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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/556

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XXXVI.==
MES FRÈRES, NE SOYEZ PAS ENFANTS PAR L’ESPRIT, MAIS SOYEZ DES PETITS ENFANTS POUR LE MAL, ET SOYEZ PARFAITS POUR L’ESPRIT. (CHAP. 14, VERS. 20)

ANALYSE.

  • 1 et 2. Le don de prophétie emporte sur le don des langues ; il agit sur le cœur, il attire à Dieu les infidèles.
  • 3. La règle fondamentale du christianisme, c’est d’être utile au prochain en toute chose.
  • 4. Prophétisez les uns après les autres, et non tous ensemble.
  • 5. et 6. De la sainteté de l’Église : combien tout doit y être réglé. – De la réponse que le peuple fait à l’Évêque : Le Seigneur soit avec vous et avec votre esprit ! – Relâchement des chrétiens. – Des vierges, des femmes mariées, des veuves. – Assemblées saintes des fidèles. – Ne point parler dans l’église. – De la folie et de la misère des avares.


1. C’est avec raison qu’après des preuves et des démonstrations nombreuses : il se sert d’un style un peu plus véhément, gourmande ses auditeurs, et emploie un exemple qui s’applique à la circonstance présente. Les enfants, en effet, à la vue des petites choses, ouvrent la bouche, l’admiration les plonge dans la stupeur, mais les grandes ne les frappent point d’admiration. Puis donc que ceux qui ont le don des langues croient tout avoir, quand ce don n’est que le dernier pour les autres, il dit : « Ne soyez ; pas enfants » ; c’est-à-dire, ne soyez pas insensés là où il faut être sage, mais soyez enfants et simples là où sont l’injustice, la vaine gloire, l’orgueil. En effet, celui qui est enfant pour le vice, doit pourtant être prudent. De même que la prudence finie à l’improbité n’a jamais été la prudence, ainsi la simplicité unie à l’imbécillité ne sera jamais la simplicité. Dans la simplicité il faut éviter l’imbécillité, et dans la prudence, le vice et la scélératesse. Comme les remèdes amers ou doux ne sont plus efficaces, s’ils le sont plus qu’il ne faut, ainsi sont la simplicité et la prudence exagérées. C’est pourquoi le Christ ordonnait de-les tempérer toutes les deux, disant : « Soyez prudents comme les serpents, et simples comme les colombes ». (Mt. 10,16) Qu’est-ce d’être de petits enfants pour le mal et le vice ? c’est d’ignorer même ce que c’est que le vice ; c’est ainsi que l’apôtre veut qu’ils soient. Et c’est pourquoi il disait : « Parmi vous on entend parler de la fornication ». (1Cor. 5,1) Il n’a point dit : on s’en rend coupable, mais, ou en entend parler, vous connaissez bien la chose, car vous en avez ouï parler. Il voulait qu’ils fussent hommes et enfants, enfants pour le vice, hommes par la prudence. L’homme est un homme, s’il est encore un petit enfant, mais s’il n’est pas un enfant pour le vice, il n’est pas un homme. Car le scélérat n’est point parfait, c’est un insensé.
Car il est dit dans la loi : Je parlerai à ce peuple en des langues étrangères et inconnues, et, « après cela même », dit le Seigneur, ils ne m’entendront pas. Cela n’est écrit nulle part dans la loi ; mais, je l’ai dit plus haut, il comprend sous le nom de « loi » tout l’Ancien Testament, le livre des prophètes et l’histoire ; sainte. Il appelle en témoignage le prophète Isaïe, rabaissant encore le mérite du don des langues, dans l’intérêt de ses disciples. Ces mots : « après cela même », voulaient dire qu’un pareil miracle aurait dû suffire pour frapper leurs cœurs, et que si après cela ils ne croyaient pas, ils ne pouvaient s’en prendre qu’à eux. Et pourquoi Dieu a-t-il fait cela pour eux, s’ils ne devaient pas croire en lui ? Pour montrer qu’il fait sans cesse ce qu’il doit faire. Donc saint Paul, après avoir démontré, en le comparant au don de prophétie, que le don des langues est un signe