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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/56

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ils demeuraient au même lieu sans en sortir, tous leur apportaient leurs malades sur des lits et des grabats. : c’était prodige de tout côté, et de la part des croyants, et de la part de ceux qui étaient guéris, et de la part de celui qui avait été puni, et par la liberté de leur langage, et par la vertu de ceux dont la foi était affermie : car tout ne reposait pas seulement sur les miracles. En effet, quoique dans leur modestie ils attribuassent tout au Christ, au nom duquel ils – déclaraient agir, cependant c’était aussi l’effet de leur vie et de leur vertu. Et remarquez qu’on ne fixe pas ici le nombre des croyants, mais qu’on l’abandonne aux conjectures du lecteur, tant les progrès de la foi étaient considérables ! Aussi prêchait-on la résurrection avec plus de force : « Personne n’osait se joindre à eux, mais le peuple les exaltait ». L’écrivain parle ainsi pour prouver qu’ils ne paraissaient déjà plus méprisables comme auparavant, et qu’un pêcheur, un simple particulier avait produit cet effet en peu de temps, en un moment.
Ce genre de vie, cette liberté de parole, ces miracles et tout le reste avaient fait de la terre un paradis. On les admirait comme des anges, rien ne les émouvait, ni les railleries, ni les menaces, ni les dangers, et de plus ils étaient extrêmement humains et pleins de sollicitude : ils aidaient les uns de leurs richesses et guérissaient les autres de leurs maladies. « Pourquoi Satan a-t-il rempli ton cœur ? » Pierre, sur le point de punir, s’en justifie et instruit les autres. Car, comme le fait devait paraître très-dur, il exerce envers Ananie et sa femme un jugement terrible. S’il ne les eût pas frappés tous les deux d’un tel châtiment pour une faute impardonnable, quel mépris de Dieu n’en serait pas résulté ! Ce qui prouve que c’était là la raison, c’est qu’il ne les punit pas avant d’avoir démontré la faute. Aussi personne ne gémit, personne ne poussa un cri ; mais tous furent saisis de frayeur. Et non sans raison : car leur foi augmentait, les signes se multipliaient, une grande crainte se répandit parmi les leurs, parce que les choses du dehors nous troublent moins que celles du dedans. Si donc nous sommes unis les uns aux autres, personne ne nous fera la guerre ; mais si, au contraire, nous sommes divisés, tous nos ennemis tomberont sur nous. Voilà pourquoi ils étaient pleins de confiance, se jetaient librement sur la place publique au milieu des ennemis et triomphaient ; ainsi s’accomplissait cette parole : « Régnez au milieu de vos ennemis ». (Ps. 109,2) Et la preuve d’une plus grande vertu, c’est qu’ils opéraient de tels prodiges même en prison, même dans les fers. – Mais si un simple mensonge attirait un si grand châtiment, que sera-ce du parjure ? Bien plus, si une femme, pour avoir simplement dit « oui, tel prix », n’a pu échapper à une si terrible punition, quel supplice sera le vôtre, ô vous qui jurez et vous parjurez ?_ Il est à propos aujourd’hui de démontrer par l’Ancien Testament la gravité du parjure. « La faux volait, large de dix coudées ». (Zac. 5,2) Le vol désigne la rapidité avec laquelle la peine suit le parjure ; la largeur et la longueur de dix coudées indiquent la violence et l’étendue du châtiment ; le vol partant du ciel fait voir que la sentence sort du tribunal céleste ; la forme de faux montre que le supplice est inévitable. Car comme la faux qui tombe sur le cou ne se retire pas d’elle-même, mais reste même quand la tête est abattue ainsi la vengeance qui atteint ceux qui jurent est terrible et ne s’arrête que quand sa tâche est accomplie. Et ne nous rassurons pas si nous échappons au châtiment, bien que nous ayons juré ; car ce délai tourne à notre détriment. À quoi pensez-vous ? Que depuis Ananie et Sapphire, beaucoup ont commis la même faute et n’ont point subi la même peine ? Et vous demandez pourquoi ? Ce n’est pas qu’on leur ait fait grâce, mais ils sont réservés à un plus grand supplice.
4. Ainsi ceux qui pèchent souvent doivent plus craindre quand ils ne sont pas punis que quand ils le sont ; car le délai de la punition et la longanimité de Dieu ne font qu’aggraver leur supplice. Ce n’est donc pas à éviter la punition, mais le péché, que nous devons tendre ; et si la punition ne suit pas le péché, nous n’en devons que trembler davantage. Dites-moi : si vous menaciez votre esclave sans le frapper, quand serait-il plus effrayé, plus disposé à vous abandonner et à fuir ? ne serait-ce pas sous le coup de vos menaces ? Aussi nous exhortons-nous mutuellement à ne pas toujours menacer un serviteur, de peur d’imprimer en son âme une crainte plus vive, d’y jeter un trouble plus grand que si nous le frappions ; du reste ici le mal