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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/480

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femme y est obligée, et c’est justice ; comprenez donc, ô hommes, l’excès de votre faute, lorsque vous, qui êtes honorés d’un si grand pouvoir, vous vous avilissez vous-mêmes, en usurpant le costume de la femme ; c’est comme si vous rejetiez de votre tête un diadème, pour prendre, au lieu de ce diadème, un vêtement d’esclave. « Toutefois, ni l’homme n’est point sans la femme, ni la femme sans l’homme, en Notre-Seigneur (11) ». Après avoir donné à l’homme une grande supériorité, après avoir dit que la femme a été tirée de lui, pour lui, qu’elle lui a été soumise, il craint d’élever l’homme outre mesure, de trop abaisser la femme ; voyez comme il corrige ses paroles : « Toutefois, ni l’homme n’est point sans la femme, ni la femme sans l’homme, en Notre-Seigneur ». Gardez-vous de ne voir que le commencement, de ne considérer que la première formation ; si vous examinez ce qui a suivi, chacun des deux est l’auteur de l’autre ; disons mieux, aucun des deux n’est l’auteur de l’autre ; Dieu seul est l’auteur de tous les êtres ; de là ces paroles : « Ni l’homme n’est point sans la femme, ni la femme sans l’homme, en Notre-Seigneur. « Car, comme la femme a été tirée de l’homme, « ainsi l’homme est par le moyen de la femme (12) ». II ne dit pas : Est de la femme, tandis qu’il n’a pas craint de dire encore une fois « La femme à été tirée de l’homme ». Cette prérogative reste entière à l’homme ; à vrai dire, ces œuvres magnifiques ne sont pas de l’homme, mais de Dieu. Aussi l’apôtre ajoute-t-il : « Et tout vient de Dieu ».
Donc, si tout vient de Dieu, si c’est lui qui vous donne ces commandements, obéissez sans contredire. « Jugez vous-mêmes, s’il est bienséant à une femme, de prier Dieu, sans avoir un voile (13) ». Ici encore, il les fait juges de ses paroles ; c’est ce qu’on a vu, à propos des viandes consacrées aux idoles. Il disait alors : « Soyez juges de ce que je dis » ; et ici : « Jugez vous-mêmes ». Il insinue ici une pensée faite pour inspirer la terreur c’est que l’insulte remonte jusqu’à Dieu. Toutefois il ne l’exprime pas en ces termes, il ne la dégage pas, il se contente de dire : « S’il est bienséant à une femme de prier Dieu, sans avoir un voile. La seule nature ne vous enseigne-t-elle pas qu’il serait honteux, à un homme, de laisser croître sa chevelure, et qu’il est, au contraire, honorable, à une femme, de la laisser croître, parce qu’elle lui a été donnée comme un voile (14, 15) ? » L’apôtre suit ici son habitude ; il tire ses raisonnements, à la portée de tous, des usages les plus ordinaires, et sa vive réprimande déconcerte les auditeurs, en leur révélant ce que la vie commune aurait dû leur apprendre ; tout ce qu’il leur dit, des barbares mêmes le savent. Remarquez la vivacité de toutes ses expressions : « Tout homme qui prie en s’enveloppant la tête, déshonore sa tête » ; et encore : « S’il est honteux, à une femme, d’avoir les cheveux coupés ou d’être rasée, qu’elle se voile la tête tout à fait » ; et encore, dans le même passage : « Si l’homme laisse croître sa chevelure, il se déshonore ; si la femme laisse croître sa chevelure, elle s’honore, parce qu’elle lui a été donnée comme un voile ».
Eh bien, dira-t-on, si sa chevelure lui a été donnée comme un voile, à quoi bon y ajouter un autre voile ? c’est que la femme ne doit pas confesser sa dépendance uniquement par des signes naturels, elle la doit reconnaître aussi par sa volonté. Tu dois porter un voile que la nature tout d’abord t’a imposé ; joins-y donc l’œuvre de ta volonté, si tu ne veux pas avoir l’air de renvoyer les lois de la nature ; ce serait le comble de l’impudence de prendre à partie, non seulement nous, mais la nature. Aussi Dieu adressait-il ce reproche au peuple Juif : « Tu as égorgé tes fils et tes filles ; c’est là le comble de toutes tes abominations ». (Ez. 16,21) Et Paul, dans son épître aux Romains, réprimandant les abominables, aggrave ses accusations en disant qu’ils ne se sont pas seulement révoltés contre la loi de Dieu, mais contre la nature : « Ils ont changé l’usage qui est selon la nature, en un autre qui est contre la nature ». (Rom. 1,26) L’apôtre use ici du même moyen, il montre qu’il ne révèle ici rien d’inconnu, que les païens ne connaissent que trop ces nouveautés qui sont des révoltes contre la nature. C’est le même genre de preuves qu’employait le Christ, en disant : « Faites donc aux hommes tout ce que vous voulez qu’ils vous fassent » (Mt. 7,12) ; il montrait par là qu’il n’enseignait rien d’étrange. « Si, après cela, quelqu’un aime à contester, ce n’est pas là notre coutume, ni celle de l’Église de Dieu (16) ». C’est aimer les contestations que de résister à ses paroles, ce n’est pas faire preuve de raison :