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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/420

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pourquoi parlez-vous ainsi ? On pourrait vous dire qu’il fallait nous proposer un autre motif, en nous montrant que nous avons un maître. Mais ce motif nous serait commun avec les gentils, tandis que celui-ci : « Vous avez été achetés à haut prix », nous est particulier. Ici l’apôtre nous rappelle la grandeur du bienfait et la manière dont nous avons été sauvés ; il nous fait voir que nous étions en mains étrangères et que nous avons été achetés, non pas pour rien, mais à haut prix. « Glorifiez et portez donc Dieu dans votre corps et dans « votre esprit ». Par là il nous exhorte non seulement à éviter la fornication dans notre corps, mais à n’admettre aucune mauvaise pensée dans notre esprit et à ne point éloigner la grâce. « Qui sont à Dieu ». Après avoir dit : « Vôtre », il ajoute : « Qui sont à Dieu », nous rappelant continuellement que tout appartient au Maître, corps, âme, esprit.
Quelques-uns disent que ce mot « en Esprit » signifie en grâce. En effet, si la grâce est en nous, Dieu sera glorifié, et elle y sera, si nous avons le cœur pur. Il affirme que toutes ces choses sont à Dieu, non seulement parce qu’il les a produites, mais encore parce que,.quand elles appartenaient à d’autres, il les a recouvrées au prix du sang de son Fils.
Voyez comme il rattache tout au Christ, comme il nous mène au ciel. Vous êtes les membres du Christ, nous dit-il, vous êtes le temple de l’Esprit ; ne devenez donc pas membres d’une prostituée, car ce n’est pas votre corps que vous déshonorez, mais celui du Christ. Par là il nous fait voir la bonté du Christ, puisque notre corps est le sien, et en même temps il veut nous arracher à un funeste esclavage. En effet, si votre corps appartient à un autre, vous n’avez pas le droit de le déshonorer, surtout s’il appartient au Maître, ni de souiller le temple de l’Esprit. On punirait du dernier supplice celui qui entrerait dans un domicile étranger et s’y livrerait à la débauche ; quel ne sera donc pas le châtiment de celui qui aura fait du temple du roi une maison de voleurs ? Dans cette pensée, respectez l’habitant, qui n’est autre que le Paraclet ; craignez celui qui est lié, adhérent à vous-même, et qui est le Christ. Est-ce vous qui vous êtes fait membre du Christ ? Songez à cela, à qui étaient les membres, à qui ils sont aujourd’hui, et restez chaste. C’étaient auparavant des membres de prostituée, le Christ en a fait les membres de son propre corps. Vous n’en êtes donc plus le maître ; servez celui qui vous a affranchi.
Si vous aviez une fille, et que, par un excès de démence vous l’eussiez livrée à prix d’argent pour en faire une prostituée ; puis que le fils du roi, passant par là, l’arrachât à son esclavage et en fît son épouse ; vous ne seriez plus libre de la reconduire à la maison de débauche, car vous l’auriez livrée, vous l’auriez vendue une fois. Voilà notre cas : nous avions vendu notre chair au démon, à un vil corrupteur ; ce que voyant, le Christ l’a sauvée, l’a délivrée de cette affreuse tyrannie ; elle n’est donc plus à nous, mais à celui qui l’a sauvée. Si vous voulez la traiter comme l’épouse du roi, rien ne vous en empêche ; mais si vous voulez la ramener à son premier état, vous subirez le supplice réservé à ceux qui commettent de tels outrages. Vous devez donc plutôt l’orner que la déshonorer. Car vous n’êtes plus maître d’elle en fait de passions coupables, mais seulement pour l’exécution des ordres de Dieu. Songez de quel déshonneur Dieu l’a délivrée ; il n’est pas de prostituée aussi dégradée que l’était alors notre nature. Les brigandages, les homicides, toute espèce de mauvaises pensées entraient chez elle, et corrompaient l’âme à vil prix, au prix d’un moment de plaisir. Car c’était là tout ce qu’elle gagnait à son honteux commerce avec les mauvaises pensées et les mauvaises actions.
3. Sans doute cette conduite était déjà coupable alors ; mais quel pardon espérer, si l’on se souille maintenant, quand le ciel est ouvert, quand le royaume est promis, après qu’on a participé aux redoutables mystères ? Ne pensez-vous pas que le diable lui-même entretient commerce avec les avares et avec tous ceux que l’apôtre a énumérés ? Et que ces femmes qui se parent pour séduire ont avec lui des rapports impurs ? Qui pourrait dire le contraire ? Que celui qui le nie mette à nu l’âme de ces indécentes créatures, et il verra que le méchant esprit leur est étroitement uni. Car il est difficile, chers auditeurs, oui, il est difficile, et peut-être impossible, que quand le corps est ainsi paré, l’âme le soit aussi ; quand on soigne l’un, il faut qu’on néglige l’autre d’après la nature des choses, le contraire ne peut avoir lieu. Aussi l’apôtre dit-il : « Celui qui s’unit à une prostituée devient un même corps avec elle ; mais celui qui s’attache au