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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/441

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légère consolation et du strict nécessaire en fait de nourriture. Ceci s’adresse à ceux qui veulent tout manger et recueillir tous les fruits. Telle est la loi posée par le Seigneur, quand il a dit : « L’ouvrier mérite sa nourriture ». (Mt. 10,10) non seulement il le prouve par des exemples, mais il fait aussi voir ce que doit être un prêtre. Le prêtre doit avoir le courage du soldat, l’assiduité du laboureur, la vigilance du berger, et, après cela, se contenter du nécessaire.
Après avoir montré par l’exemple des apôtres, puis par des comparaisons tirées de la vie commune, qu’il n’est pas défendu à un maître de recevoir de ses disciples, il passe à un troisième point et dit : « N’est-ce pas selon l’homme que je dis ces choses ? La loi même ne les dit-elle pas ? » Jusqu’ici en effet il n’a point parlé d’après les Écritures, et s’est contenté de s’appuyer sur l’usage commun. Mais ne pensez pas, dit-il, que ce soient là mes seules raisons, ni que je me règle d’après la coutume des hommes, je puis vous montrer que c’est là aussi la volonté de Dieu, et je lis ce commandement dans l’ancienne loi. Voilà pourquoi il procède par interrogation, ce qui a lieu quand la chose est connue et avouée de tous : « N’est-ce pas selon l’homme que je dis ces choses ? » C’est-à-dire : Est-ce que je m’appuie uniquement sur des principes humains ? « La loi même ne le dit-elle pas ? Car il est écrit dans la loi de Moïse : Tu ne lieras pas la bouche au bœuf qui foule les grains ». Et pourquoi rappelle-t-il cela, puisqu’il a l’exemple des prêtres ? C’est pour prouver surabondamment sors sujet. Ensuite pour qu’on ne dise pas : Que nous importe ce qu’on a pu dire des bœufs ? Il entre dans le détail en disant : « Est-ce que Dieu a soin des bœufs ? » Eh quoi ? Dieu n’aurait pas soin des bœufs ? Certainement et il en a soin, mais non au point de faire une loi pour eux. Aussi, s’il n’avait eu quelque chose d’important en vue, à savoir, de porter les Juifs à la bienfaisance et de leur parler de leurs prêtres à l’occasion des animaux, il n’eût pas pris la peine de faire une loi pour empêcher de lier la bouche aux bœufs.
Paul fait encore voir par là autre chose, les grands travaux auxquels les maîtres se livrent et doivent se livrer ; puis une autre chose encore. Laquelle ? Que tout ce qui est écrit dans l’Ancien Testament sur les soins à donner aux animaux, tend surtout à l’instruction des hommes, aussi bien que tout le reste, par exemple ce qu’on dit des divers vêtements, des vignes, des semences, de la terre dont il ne faut point changer la semence[1], de la lèpre, et de toute autre chose. Comme il s’adresse à des esprits encore trop grossiers, il cherche à les élever peu à peu. Et voyez comme il ne donne plus d’autre preuve, vu que la chose est évidente et claire par elle-même. Après avoir dit : « Est-ce que Dieu a soin des bœufs ? » Il ajoute : « N’est-ce pas plutôt uniquement pour nous qu’il dit cela ? » Ce n’est pas sans raison qu’il dit : « Uniquement », pour ne pas laisser chez l’auditeur la moindre place, à la contradiction. Et continuant sa métaphore il dit : « Car c’est pour nous qu’il a été écrit : Que celui qui laboure doit labourer dans l’espérance », c’est-à-dire, que le maître doit recevoir le salaire de ses travaux. « Et celui qui bat le grain dans l’espérance d’y avoir part ». Et voyez sa prudence ! De la semaille il passe à l’aire, pour rappeler encore les travaux des maîtres, qui sèment aussi et battent le grain. Au labour, qui n’offre que le travail et point de fruit, il rattache seulement l’espérance ; mais au battage dans l’aire il accorde un profit, en disant : « Et celui qui bat le grain a l’espérance d’y avoir part ».
4. Puis pour qu’on ne dise pas : Est-ce là le prix de si grands travaux ? il ajoute : « Dans l’espérance », à savoir l’espérance du bien à venir. Car la bouche de ce bœuf qui n’est pas liée ne crie pas autre chose sinon que les maîtres qui travaillent ont droit à une récompense. « Si nous avons semé en vous des biens spirituels, est-ce une grande chose que nous moissonnions de vos biens temporels ? » Voilà encore un quatrième argument pour prouver qu’il faut fournir des aliments. Car après avoir dit : « Qui jamais fait la guerre à ses frais ? » et : « Qui plante une vigne ? » et : « Quel berger paît ? » et parlé du bœuf qui foule le grain dans l’aire ; il produit une autre raison très juste pour prouver qu’ils ont droit à recevoir : c’est que non seulement ils ont travaillé, mais procuré des biens beaucoup plus considérables. Quelle est donc cette raison ? « Si nous avons semé en vous des biens spirituels, est-ce une grande chose que nous

  1. Je suppose que c’est une allusion au texte de Lévitique, chap. 19,19.