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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/416

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animale ? Qu’est-ce que le blé ? Ne jette-t-on pas simplement le grain dans la terre ? Une fois jeté, n’y pourrit-il pas ? D’où viennent les épis, les barbes, les chaumes et tout le reste ? Un petit pépin de figue tombant en terre ne produit-il pas souvent des racines, des branches et des fruits ? Vous admettez tout cela sans en rechercher curieusement la cause, et vous ne demandez compte à Dieu que de la transformation de nos corps ? Est-ce pardonnable ?
3. C’est aux Grecs que nous faisons ces raisonnements et d’autres de ce genre ; quant à ceux qui suivent les Écritures, ils n’ont pas même besoin qu’on en parle. Si, en effet, vous voulez soumettre toutes les œuvres de Dieu à une enquête, en quoi Dieu est-il au-dessus de l’homme ? Et encore y a-t-il peu d’hommes avec qui nous agissions ainsi. Si donc il est des hommes avec qui nous nous dispensons de ces recherches curieuses, à bien plus forte raison ne devons-nous point scruter la sagesse de Dieu ni lui demander de compte : d’abord parce que celui qui a parlé est digne de foi ; ensuite parce que le sujet même n’admet pas l’action du raisonnement. Car Dieu n’est pas tellement pauvre qu’il ne puisse faire que des choses accessibles à votre faible intelligence. Si vous ne comprenez pas même l’œuvre d’un artisan, beaucoup moins comprendrez-vous celle de l’Ouvrier par excellence. Ne rejetez donc point le dogme de la résurrection, autrement vous serez bien loin des espérances à venir. Mais où est donc la sagesse, ou plutôt l’immense folie de nos contradicteurs ? Ils demandent : Comment un, corps peut-il ressusciter quand il a été mêlé à la terre, qu’il est devenu terré et que cette terre elle-même a été déplacée ? Cela vous semble impossible, mais non à celui dont l’œil ne dort pas ; car tout est à découvert devant lui. Vous ne voyez pas la distinction qui subsiste dans la confusion ; mais lui voit tout ; vous ne savez pas ce qui se passe dans le cœur de votre prochain, et lui le sait.
Si vous ne croyez pas que Dieu ressuscite, parce que vous ne comprenez pas comment il ressuscite, vous ne croirez pas non plus qu’il lit dans les cœurs, car ce sont dès choses cachées. Et encore même dans un corps dissous reste-t-il une matière visible, tandis que les pensées sont invisibles. Et celui qui voit parfaitement les choses invisibles, ne verra pas les choses visibles et ne pourra facilement discerner un corps ? Chacun sent qu’il le peut. Ne rejetez donc point la résurrection : car c’est une suggestion diabolique. Et le démon n’a pas seulement en vue de détruire la foi à la résurrection, mais encore de détruire et d’anéantir les œuvres de la vertu. En effet, l’homme qui ne s’attend pas à ressusciter et à rendre compte de ces actions, ne se pressera guère de pratiquer la vertu ; et, en retour, celui qui ne pratique pas la vertu, ne croira pas à la résurrection : car ce sont deux choses qui s’engendrent mutuellement : le vice par l’incrédulité, et l’incrédulité par le vice. Une conscience chargée de nombreuses iniquités, inquiète, redoutant la vengeance future et ne voulant pas se rassurer elle-même par le changement de vie, cherche le repos dans l’incrédulité. Et quand vous niez la résurrection et le jugement, ce pécheur dira : Je ne rendrai donc pas compte de mes crimes ? Que dit cependant le Christ ? « Vous êtes dans l’erreur, ne connaissant ni les Écritures ni la puissance de Dieu ». (Mt. 22,29) Dieu n’aurait pas tant fait s’il n’avait dû nous ressusciter, mais seulement nous détruire et nous réduire à néant ; il n’eût point étendu cette vaste voûte du ciel sur nos têtes, ni étalé la terre comme un tapis sous nos pieds, il n’eût point créé tant de choses pour une si courte vie que la nôtre. Et s’il a l’ait tout cela pour la vie présente, que ne fera-t-il pas pour la vie future ?
Mais si la vie future n’existe pas, nous sommés bien au-dessous des objets créés pour nous. En effet, le ciel, la terre, la mer, les fleuves, certains animaux mêmes, durent plus que nous ; car la corneille, la race des éléphants et beaucoup d’autres encore, jouissent plus longtemps de la vie présente. Pour nous l’existence est courte et pénible, pour eux elle, est longue et bien plus exempte de chagrin et de soucis. Comment, de grâce, le Créateur a-t-il plus favorisé le serviteur que le maître ? Je vous en conjure, ne raisonnez pas ainsi : ne soyez pas, ô homme ! dénué d’intelligence, et puisque vous avez un tel Maître, ne méconnaissez pas ses richesses. Au commencement Dieu a voulu vous faire immortel, et vous ne l’avez pas voulu. Car c’étaient des indices d’immortalité, ces entretiens familiers avec Dieu, cette vie paisible, cette exemption de chagrin, de soucis, de travaux et des autres accidents du temps. Adam n’avait pas besoin