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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/610

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les a persuadés de la résurrection, et qu’il les a remplis par ce discours de ferveur et de zèle, il les met sur le chapitre de l’aumône. Ce n’est pas qu’il n’en eût déjà touché quelques, mots lorsqu’il disait : « Si nous avons semé chez vous les biens spirituels, sera-ce beaucoup si nous moissonnons de vos biens temporels ? » Et encore : « Qui plante une vigne et ne mange pas de son fruit ? » (1Cor. 9,7, 11) Cependant, la connaissance qu’il avait de l’excellence de cette vertu le détermine à en parler encore à la fin de cette épître.
Le mot de « collecte » qu’il met tout en commençant fait déjà envisager la chose comme légère et facile ; puisque tous contribuent à l’œuvre, la charge qui en résultera pour chacun ne pourra qu’être légère. Après avoir parlé de la collecte, il ne dit pas tout aussitôt : Que chacun de vous mette de côté chez soi, comme il était naturel de dire, non, il a soin de dire auparavant : Faites comme j’ai ordonné aux Églises de Galatie. Mentionner les bonnes œuvres des autres était un bon moyen d’exciter leur zèle par l’émulation. Et remarquez comme il introduit cette mention sous forme de récit ; c’est un procédé qu’il met encore en couvre dans son épître aux Romains. Il semble ne vouloir que leur parler du motif de son départ pour Jérusalem, et il prend de là occasion de se jeter sur le sujet de l’aumône : « Maintenant », dit-il, « je m’en vais à Jérusalem pour le service des saints. Car il a dit à la Macédoine et à l’Achaïë de faire quelques aumônes en commun aux pauvres d’entre les saints ». (Rom. 15,25, 26) Il excitait les Romains par l’exemple des Macédoniens et des Corinthiens, et ceux-ci par l’exemple des Galates. – « Faites », dit-il, « comme j’ai ordonné aux Églises de Galatie ». Les Corinthiens n’auraient-ils pas rougi de rester inférieurs aux Galates ? Et il ne dit pas : J’ai persuadé, j’ai conseillé, mais : « J’ai ordonné », ce qui marque plus l’autorité. Et il ne cite pas seulement une ville, ni deux, ni trois, mais toute une nation. C’est un moyen qu’il emploie également quand il traite des questions dogmatiques : « Comme je l’enseigne », dit-il, « dans toutes les églises des saints ». Que si l’exemple est efficace pour établir la foi des dogmes, il le sera bien davantage encore pour exciter l’émulation des bonnes œuvres.
Mais qu’avez-vous ordonné, dites-moi, bienheureux apôtre ? « Que le premier jour de la semaine », c’est-à-dire le dimanche, « chacun de vous mette quelque chose à part chez soi, amassant selon sa bonne volonté (2) ». Remarquez comme il sait les exciter même par la circonstance du temps ; car ce jour qu’il indique était propre à porter à l’aumône. Souvenez-vous, semble-t-il dire, quels bienfaits vous avez reçus ce jour-là. Les biens ineffables, et la racine et le principe de notre vie, c’est once jour qu’ils nous ont été donnés. C’est encore par une autre raison que ce jour augmente le zèle charitable ; il est le jour du repos et de la suspension de tous les travaux. Une âme affranchie de tout embarras d’affaires, en devient plus prompte et plus apte à pratiquer l’aumône. De plus, la participation aux mystères redoutables et immortels met dans l’âme beaucoup de zèle. En ce jour donc, « que chacun de vous » ; non un tel et un tel, mais « chacun de vous », quel qu’il soit, pauvre ou riche ; la femme ou l’homme ; l’esclave ou l’homme libre mette à part chez soi. Il ne dit pas : Que chacun porte à l’Église, de peur que l’on n’eût honte de donner peu ; mais après que ces petites sommes mises à part peu à peu en auront fait une un peu plus considérable, alors, quand je serai venu, qu’on me l’apporte. En attendant, mettez à part chez vous quelque chose, et faites de votre maison une église, le coffret qui recevra vos aumônes sera le tronc. Devenez le gardien d’un argent sacré, faites-vous spontanément économe des pauvres. C’est votre chanté qui vous confère ce sacerdoce. Les troncs qui sont dans nos églises sont encore une marque de cette ancienne coutume. Mais hélas ! le signe seul reste, la chose ne se voit plus nulle part. Je sais que la plupart de ceux qui sont ici me blâmeront encore de parler sur ce sujet ; je les entends déjà me dire : Épargnez-nous ces désagréables, ces fâcheux discours. Laissez cela à la volonté de chacun, et que chacun suive le mouvement de son cœur ; ce que vous dites maintenant ne sert qu’à nous couvrir de honte et de confusion. – Mais je ne tiens aucun compte de ces remontrances. Saint Paul ne craignait pas de se rendre importun sur ce sujet, ni de tenir le langage de ceux qui mendient. Si je vous disais : Donnez-moi, à moi, et déposez vos aumônes dans ma maison, il y aurait peut-être sujet de rougir ; ou plutôt il n’y aurait pas même alors sujet, « car », dit