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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/465

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qui arrive, n’est pas de nature à vous nuire, de nature à scandaliser. Car il exprime ces deux pensées : « Tout n’est pas avantageux, tout n’édifie pas ». La première expression regarde l’intérêt personnel ; la seconde l’intérêt des frères. L’expression « n’est pas avantageux », marque la perte encourue par celui qui fait mal ; l’expression « n’édifie pas », marque le scandale dont on est l’occasion pour ses frères. Aussi ajoute-t-il : « Que personne ne cherche sa propre satisfaction », pensée qu’il prouve partout, et dans tout le cours de sa lettre, et dans la lettre aux Romains, quand il dit : « Puisque Jésus-Christ n’a pas cherché à se satisfaire lui-même » (Rom. 15,3) ; et ailleurs encore : « Comme je tâche moi-même à plaire à tous en toutes choses, ne cherchant point ce qui m’est avantageux » (1Cor. 10,33) ; et ici encore, sans toutefois insister sur cette pensée. En effet, plus haut, il a prouvé et démontré abondamment qu’il ne cherche nulle part son intérêt, qu’il s’est fait Juif pour les Juifs ; que pour ceux qui sont sans loi, il s’est montré comme s’il n’avait pas de loi ; qu’il ne s’est pas servi au hasard de sa liberté, de son pouvoir, qu’il a cherché l’intérêt de tous, qu’il s’est fait le serviteur de tous. Ici, il s’arrête, après quelques paroles qui lui suffisent pour rappeler tout ce qu’il a déjà dit. Eh bien donc, pénétrés de ces vérités, nous aussi, mes bien-aimés, veillons à l’intérêt de nos frères, conservons-nous dans l’unité avec eux ; car c’est à cela que nous conduit ce sacrifice redoutable, et plein d’épouvante, qui nous commande la concorde, la ferveur de la charité, afin que, devenus comme des aigles, nous prenions notre essor jusque dans le ciel. « Partout où se trouvera le corps mort, les aigles s’assembleront ». (Mt. 24,28) C’est ainsi qu’il appelle son corps à cause de la mort qu’il a endurée : si ce corps ne fût pas mort, nous ne serions pas ressuscités. Quant aux aigles, c’est pour montrer la sublimité qui convient à quiconque s’approche de ce corps ; celui-là ne doit avoir rien de terrestre, il ne doit ni s’abaisser, ni ramper, mais toujours tendre vers les hauteurs, y prendre son vol, fixer les yeux sur le soleil de justice, avoir la vue perçante ; car c’est le festin des aigles et non des geais. Les aigles iront au-devant de lui, lorsqu’il descendra du ciel ; je désigne par là ceux qui reçoivent dignement son corps, et cela est aussi vrai qu’il est assuré, que ceux qui le reçoivent indignement, subiront les derniers supplices.
4. Si on ne reçoit pas un roi comme une autre personne, et que dis-je d’un roi ? s’il est vrai qu’on ne touche pas avec des mains souillées un vêtement de roi, fût-on même dans un lieu solitaire, seul, loin de tout témoin ; et cependant un vêtement n’est autre chose qu’un tissu filé par des vers ; si vous admirez la pourpre, et cependant ce n’est que le sang d’un poisson mort ; toutefois, nul n’oserait y toucher, avec des mains souillées : eh bien, si l’on n’ose pas toucher, sans précaution, un vêtement d’homme, oserons-nous bien, quand c’est le corps du Dieu de l’univers, le corps immaculé, resplendissant de pureté, uni à cette ineffable nature divine, le corps par lequel nous sommes, par lequel nous vivons, par lequel les portes de la mort ont été brisées, les voûtes du ciel nous sont ouvertes, oserons-nous bien le recevoir avec d’indignes outrages ? Non, je vous en prie, ne soyons pas homicides de nous-mêmes par notre impudence ; soyons saisis d’une sainte horreur, soyons purs en nous approchant de ce corps, et quand vous le verrez exposé à vos yeux, dites-vous à vous-même : c’est à ce corps que je dois de ne glus être terre et cendre, de né plus être captif, mais libre ; c’est par lui que j’espère le ciel, et les biens qui sont là-haut, en réserve pour moi, la vie immortelle, la condition des anges, l’intimité avec le Christ. Ce corps a été cloué sur la croix, ce corps a été déchiré par les fouets, la mort n’en a pas triomphé ; ce corps, attaché à la croix, a fait que le soleil a détourné ses rayons ; c’est par ce corps que le voile du temple a été déchiré, que les rochers se sont fendus, que la terre entière a été ébranlée ; le voilà ce corps qui a été ensanglanté, percé d’une lance d’où ont jailli deux sources salutaires pour le monde, une source de sang, une source d’eau. Voulez-vous d’ailleurs en connaître la vertu, demandez-la à la femme, travaillée d’une perte de sang, qui n’a pas touché ce corps, mais rien que le vêtement ; qui n’a pas touché le vêtement, mais rien que la bordure ; demandez-la à la mer, qui a porté ce corps sur ses flots ; demandez-la au démon lui-même, et dites-lui : D’où te vient cette plaie incurable ? d’où vient que te voilà sans pouvoir ? d’où vient que tu es captif ? qui t’a saisi pendant que tu