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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/503

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d’un grand nombre de fidèles, possédant la science, mais incapables d’enseigner, incapables de communiquer aux autres ce qu’ils savaient. « Un autre reçoit le don de la foi » ; il ne s’agit pas de la foi qui regarde les dogmes, mais de la foi des miracles, de laquelle le Christ dit : « Si vous aviez de la foi comme un grain de sénevé, vous diriez à cette montagne : transporte-toi d’ici là, et elle s’y transporterait ». (Mt. 17,19) C’est la foi que demandaient les apôtres : « Augmentez en nous la foi » (Lc. 17,5) ; c’est là la mère des miracles. Le pouvoir des opérations miraculeuses, et la grâce de guérir les maladies, ce n’est pas la même chose : celui qui avait la grâce de guérir les maladies, ne faisait que soigner les malades ; quant à celui qui opérait des miracles, il avait aussi le pouvoir de châtier ; car le pouvoir ne consiste pas seulement à guérir, mais à punir aussi ; c’est ainsi que Paul a frappé de cécité, que Pierre a puni de mort. « Un autre, le don de prophétie ; un autre, le don du discernement des esprits ». Qu’est-ce que cela veut dire, du discernement des esprits ? » C’est deviner quel homme est animé par l’Esprit ; quel homme n’est pas animé par l’Esprit ; quel homme est prophète, quel homme est un imposteur. C’est ce qu’il disait aux Thessaloniciens : « Ne méprisez pas les prophéties ; éprouvez tout, et approuvez ce qui est bon ». Il y avait alors une infection de faux prophètes, le démon faisant tous ses efforts pour substituer le mensonge à la vérité. « Un autre, le don des langues ; un autre ; le don de l’interprétation des langues ». Le premier savait bien ce qu’il disait, mais sans pouvoir l’expliquer à un autre ; celui qui savait interpréter, possédait les deux dons, ou l’un des deux.
4. Or, ce don paraissait considérable, car c’était le premier qu’avaient reçu les apôtres ; et, parmi les Corinthiens, un grand nombre jouissaient de ce privilège ; le don de l’enseignement était moins considéré : voilà pourquoi l’apôtre met celui-ci au premier rang, et le don des langues au dernier. C’est, en effet, pour l’enseignement que le don des langues existe aussi bien que celui de la prophétie et des miracles.
Rien n’égale le don de l’enseignement, et voilà pourquoi l’apôtre disait : « Que les prêtres qui gouvernent bien, soient doublement honorés, principalement ceux qui travaillent à la prédication de la parole et à l’instruction des peuples ». (1Tim. 5,17) Et il écrit à Timothée : « En attendant que je vienne, appliquez-vous à la lecture, à l’exhortation et à l’instruction ; ne négligez pas la grâce qui est en vous ». (1Tim. 4,13-14) Voyez-vous comme il donne, à ce talent, le nom de grâce. Ensuite, la consolation qu’il a déjà proposée, en disant : « Le même Esprit », il la répète ici : « C’est un seul et même Esprit qui opère toutes ces choses, distribuant à chacun ses dons, selon qu’il lui plaît ».
Or, ici, l’apôtre fait plus que consoler ; il ferme encore la bouche aux contradicteurs, lorsqu’il dit : « Distribuant à chacun ses dons, selon qu’il lui plaît ». C’est qu’il faut savoir user de sévérité, il ne faut pas seulement se borner à guérir ; c’est ainsi que, dans l’épître aux Romains, il dit : « Qui êtes-vous pour contester avec Dieu ? » (Rom. 9,20) Il fait de même ici : « Distribuant à chacun « selon qu’il lui plaît », et il montre que ce qui appartient au Père, appartient en même temps à l’Esprit, car, de même qu’en parlant de Dieu, Paul dit : « Il n’y a qu’un même Dieu, qui opère tout en tous » ; de même, en parlant de l’Esprit : « Or, c’est un seul et même Esprit qui opère toutes ces choses ». Mais, dira-t-on, c’est un Esprit mis en mouvement par Dieu ; l’apôtre n’en dit rien nulle part ; c’est vous qui forgez cette idée. En effet, lorsque l’apôtre dit : « Qui opère tout en tous », c’est des hommes qu’il parle, et certes il ne va pas compter l’Esprit parmi les hommes ; vous aurez beau entasser mille extravagances, mille inepties. En effet, si l’apôtre dit : « Par l’Esprit », afin de prévenir l’erreur qui prendrait ce « par » pour une diminution de l’énergie de l’Esprit, qui s’imaginerait que l’Esprit est mis en mouvement, l’apôtre a bien soin d’ajouter. « Que l’Esprit opère », non pas qu’il est mis en mouvement de manière à opérer ; « que l’Esprit opère, selon qu’il lui plaît », non pas selon l’ordre qu’il reçoit. En effet, de même que le Fils dit, en parlant du Père : « Il réveille et vivifie les morts », et semblablement de « lui-même : « Il vivifie ceux qu’il lui plaît » (Jn. 5,21) ; de même, en parlant de l’Esprit, il dit ailleurs, qu’il fait tout avec une souveraine puissance, que rien ne résiste à