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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/51

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apôtres. Car ils n’osaient pas déposer leurs dons dans les mains des apôtres, ils ne les leur présentaient pas avec ostentation, mais ils les mettaient à leurs pieds, les en constituaient dispensateurs et maîtres, afin que tout fût pris dans le trésor commun et non dans le leur. Par là ils n’étaient point exposés à la vaine gloire. S’il en était encore ainsi, nous serions tous, riches et pauvres, bien plus contents, et les riches n’en seraient pas moins heureux que les pauvres. Dépeignons, si cela vous plaît, cet état en paroles et goûtons-en le charme, puisque nous ne pouvons pas le faire en réalité. Ce qui s’est passé alors démontre jusqu’à l’évidence qu’ils ne s’appauvrissaient pas en vendant, mais qu’ils enrichissaient les pauvres.
Traçons donc ce tableau. Supposons que tous vendent ce qui leur appartient, et en mettent le prix en commun ; c’est une simple supposition : que personne ne se trouble, ni riche ni pauvre. Quelle serait, pensez-vous, la quantité de l’or qui se recueillerait ? Je conjecture (car il n’est pas possible d’arriver ici à une parfaite exactitude), que si tous et toutes se dépouillaient de leur argent et livraient leurs terres, leurs propriétés, leurs maisons (je ne parle pas des esclaves, car alors on ne les vendait pas, mais on leur donnait sans doute la liberté), on parviendrait peut-être à la somme d’un million de livres d’or, ou de deux fois, trois fois cette somme. Car, dites-moi, à quel nombre s’élève la population mêlée de cette ville ? Combien y supposez-vous de chrétiens Voulez-vous cent mille, et le reste composé de gentils et de Juifs ? Combien y recueillerait-on de millions de livres d’or ? D’autre part, quel est le nombre des pauvres ? Je ne pense pas qu’il dépasse cinquante mille. Que faudrait-il pour les nourrir chaque 'jour ? S’ils mangeaient en commun, s’ils s’asseyaient à la même table, la dépense ne serait pas énorme. Mais, dites-vous, que ferions-nous quand tout serait dépensé ? Eh ! pensez-vous qu’on en, viendrait jamais à bout ? La grâce de Dieu ne serait-elle pas mille fois plus abondante ? Ne se répandrait-elle pas avec largesse ? Quoi ! n’aurions-nous pas fait de la terre un ciel ? Si parmi trois mille et cinq mille qu’ils étaient alors, on obtint un tel succès que personne ne se plaignait de la pauvreté, à combien plus forte raison n’arriverait-on pas au même résultat dans une si grande multitude ? Et quel étranger refuserait d’y contribuer ? Pour démontrer que la division des richesses amène un surcroît de dépenses et engendre la pauvreté, supposons une maison où il y a dix enfants, un homme et une femme : celle-ci, ouvrière en laine, celui-là apportant ses profits du dehors ; dites-moi, cette famille mangeant en commun et habitant la même maison, dépenserait-elle plus que si elle était divisée ? Il est évident qu’elle dépenserait plus si elle était divisée ; car si ces dix enfants étaient séparés, il faudrait dix maisons, dix tables, dix domestiques, et des revenus en conséquence. Quoi encore ! Là où il y a une multitude de serviteurs, ne vivent-ils pas tous à la même table, afin de diminuer la dépense ? La division entraîne donc toujours une diminution, tandis que l’union et la concorde produisent un accroissement. Ainsi les habitants des monastères vivent comme autrefois les fidèles. Et là, qui meurt de faim ? Qui ne vit pas dans une grande abondance ? Mais aujourd’hui les hommes ont plus peur de cela que de tomber dans une mer sans fond et sans bord. Cependant, si nous avions fait l’expérience de ce genre de vie, nous l’embrasserions sans crainte. Et quelle grâce ne serait-ce pas ? Car si, dans ce temps-là, quand il n’y avait que trois mille, que cinq mille fidèles, quand on avait pour ennemi le monde entier, quand on n’avait de consolation à attendre d’aucun côté, si alors, dis-je, on entra courageusement dans cette voie, à combien plus forte raison ne le pourrait-on pas aujourd’hui, où, par la grâce de Dieu, les fidèles remplissent le monde ? Et dans ce cas combien resterait-il de gentils ? aucun, selon moi ; nous les aurions bientôt tous gagnés et attirés à nous. Oui, si nous entrions dans cette voie, j’ai confiance en Dieu qu’il en serait ainsi. Croyez-moi seulement, et tout réussira comme je le dis ; et si Dieu nous conserve la vie, j’espère que nous embrasserons bientôt cette règle.
4. En attendant, observez et maintenez avec force la loi sur le serment. Que celui qui l’observe dénonce celui qui la viole, qu’il l’accuse et le réprimande vertement. Car le temps fixé approche, où je ferai l’enquête et retrancherai et exclurai le prévaricateur. Puissions-nous n’en découvrir aucun parmi nous ! Puissent tous avoir été fidèles à observer ce pacte spirituel ! Qu’il en soit ici comme à l’armée, où le mot d’ordre distingue le soldat de l’étranger. En réalité, nous sommes maintenant en