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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/55

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chose d’objets consacrés ? « Pourquoi Satan a-t-il rempli ton cœur ? » Mais si Satan est le coupable, pourquoi accuser Ananie ? Parce qu’il a cédé à la puissance de Satan et en a été rempli. Il fallait le corriger, dira-t-on. Mais il ne se serait pas corrigé : celui qui avait eu sous les yeux de tels spectacles et n’en avait tiré aucun profit, se fût encore bien moins amendé par d’autres moyens. Et pourtant on ne pouvait passer légèrement là-dessus ; il fallait retrancher cette gangrène de peur que le corps entier n’en fût infecté. Ici, c’est l’avantage du coupable lui-même, qu’on l’empêche d’aller plus loin dans le mal, et ensuite tous les autres en sont rendus plus vigilants ; dans l’autre supposition, t’eût été le contraire. C’est pourquoi Pierre réprimande d’abord et fait voir que la faute ne lui a point échappé, ensuite il prononce l’arrêt. « Pourquoi », lui dit-il, « as-tu fait cela ? » Tu voulais posséder ? Il fallait conserver dès le commencement et ne pas promettre ; mais maintenant que tu reprends après avoir consacré, c’est commettre un plus grand sacrilège. Celui qui prend le bien d’autrui peut y être poussé par le désir de posséder ce qui ne lui appartient pas ; mais toi, tu pouvais garder le tien. Pourquoi donc consacrer ces choses, et les reprendre ? Tu as agi là avec un souverain mépris. Point de pardon pour ton crime ; il est inexcusable.
Que personne ne se scandalise s’il y a encore aujourd’hui des voleurs sacrilèges. Car, s’il y en avait alors, à plus forte raison y en a-t-il aujourd’hui, que les vices abondent. Accusons-les donc publiquement, afin, que les autres tremblent. Judas était sacrilège ; mais les disciples n’en furent, pas scandalisés. Voyez-vous les maux qu’engendre la passion des richesses ? « Et tous ceux qui entendirent cela furent saisis d’une grande crainte ». Ananie fut puni, les autres en profitèrent ; on avait donc eu raison d’agir ainsi ; quoique d’autres signes eussent précédé celui-ci, jamais la frayeur n’avait été aussi grande. Ainsi se vérifie ce qui est écrit : « Le Seigneur se fera connaître en rendant des jugements ». La même chose était arrivée à l’occasion de l’arche : Oza fut puni, les autres eurent peur. Mais alors le roi, saisi de crainte, éloigna l’arche, tandis qu’ici les autres redoublèrent de vigilance. Vous voyez que Pierre n’appela point Sapphire, mais attendit qu’elle entrât ; et aucun des autres n’avait osé annoncer ce qui était arrivé.
C’était l’effet de la crainte du maître, du respect et de l’obéissance des disciples. « Un espace de trois heures ». Sapphire ne savait rien, aucun de ceux qui étaient là ne l’avait avertie, bien que la nouvelle eût eu le temps de se répandre ; mais ils avaient peur. Aussi l’historien nous dit-il, tout surpris : « Ne sachant pas ce qui s’était passé, elle entra ». Cependant voici qui pouvait faire voir que Pierre connaissait les choses cachées : pourquoi celui qui n’a interrogé personne, vous interroge-t-il ? N’est-ce pas évidemment parce qu’il sait ce qui s’est passé ? Mais un grand aveuglement ne permit pas à Sapphire de dépouiller son intention criminelle ; elle répond avec une grande audace : car elle croyait parler à un homme. C’était une aggravation de leur péché qu’ils l’eussent commis d’un commun consentement et comme en vertu d’un pacte. « Pourquoi vous êtes-vous concertés pour tenter le Saint-Esprit ? Voilà à la porte les pieds de ceux qui ont enseveli votre époux, et qui vont vous emporter ». D’abord, il lui fait sentir sa faute, ensuite il annonce qu’elle subira le même châtiment que son mari, et avec justice, puisqu’elle a commis le même péché. Et comment, direz-vous, « soudain tomba-t-elle à ses pieds et rendit-elle l’âme ? » Parce qu’elle était tout près. Ce fut ainsi qu’ils s’attirèrent leur propre punition. Et comment n’en aurait-on pas été frappé ? Qui n’aurait pas craint l’apôtre ? Qui n’aurait pas été saisi d’admiration ? « Et ils étaient tous réunis dans le portique de Salomon ». D’où il suit qu’ils habitaient dans le temple, et non dans une maison quelconque. Ils ne craignaient plus, du reste, le contact des objets immondes ; mais ils touchaient les morts sans scrupule. Et voyez comme ils sont sévères envers les leurs, tandis qu’ils n’usent point de leur pouvoir à l’égard des étrangers. « Mais le nombre de ceux qui croyaient au Seigneur, hommes et femmes, augmentait tous les jours, en sorte qu’on déposait dans les places publiques les malades sur des lits et des grabats, afin que, quand Pierre viendrait, son ombre au moins couvrît quelqu’un d’entre eux ».
3. La foi de ceux qui approchaient ainsi était grande, plus grande même que du temps du Christ. Pourquoi cela ? A cause de la prédiction que le Christ avait faite. « Celui qui croit en moi fera les œuvres que je fais, il en fera de plus grandes encore », comme