conscience. « Ne vous abusez point ». Ceci insinue que certaines personnes disaient alors ce que beaucoup disent aujourd’hui Dieu est clément et bon, il ne se venge pas des péchés : ne craignons rien ; il ne punira personne de quoi que ce soit. Voilà pourquoi il dit : « Ne vous abusez pas ». Car c’est une erreur extrême et une illusion d’espérer le bien et d’obtenir le mal, et de supposer en Dieu ce qu’on n’oserait pas même penser d’un homme. Aussi le prophète nous dit-il en son propre nom. « Tu as songé à mal, t’imaginant que je te ressemble : je te confondrai et je te mettrai tes iniquités sous les yeux ». (Ps. 49) Et Paul dit ici : « Ne vous abusez point : ni les fornicateurs (il place au premier rang celui qui avait déjà été condamné), ni les adultères, ni les efféminés, ni, les ivrognes ; ni les médisants ne posséderont le royaume de Dieu ». Beaucoup ont blâmé ce passage comme trop dur, parce qu’il met l’ivrogne et le médisant au même niveau que l’adultère, le libertin et le sodomite. Or ces crimes ne sont pas égaux : comment leur châtiment peut-il l’être ? À cela que répondrons-nous ? que l’ivrognerie et la médisance ne sont pas choses de peu d’importance : puisque le Christ a jugé digne de l’enfer celui qui traite son frère de fou. Souvent la mort en a été la suite, et l’ivresse a fait commettre de très graves péchés aux Juifs. Ensuite nous dirons que l’apôtre ne parle pas ici de châtiment, mais d’exclusion du royaume. L’un et l’autre sont donc également exclus. Mais qu’il y ait une différence dans le supplice de l’enfer, ce n’est pas ici le lieu de traiter cette question, car ce n’est point là notre sujet. « C’est ce que quelques-uns de vous ont été ; mais vous avez été lavés, mais de quels maux Dieu vous a délivrés, quelle bonté il vous a témoignée et prouvée par des faits ; il ne s’est pas contenté de vous délivrer, il a poussé la bienfaisance beaucoup plus loin, il vous a purifiés. Est-ce tout ? non : il vous a sanctifiés, et non seulement sanctifiés ; mais justifiés. Cependant vous délivrer de vos péchés, c’était déjà un grand don ; et il y a ajouté d’innombrables bienfaits. Et tout cela s’est fait « au nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ », non en celui-ci ou en celui-là, mais « dans l’esprit de notre Dieu ». Instruits de ces vérités, songeons, mes bien-aimés, à la grandeur du bienfait que nous avons reçu, persévérons dans une vie sage et régulière, restons exempts de tous les vices que nous avons énumérés,.fuyons les tribunaux profanes et conservons soigneusement la noblesse que nous tenons de la libéralité de Dieu. Comprenez quelle honte c’est pour vous d’être jugés par un grec.
5. Mais, direz-vous, si le fidèle est un juge inique ? Pourquoi le serait-il, je vous le demande ? Selon quelles lois juge le grec ? selon quelles lois juge le chrétien ? N’est-il pas clair que le premier juge selon les lois des hommes ; et le second selon les lois de Dieu ? C’est donc ici qu’on trouvera plutôt la justice, puisque