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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/608

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décerné des couronnes qui ne nous étaient pas dues, mais qui sont un présent de sa bonté. « Ainsi, mes frères, demeurez fermes et inébranlables (58) ». Cette exhortation a pour elle la justice et l’à-propos. Point de faiblesse ; point d’hésitation ; ne vous laissez pas abattre, ne vous découragez pas sans motifs. « Travaillez sans cesse à l’œuvre de Dieu » ; c’est-à-dire, à rendre votre vie pure. Il ne dit pas : Faites le bien, mais : « Travaillez sans cesse, pour que le zèle déborde de vos cœurs quand vous vous mettez à l’œuvre, pour que vous fassiez votre devoir et au-delà. « Sachant que votre travail ne sera pas sans récompense en Notre-Seigneur » : Que dis-tu, Paul ? Encore des travaux ? Oui, encore des travaux ; mais des, travaux qui rapportent des couronnes, et qui ont le ciel en perspective. Car autrefois, en laissant derrière lui, le paradis, l’homme a dû souffrir des travaux qui étaient le châtiment de ses fautes ; les travaux dont il s’agit, au contraire, lui promettent les palmes de la vie future. Lorsqu’on se place à un pareil point de vue, lorsqu’on lève les, yeux et qu’on aperçoit les secours qui nous viennent d’en haut, ce ne sont plus là des travaux. Aussi Paul a-t-il dit : Votre travail ne sera pas sans récompense en Notre-Seigneur. Nos premiers travaux étaient un châtiment ; ceux-ci ne sont qu’un acheminement au bonheur qui nous est réservé dans l’autre vie. Il ne faut donc pas nous endormir, mes chers frères. Ce n’est point en nous laissant aller au courant de la paresse et de l’inertie que nous arriverons au royaume des cieux ; ce n’est point en nous abandonnant aux délices d’une vie molle et efféminée. Estimons-nous heureux de pouvoir conquérir un si grand bonheur à force de pénitences, de mortifications, de souffrances sans nombre, de difficultés et de travaux. N’apercevez-vous pas l’intervalle immense qui sépare la terre des cieux, les guerres qui nous menacent, la pente qui entraîne l’homme vers le vice, les précipices dont le péché nous entoure, et les pièges qu’il sème au milieu de notre route ? Pourquoi donc nous créer tant de soucis qui ne nous sont pas imposés par la nature ? Pourquoi nous susciter cette foule d’embarras ? Pourquoi nous charger de tant de fardeaux ? Le Christ n’a-t-il pas voulu nous détourner de tous ces soins en nous disant : « Ne vous inquiétez ni de votre nourriture ni de votre habillement ? » (Mt. 6,25) Or, si nous ne devons nous inquiéter ni de la nourriture qui nous est nécessaire, ni de nos vêtements, à quoi bon cet attirail et ce luxe ? Ceux qui se plongent dans le gouffre de tant de besoins factices ; pourront-ils jamais en sortir ? Est-ce que saint Paul ne vous a pas dit : « Celui qui est enrôlé au service de Dieu, ne s’embarrasse point des affaires de cette vie ? » (2Tim. 2,4) Malgré cela, nous nous plongeons dans les d’élites, nous sommes esclaves de notre ventre, nous nous enivrons, nous nous tourmentons pour des choses qui nous sont étrangères, et nous n’apportons aux choses célestes que l’attention d’une âme molle et efféminée. Ne savez-vous pas que la récompense qui vous est promise est une récompense plus qu’humaine ? Quand on rampe sur la terre, on ne peut monter au ciel ; et nous, loin de nous étudier à mener une vie conforme à la nature de l’homme, nous nous ravalons au-dessous de la brute. Ne savez-vous donc pas à quel tribunal vous comparaîtrez ? Ne songez-vous donc pas qu’on vous demandera compte de vos paroles et de vos pensées ; à vous qui ne veillez même pas sur vos actions ? « Un regard lascif jeté sur une femme est déjà l’adultère ». (Mt. 5,28) Et ces hommes qui auront à rendre compte d’un simple regard de curiosité, ne craignent pas de pourrir dans le péché ! « Celui qui traite son frère de sot, sera plongé dans la géhenne ». (Mt. 5,22) Et nous ne cessons d’accabler notre prochain d’outrages, nous ne cessons de lui dresser des embûches de toute espèce ! Il est tout simple d’aimer celui qui nous aime ; c’est là le mérite d’un païen. Et nous autres, nous haïssons ceux-là même qui nous aiment ! Quel pardon pouvons-nous espérer ? Nous devrions, on nous l’a ordonné, ne pas nous contenter d’observer les prescriptions de l’ancienne loi, et, dans la mesure même de cette ancienne loi, notre vertu est insuffisante ! Quelle bouche éloquente nous arrachera au châtiment qui nous menace ? Quel défenseur viendra nous assister et nous secourir, nous, misérables pécheurs marqués pour le, supplice ? Aucun ; mais nous hurlerons comme des réprouvés, nous pleurerons, nous grincerons des dents, nous gérons en proie aux tourments ; car nous serons condamnés à de profondes ténèbres, à des douleurs inévitables, à des peines insupportables. C’est pourquoi,