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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/47

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Pourquoi ces faits miraculeux qui éclataient du temps des apôtres et dont nous sommes privés, aujourd’hui ? Cependant c’est toujours le même Dieu, le même nom ; et les effets ne sont pas les mêmes. Pourquoi cela ? Parce que les apôtres ne l’appelaient qu’à propos de leur prédication. Mais nous l’appelons pour des choses toutes différentes. Si c’est parce qu’on ne vous croit pas que vous jurez, dites simplement : « Croyez-moi » ; ou, si vous voulez, jurez par vous-même. Je ne dis pas cela, à Dieu ne plaise ! pour faire une loi opposée à celle du Christ, qui nous commande de ne dire que « oui, oui, non, non », je le dis par condescendance, pour vous induire à quelque chose de beaucoup moins grief, et pour vous affranchir d’une habitude tyrannique. Que de chrétiens recommandables à tout autre égard se sont perdus par ce seul vice ! Voulez-vous savoir pourquoi l’on permettait le serment aux anciens ? (Le parjure leur était défendu) ; c’est parce qu’ils juraient par les idoles.
N’avez-vous pas honte d’être encore régis par les mêmes lois qui servaient à conduire ces hommes faibles ? Lorsque j’entreprends de convertir un païen, je commence par lui faire connaître Jésus-Christ avant de lui enseigner qu’il ne faut pas jurer. Mais si le fidèle qui connaît déjà Jésus-Christ et sa doctrine a toujours besoin de la même condescendance que le païen, quel avantage le fidèle a-t-il sur le païen ? – Mais l’habitude, dites-vous, est une chose fâcheuse ; il est difficile de s’en défaire. – Si telle est1a tyrannie de l’habitude, changez votre mauvaise habitude en une autre contraire. – Et comment est-ce possible ? direz-vous. – Je répète ce que j’ai déjà dit bien des fois : Ayez des moniteurs pour observer vos paroles et les reprendre. Il n’y a aucune honte à être redressé par d’autres ; il y en a bien plutôt à repousser la correction et de le faire au détriment de son salut. Quand il vous arrive de mettre votre vêtement à l’envers, vous permettez même à votre serviteur de vous en avertir, vous n’avez pas honte de recevoir de lui cette espèce de leçon, et cependant c’est un fait qui a bien son ridicule. Et vous aurez honte d’être averti par un autre d’un travers dont votre âme sera affectée ? Vous laisserez votre serviteur arranger votre vêtement, et si quelqu’un veut parer votre âme vous le repousserez ? Quelle folie ! Laissez-vous reprendre par votre serviteur, par votre enfant, par votre ami, par votre parent, par votre voisin. Comme une bête féroce ne peut plus s’échapper quand elle est cernée de toutes parts, de même il faudra que vous vous observiez, lorsque vous serez entouré de tant de gens qui vous surveilleront, vous corrigeront ; vous reprendront. Peut-être supporterez-vous difficilement ce régime pendant un, deux ou trois jours. Mais ensuite la difficulté disparaîtra, et au bout de quatre jours, il n’en sera plus question. Faites-en l’essai si vous ne me croyez pas ; songez-y, je vous en conjure. Le mal à corriger est grave, mais la correction sera d’autant plus fructueuse ; vous avez tout ensemble un grand mal à détruire, un grand bien à conquérir. Puisse le bien se faire, par la grâce et la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, avec qui gloire, empire, honneur, soit au Père, ainsi qu’au Saint-Esprit, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.
Traduit par M. JEANNIN.